Chronique de Concert
Fantazio (duo Monnaie de Singe) + Jean-Louis (Festival Jazz Sur La Ville)
Dès que l'on en passe l'antichambre, l'Embobineuse vous saisit et vous absorbe. L'identité de ce lieu est très forte. Décor luxuriant dans le style du "Dernier Cri", collectif d'artistes graphistes dont on présente les productions délirantes près du bar, carrosserie de voiture qui a au moins mon âge, un marsupilami géant est installé au volant, peut-être un invité de Fantazio...
L'artiste programmé à 21h00 commencera son show une heure plus tard. No Problemo : l'ambiance est sympa et on peut boire de la bière, visionner une projection de photos nippones (ni mauvaises).
Ça commence : Fantazio à la contrebasse et au chant (texte ? discours ? monologue ?...) est accompagné d'un batteur-percussionniste-jouets, Benjamin Colin avec lequel il forme le duo Monnaie de singe, d'une autre contrebasse et d'un trompettiste, ces deux derniers placés dans la salle, coude à coude avec le public sont membres du groupe Jean Louis : Aymeric Avice (trompette), Joachim Florent (contrebasse) et Francesco Pastacaldi (batterie)
Je n'assisterai qu'à la première partie du concert avec Monnaie de singe qui consistera en une longue improvisation que l'on pourrait qualifier d'expression spontanée. Cette forme d'expression artistique est surprenante, elle semble facile mais ne l'est pas. Beaucoup de gens établissent une équivalence entre inspiration, exploration du subconscient, hasard, automatisme et liberté.
Mais obéir aveuglément à toute impulsion est sans doute une autre forme d'asservissement, soumis à d'autres règles, qu'on ignore. Son dessein ne paraît pas avoir de limites précises et pourtant, Fantazio a l'air d'évoluer dans un douloureux carcan, il balance sans discontinuer entre l'amorce d'un projet structural et l'impondérabilité de sa prose. Il communique ainsi son vertige angoissant.
Fantazio commence par tout déstructurer. "Tabula Rasa" semble-t-il annoncer. Toute musique antérieure à lui semble désacralisée, frappée d'une immobilité marmoréenne. Puis il reconstruit, replace illico tout un monde musical fait de bribes, d'échos du passé, ou du présent : rythmes punk, phrasé rap, crooner, gondolier vénitien, spice girls ou à la Roberto Begnini. Un mot en anglais, deux en français, trois en espagnol, et en italien, façon Salvatore, le Quasimodo du Nom de la Rose ("Ma no lo sé...Salvatore e stupido, sputta là ! Thank You !")
La démarche n'est pas sans évoquer le projet dadaïste qui vers les années 20 remettait en cause, à la manière de la table rase, de toutes les conventions et contraintes idéologiques, artistiques et politiques. D'autant plus qu'autre chose émerge de cet immense chaos.
Citons Tristan Tzara : "Dada n'était pas seulement l'absurde, pas seulement une blague, dada était l'expression d'une très forte douleur des adolescents, née pendant la guerre de 1914. Ce que nous voulions, c'était faire table rase des valeurs en cours, mais, au profit, justement des valeurs humaines les plus hautes."
La logorrhée de Fantazio aurait-elle une dimension psychanalytique ?
Du frottement des cordes de sa contrebasse parvient un grincement dissonant, disgracieux : une cohorte de cafards émerge d'un monde vernaculaire. "Ils t'ont pris mais ce n'est pas ton corps ! ... Je vous en prie ! No sé cuando llegaron, Je ne sais pas quand ils vont arriver. Les enfants, c'est la monnaie des parents !" hurle l'artiste. Et lorsqu'il introduit le micro au fond de sa bouche, et profère des sons gutturaux, l'image de la fellation se déforme et devient la torture du dentiste qui introduit sa fraise, puis celle du viol.
Le chemin de croix sur lequel Fantazio évolue est douloureux, labyrinthique, peuplé de démons. Une jeune fille monte sur scène et entame, souriante, une danse lascive. Un guitariste rejoint la scène. (ndP : Pakito Bolino de Maitres Chien et Le Dernier Cri - entre autres). Je me retourne vers la salle.
Dans l'entropie environnante, les visages sourient, opinent, renvoient une certaine complicité, teintée d'admiration.
Peut-être est-ce moi qui n'ai rien compris. J'aurai quand même assisté à une expérience captivante et éprouvante, dans le bon sens du terme.
Plus de photos de cette soirée par Pirlouiiiit en cliquant ici
et une petite de Jean Louis : ici
et une petite de Monnaie de Singe (2ème set) : là
Critique écrite le 06 octobre 2010 par Mardal
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> Réponse le 07 octobre 2010, par Pirlouiiiit
Ayant tenu un peu plus longtemps que Mardal je peux vous en dire un peu plus sur le fameux trio JEan louIs (comme écrit sur leur myspace) et sur le deuxième set de Monnaie de Singe. En effet peu de temps avant le départ de Madral j'imagine, alors que Benjamin Colin et Fantazio étaient encore sur scène on a commencé à entendre de la batterie alors que Benjamin ne bougeait pas ses baguettes. Ma première pensée fut "quoi ils ont des samples en fait ?" et puis j'ai fini par réalisé que le son venait de derrière. Le duo Monnaie de Singe a salué le public qui n'avait pas tout de suite compris que la suite se passait en son sein justement. Cela dit en partant Fantazio a bien dit "à tout à l'heure !" A commencé alors un set particulièrement intense (le MPP aurait surement employé le... La suite | Réagir
> Réponse le 18 octobre 2010, par François Bégnez
Pour la dernière partie de la soirée, Francesco Pastacaldi et Joachim Florent batteur et bassiste de Jean-Louis ont accompagné le duo Fantazio. Bassiste peu inspiré (fatigué ?), obligé de trouver des riffs plus mécaniques et rythmiques que mélodiques (pour ne pas noyer la contrebasse de Fantazio), effets spéciaux biens présents (= mâchoire de cheval qui donne un sonne vibrant avec un effet d'écho) et batteur(s) plus synthétiques "binaire". La dernière chanson était interprétée par Fantazio seul (ou avec très peu d'effets de son comparse) et me laisse penser que ça n'aurait pas été plus mal comme ça... En tout cas, une pure soirée, avec des musiciens talentueux, des univers bien barrés, une scénographie originale... Vive l'Embobineuse ! Vive Fantazio ! Vive Jean-Louis ! La suite | Réagir
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