Critique d'album
Films Lim 061-080 : "Films Lim 061-080"
5 ans après l'Auberge Espagnole, délicieuse chronique générationnelle fourre-tout et hommage appuyé au programme Erasmus, le grand Cédric Klapisch récidive en reconvoquant son Antoine Doinel à Lui, le joli-coeur et indécis Xavier, toujours fort plaisamment joué par Romain Duris, et aussi toute sa bande de potes polyglottes. Le lien est habilement fait avec le premier film dès le début, mais pas besoin de l'avoir vu pour apprécier celui-ci.
Les Poupées Russes, ce sont toutes ces filles que Xavier, désormais trentenaire, effeuille une à une en en cherchant toujours une mieux à l'intérieur, qui résumerait et surpasserait toute les autres ! Du coup ce "pauvre" garçon est plutôt mal dans sa peau (on a quand même du mal à le plaindre quand on voit ses conquêtes, toutes plus jolies les unes que les autres...). Poupées Russes aussi, ses divers emplois d'écrivain qui se chevauchent (romancier, nègre pour stars, scénariste de feuilletons à l'eau-de-rose...) sans qu'il y trouve réellement sa voie non plus.
On suit donc avec plaisir les aventures parisiennes-bobo de ce brave garçon, comme la gestion de son ancienne relation avec Audrey Tautou (impeccable en chieuse moralisatrice), ou dans une scène fabuleuse où il présente une fausse fiancée à son grand-père, sa grande et merveilleuse copine-hélas-goudou (Cécile de France, moins bien employée que dans l'Auberge mais toujours aussi truculente et... ah Cécile !).
Puis le scénario rebondit, prétexte à reprendre avec lui le vagabondage amoureux et géographique - toujours ce petit côté Erasmus/Guide du Routard - de ce sympathique Bachelor. Il retrouvera à Londres la p'tite anglaise rouquine (Kelly Reilly, qui est devenue sacrément chouette malgré ses tenues... anglaises), puis à St-Petersbourg son frangin (l'ex-vomisseur et imitateur de mouches), devenu amoureux transis d'une ballerine russe. Toute la bande étant amenée à se retrouver pour un mariage (c'est dit dès le début, que personne ne m'accuse OK ? d'ailleurs j'arrête là).
Un très agréable divertissement donc, comme une série télé dont on aurait attendu longtemps la deuxième saison. Et en bonus, deux ou trois énormes trouvailles visuelles et scénaristiques à découvrir.... Alors en ces temps de canicule, aller prendre le frais avec Xavier et ses copains paraît une double façon de se rafraîchir, les neurones comme la carcasse, si en plus c'est la fête du cinéma vous n'avez plus d'excuses à rester surfer sur Liveinmarseille à la maison !...
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Match Point, un film de Woody Allen avec Jonathan Rhys-Meyers, Scarlett Johansson
Woody Allen donc, monument du cinéma. Mais surtout une marque de fabrique, une patte reconnaissable même quand on en a pas vu beaucoup (comme moi) : l'histoire se passe à New York, au milieu de bobos branchés et démocrates, et parmi eux un petit bonhomme quinquagénaire, hypocondriaque, à l'humour yiddish, et délicieusement horripilant ... Et ben ici de tout ceci, point : l'histoire se passe à Londres, au milieu de bourgeois fans d'opéra et thatchériens, et parmi eux un jeune homme même pas trentenaire, en pleine forme, sans un poil d'humour, et délicieusement inquiétant...
Parti de peu, Chris Wilton (Jonathan Rhys-Meyers, acteur impec dont on en reparlera) ne cache même pas, derrière son regard d'acier trempé, ses intentions : il est là pour se faire sa place au soleil, c'est clair. Ancien tennisman raté, il saute d'opportunité en opportunité, aussi bien professionnellement que sentimentalement, en visant toujours son intérêt propre et la meilleure position : on dirait presque qu'il joue aux échecs. Veut bien fréquenter une gentille jeune femme de bonne famille pour s'assurer une situation, veut bien être pistonné dans la boite de beau-papa et même essayer de la rendre enceinte pour devenir le gendre idéal.
On voudrait le détester mais il évolue dans un milieu d'une telle suffisance bourgeoise, d'un tel cynisme d'upper class, qu'on finit par souhaiter qu'il arrive à ses fins, quels que soient ses moyens. A la manière dont on s'identifiait à Alain Delon dans Plein Soleil (ou à Matt Damon dans Talented Mr Ripley, remake du précédent) : devant tant d'argent étalé, on ne peut que souhaiter la réussite de l'aspirant parvenu...
Il semble tout maîtriser sauf quand il la croise, elle, la blonde amie de son beau-frère, Nola Rice. Alias Scarlett Johansson, blondeur atomique et pulpeuse, nom de Dieu, que Marylin à 25 ans n'était même pas aussi sensuelle ! Enfin dans son premier rôle de femme fatale (après les délicieuses femme-enfant de Lost in Translationet de La Jeune fille à la Perle). Elle aussi s'est invitée au banquet de la haute société anglaise : elle est américaine, jeune actrice fauchée et probablement sans talent. Comme lui elle aime le luxe et le pouvoir et veut bien coucher pour réussir.
Le problème est qu'ils sont attirés irrésistiblement l'un vers l'autre. Alors que choisir ? L'ivresse des sens au risque du déshonneur et du déclassement social ? Ou l'éteignoir sur la passion au profit d'une réussite professionnelle et conjugale sans surprise, mais tellement confortable ? Ces personnages certes cyniques mais humains et donc attachants, sont-ils capables de faire intervenir dans le jeu, d'abord un téléphone, pour menacer de révélations, puis un fusil de chasse, au risque de virer au film noir ?
Maîtrisé, hitchcockien, amoral et cynique, parfois drôle, souvent haletant et finalement... tout à fait jubilatoire : ce film est l'excellente surprise de cette fin d'année et ouvre une brêche dans l'oeuvre un peu monolithique de notre petit chauve préféré, preuve qu'il en a encore sous la pédale (il a d'ailleurs fait dans la foulée un deuxième film à Londres où il avoue s'être éclaté et avoir rajeuni de 20 ans).
Le plus européen des cinéastes américains aurait-il enfin franchi le Rubicond et rejoint le bled ? Autant dire que ceux à qui il file des boutons n'en ont pas fini avec lui. Cela étant ce film bien différent du reste, devrait légitimement attirer un public beaucoup plus large que ses fans habituels. Surtout si vous allez toutes et tous le voir, sur mon conseil in-sis-tant !
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Million Dollar Baby, un film de de/avec Clint Eastwood, avec Hillay Swank et Morgan Freeman
Mettons les choses au clair de suite : Clint Eastwood est l'un des plus grands acteurs et cinéastes qu'Hollywood ait engendré (parce que refaire son CV à chaque fois prendrait trop de place). De toutes façons si vous êtes en désaccord avec cette affirmation je n'ai rien en commun avec vous, merci de ne pas poursuivre cette lecture et d'aller un peu plus souvent au cinéma au lieu de vous contenter de revoir l'Inspecteur Harry tous les ans à la télé. Sachez encore qu'il a 75 ans, toutes ses dents, ne s'injecte pas de botox et semble de taille à péter la sale gueule de son contemporain Charlton Heston, car Clint est un beau vieux progressiste - et non un vieux beau réac' comme l'autre...
2 ans après 'Mystic River', qu'on avait recommandé ici, voilà qu'il frappe encore de toutes ses forces, et il lui en reste ! L'ancêtre blasé et hiératique, un peu loser mais noble coeur, est son rôle préféré depuis 'Impitoyable' : il est ici un vieil entraîneur de boxe, Frankie Dunn, qui n'a jamais mené personne à la gloire (la ceinture de champion et le fameux Million Dollar, Baby), même s'il s'en est approché avec son vieux complice Scrap, avec qui il vivote dans sa salle de boxe défraîchie.
Complice qui y a perdu un oeil, pas rancunier mais l'oeil qui lui reste est la vraie mauvaise conscience de Frankie, un Scrap magnifiquement interprété par Morgan Freeman ("Mettons les choses au clair de suite, Morgan Freeman est l'un des plus grands acteurs noirs... etc, etc"). Arrive cette gonzesse de 30 ans révolus, Maggie, pas très fine, mais qui n'a que la boxe dans la vie et va le convaincre, à force de persévérance, de devenir son entraîneur et de franchir toutes les difficultés et les a-prioris, aidée en cela par son vieux complice, moins aigri même si elle brise le vieux couple qu'ils forment tous les deux.
Bien sûr, vous le devinez, que ça commence comme un Rocky ! Car c'est un film de boxe, genre classique traité ici jusqu'à l'extrême, l'intemporel. Mais de la vraie boxe réaliste comme dans Ali de Michael Mann, avec une vraie gonzesse comme dans GirlFight : Hillary Swank, impeccable et aussi attachante que dans le bouleversant Boys Don't Cry. Le rapport des deux acteurs oscillera longtemps entre la relation père-fille, et la relation amoureuse...
Si je vous dis que je ne peux aller plus loin au risque d'en dévoiler trop, que le film est d'un classicisme qui touche au sublime, à l'épure, presque du théatre filmé, vous en déduirez peut-être qui va gagner le dernier combat. Ou peut-être pas. Vous devriez aller vérifier quand même...
Parce que Clint Eastwood a annoncé que Million Dollar Baby serait son dernier film en tant qu'acteur et cinéaste. Parce qu'on ne manque pas les adieux d'un géant, on va s'y prosterner. Parce que la fin, elle, ne ressemble en rien à celle d'un film de boxe.
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Ocean's Twelve, un film de Steven Soderbergh, avec Brad Pitt, George Clooney, Matt Damon, Julia Roberts, Catherine Zeta-Jones, Donc Cheadle etc, etc.
Steven Soderbergh semble avoir inventé un concept : le film-récréation. Après l'excellent mais très sérieux Traffic, il avait fait Ocean's Eleven, un buddy-movie sympa et assez drôle où une bande de gangsters tous surdoués montaient une arnaque splendide et acrobatique pour détrousser un casino. Avec un casting à faire transformer en basse-cour n'importe quelle pause-café : George Clooney, Brad Pitt, Matt Damon, Don Cheadle ... et la superbe Catherine Zeta-Jones pour que les hommes ne soient pas en reste.
Ensuite il a fait Solaris, film très étrange mais sublime de science-fiction que je vous recommande chaudement s'il y a lieu de rattraper en DVD... et pour s'en reposer revoilà la récré : Ocean's Twelve. On prend les mêmes et on recommence : le volé du premier film, un certain Terry Benedict (aka Andy Garcia), qui n'a pas l'air vraiment méchant, réclame qu'on lui rembourse ses millions sous quinzaine, sous peine de le devenir, vraiment méchant.
Seule solution pour Billy Ocean : réunir sa bande et monter un coup encore plus gros, pour rembourser avec les intérêts : ils décident de voler un oeuf en or célèbre, appartenant au Vatican et exposé à Rome. Par ailleurs un gangster français de grande classe (Vincent Cassel, la boucle toujours rebelle mais un peu argentée maintenant) est également sur le coup : il veut démontrer qu'il est le plus fort et s'acharne dès lors à les doubler et à leur pourrir la vie.
Le scénario comporte de bonnes trouvailles, la première étant que contrairement au premier volet où tout marchait comme sur des roulettes, dans celui-ci tout va systématiquement partir en c...; le plan A comme le plan B. Il y a aussi des scènes très originales (Julia Roberts jouant une sosie de Julia Roberts... qui se déguise en Julia Roberts pour s'introduire dans un hôtel de luxe, et qui va être confrontée à une autre star hollywoodienne dans son propre rôle)
Le tout est quand même un tantinet surchargé, les invraisemblances sont nombreuses (j'aimerais qu'on m'explique comment on vend un oeuf en or du 16ème siècle qui vaut 200 millions de dollars et connu de tous les antiquaires de la planète, comment on arrive en TGV à Rome en partant de Paris Gare du Nord sans changement, comment on échappe à des rayons lasers en dansant le hip-hop, etc).
Bref, à aller voir pour ne pas trop réfléchir, et surtout sans trop réfléchir, pour passer un bon moment et se remettre d'avoir repris le boulot !
PS : Pour commencer l'année, que je vous souhaite très bonne, j'ai vu Rois et Reine d'Arnaud Desplechin, film 'téléramesque' par excellence : un réalisateur intello fait tourner des acteurs intellos, le critique frétille et s'enflamme ! Cependant il est vrai que l'histoire est belle et inattendue, les acteurs de temps en temps excellents... j'y ai passé un bon moment, Desplechin étant devenu moins chiant que par le passé. et je pense que si vous suivez la nouvelle nouvelle vague du cinéma français, ou bien la carrière d'Emmanuelle Devos et de Mathieu Amalric, il convient de marquer cette étape !
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Sideways, un film d'Alexander Payne, avec Paul Giamatti, Thomas Haden Church, Virginia Madsen
Non, je ne peux pas faire le coup à chaque fois : je l'avoue, votre vie ne sera pas changée si vous allez voir Sideways (et donc, si vous n'y allez pas). Par contre vous aurez au moins la réponse aux questions suivantes :
- Peut-on inventer, avec deux acteurs que personne n'attend, un de ces duos explosifs que tout oppose (objectifs, moyens, ego ...), le buddy movie le plus sympa depuis bien longtemps ?
- Peut-on, tout en racontant la virée de ces deux amis, parler de vins simplement, sans pontifier ni documenter (comme dans l'excellent Mondovino), pour que les américains comprennent enfin qu'une bouteille de vin est comme un être vivant, contrairement à une boîte de soda sucré ?
- les vins californiens sont-ils aussi appétissants que les français, la route des vins aussi excitante à suivre au nord de Los Angeles qu'au sud de l'Alsace ?
- Un type dépressif et tout à fait commun (Paul Giamatti, le même que dans American Splendor qu'on vous avait conseillé, excellent !) peut-il faire craquer, rien qu'avec leur passion commune du vin, une sommelière blonde, douce et superbe comme une grappe de syrah bien mûre (Virginia Madsen, impeccable) ?
- De même, un bellâtre sur le retour, macho, adultère et égoïste, aussi attirant qu'un vieux cep de merlot, mérite-t-il qu'on lui pète la gueule à coups de sac à main, pour peu qu'on soit une brune incendiaire, flamboyante comme un verre de Chateau Le Blanc 1983 ?
- Autrement dit et pour résumer, un enterrement de vie de garçon, doit-il vraiment servir à (excusez-moi, je le cite) 'se purger le système' ?
- En bref, est-ce que ce film qui sort de nulle part peut être drôle et intéressant, vous révéler une bande de nouveaux acteurs, et vous faire passer un excellent moment ?
Moi j'y suis allé, j'ai eu mes réponses et en plus j'ai beaucoup ri (idéal après une journée merdique). A vous de voir.
Par ailleurs je ne résiste pas à en remettre une couche sur Mar Adentro, très justement oscarisé dimanche comme meilleur film étranger (au nez et à la barbe de Jugnot et ses mouflets miauleurs, Jeunet et son Amélie des tranchées). Car Mar Adentro est un film extrêmement bien joué, émouvant, vibrant plaidoyer pour la liberté, ne le ratez pas !
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Sin City, un film de Robert Rodriguez, avec Mickey Rourke, Bruce Willis, Benicio Del Toro
Adapter Sin City, la BD culte de Frank Miller ultraviolente et en noir et blanc, n'était pas à la portée du premier tâcheron venu. Pas facile de montrer les fusillades pétaradantes, les phénoménales et sanguinolentes bastons, les bagnoles stylisées et littéralement bondissantes, les héros en forme d'armoires à glace, les méchants en psychopathes terrifiants et enfin toutes ces sublimissimes créatures féminines... Or il fallait au bédéphile pouvoir y retrouver tout ça, pour être convaincu !
De quoi se méfier, quand on sait à quel point les adaptations de Marvel comics sont de qualité aléatoire (exemple du même Frank Miller, citons le DareDevil mollement incarné par Ben Afflasque, heureusement sauvé à l'époque par Jennifer Garner, et justement avec la même, le nulàchierissime Elektra que je n'ai même pas osé chroniquer ici, de honte d'y être allé).
Mais ici, mèfi ! Pas pareil, c'est le virtuose Robert Rodriguez aux manettes ! Les fusillades, cascades et autres explosions totalement irréalistes, c'est son rayon depuis le mythique El Mariachi (et son plaisant remake Desperado qui l'a révélé au monde). Pour faire bonne mesure il a d'ailleurs co-réalisé l'oeuvre avec Frank Miller lui-même. Le résultat est, en matière d'adaptation de bédé, très probablement la plus grande réussite artistique à ce jour !
Chaque acteur rappelle immanquablement son personnage dessiné, que ce soit la bête humaine Marv incarné par Mickey Rourke (méconnaissable avec, et aussi sans maquillage), le bad cop Jackie Boy joué par Benicio Tel Toro (salement amoché lui aussi), le terrifiant psychopathe muet incarné par Elijah Wood, les policiers borderline Hartigan et Dwight qu'incarnent magnifiquement le hiératique Bruce willis et l'impassible Clive Owen, sans compter toutes ces affolantes guerrières en cuir et bas résille...
Leurs histoires se croisent et se confondent, comme dans l'oeuvre originale (dont l'histoire ici reprend peu ou prou les 3 premiers tomes), avec tout de même trois grandes parties : Marv parti venger sa belle prostituée assassinée ; Dwight en lutte pour protéger la vieille ville contre la mafia ; Hartigan parti assassiner le pervers fils du sénateur Roark pour sauver une fillette. Ils auront bien sûr tous affaire, à un moment ou un autre, aux créatures sublimes et dangereuses qui peuplent la vieille ville de Sin City, ces prostituées autogérées, adeptes d'arts martiaux et de gunfight.
Evidemment les critiqués ciné sont pour la plupart tombés dans leur travers habituel : oublier qu'il (ne) s'agit (que) de BD et du coup décréter que c'est trop violent, invraisemblable et gratuit (la routine, quoi). Et pourtant quel bonheur, les plans et les cadrages contiennent un million de trouvailles visuelles pour rendre hommage au dessin inventif de Frank Miller, le film est d'une ultra-violence par moments irrésistiblement drôle, c'est une réussite absolument jouissive et pour bien vous convaincre d'aller le voir, j'ai même fait un gros effort pour ne pas parler des histoires, que les fans connaissent de toutes façons déjà... Dernier conseil pour eux, ne relisez pas les bédés avant d'y aller : l'adaptation est si fidèle que vous pourriez y perdre en suspense !
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Star Wars Vol. III, un film de George Lucas, avec Ewan McGregor, Natalie Portman, Hayden Christensen
Les 1ers et 2ème volets du mythique space opera avaient relativement déçu, on a même lasérisé ici le 2ème (monument d'ennui, avec ses combats et son scénario bidon, et ses mauvais acteurs). Cependant il nous fallait bien aller voir celui-ci, La revanche des Sith, au moins pour boucler la boucle commencée en 1977 (je ne sais pas pour vous, mais moi j'étais un très très jeune padawan à l'époque, du genre pas encore propre !).
Comme 90 % de la population de cette génération, le lecteur de ceci est allé, ou ira voir ce film. Peu importe qu'on lui dise qu'il y a des milliards d'invraisemblances (impossibles à lister ici) dans le scénario ! Une, une seule pour rire mais quand même : comment se fait-il que, quand il mouline avec dans les combats, maître Yoda ne se découpe pas les oreilles avec son sabre laser, hein ?
Certes on ne va pas voir un Star Wars pour voir de la vraisemblance, mais des combats au sabre laser, du défi aérien entre chasseurs X-wing, des grands paysages ésotériques et des bases futuristes ! Eh bien de tout cela tu trouveras, lecteur, et même mieux ce sera que dans les premiers tomes. Les acteurs meilleurs seront, Obiwan Mc Gregor en tête, tu verras qu'il est devenu la meilleure incarnation du valeureux chevalier Jedi depuis le (futur) Luke Skywalker (qui a un petit rôle ici)...
Hélas le jeune Anakin joue toujours avec sur le visage l'expressivité d'une palourde, visage qu'il va fort heureusement devoir couvrir bientôt pour devenir Darth Vader (ouais, c'était ça son vrai nom au début, et ça fait encore plus peur que Dark Vador, non ?). Même Padmé Portman ne sera finalement qu'une pleureuse un peu faiblarde, bien dans l'idée machiste que George Lucas semble se faire du monde !
Mais ne boudons pas plus longtemps : l'histoire est plus prenante, il y a un peu plus de cet humour potache qui faisait tous le charme des épisodes suivants, les effets spécieaux repoussent les limites de l'univers connu, bref : c'est le meilleur Star Wars!... des trois premiers évidemment. Alors tu m'as compris, lecteur, tu as rendez-vous avec ta jeunesse et avec un beau spectacle, n'hésite plus ! Va, et may the Force be with You !
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The Island, un film de Michaël Bay, avec Ewan Mc Gregor, Scarlett Johannson
Michaël Bay a commis un certain nombre de bouses pour popcornophages (The Rock, Pearl Harbor, Armageddon) que, pas maso non plus, je ne suis pas allé voir. Par contre des chroniques presques élogieuses de ce blockbuster de fin d'été ont éveillé mon intérêt. Il raconte l'histoire d'une colonie où sont recueillis des êtres "parfaits" ou presque, tous vêtus de blanc, qui ont échappé à une mystérieuse Grande Contamination et sont ici soignés.
Ils attendent de gagner, chaque soir à la Loterie, leur billet pour un paradis préservé, le dernier sur Terre : l'Ile - The Island ... un peu comme dans Gattaca. Ils sont surveillés dans leurs moindres faits et gestes et au besoin, médicalement tranquillisés (un peu comme dans 1984). Bien vite on s'aperçoit que quelque chose cloche car le héros, un peu fouineur, réussit à passer à l'envers du décor... un peu comme dans Un bonheur insoutenable. C'est bien sûr lui, l'être inadapté qui va enrayer le système, un peu comme dans Le Meilleur de Mondes : il découvre que lui et tous ces gens sont enfermés, et qu'on leur ment. Un peu comme dans Matrix, ils vivent dans une illusion de réalité... et non, j'ai encore rien raconté de plus que la bande-annonce !
Bref avec tous ces "un peu comme dans", on aura compris que c'est a kind of best-of sience fiction, voire la S.F. expliquée aux enfants ! Le pitch de départ n'est certes vraiment, mais alors vraiment pas nouveau sur le fond pour qui a lu un peu de livres de chez Denoël dans sa vie ou vu leurs adaptations... Cela étant l'histoire est suffisamment bien traitée sur la forme pour qu'on soit emporté par l'action. Par ailleurs, le thème du clonage, car il en est question aussi, entraîne une réflexion bioéthique et des situations plutôt intéressantes, et un traitement bien plus malin que ce qu'on pouvait craindre !
On suit donc l'échappée dans le vrai d'un couple formé par un Ewan Mc Gregor et une Scarlett Johannson, très crédibles (et êtres effectivement parfaits, physiquement), plutôt bien dirigés de surcroît.
Et que les fans d'action ne s'inquiètent pas, malgré tout ce qui vient d'être dit, explosions, fusillades et poursuites sont au rendez-vous, et quelques scènes sont même particulièrement réjouissantes, comme quand le héros démolit des 4x4 en série puis s'enfuit sur une pétaradante moto volante qui a l'air très amusante à conduire ...
Le blockbuster américain est décidément en pleine révolution depuis un an : après le Jour d'Après qui parlait de changement climatique imputé aux américains, La Guerre des Mondes où le héros s'autorisait impunément à buter quelqu'un de sang froid, Land of the Dead qui dénonçait l'impérialisme américain et faisait prendre en pitié des monstres, voici The Island qui démolit le mythe de la jeunesse éternelle... Mais quelle mouche les pique à la fin ?! Seront-ils bientôt plus rebelles et subversifs que le cinéma français ?
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Va, vis et Deviens, un film de Raud Mihaileanu, avec Yael Abecassis, Roschdy Zem
Voici un film à la sortie discrète, qu'il serait pourtant très malheureux de rater. Il s'ouvre avec des photographies bouleversantes de Sebastiao Salgado, illustrant un bref résumé de l'épisode dramatique de la grande famine d'Ethiopie de 1984... jusqu'à ce qu'une photo s'anime. Va, Vis et Deviens, ce sont les trois injonctions qu'une mère réfugiée au Soudan lance à son fils, avant de l'envoyer se glisser parmi un convoi qui, en l'arrachant à la famine, va peut-être lui sauver la vie. Mais ce n'est pas n'importe quel convoi : celui Qu'Israël organisa, en 1984, pour rapatrier vers la Terre Promise les juifs d'Ethiopie, peuple descendant selon la légende du roi Salomon et de la reine de Saba.
Le petit garçon, 9 ans, entame donc un exode géographique, mais aussi culturel (vers l'Occident), religieux (vers le Judaïsme), et enfin ... un saut temporel, l'Ethiopie ayant environ 5 siècles de retard sur l'Israël moderne où il atterrit. Rebaptisé Schlomo, il va devoir cacher le fait qu'il n'est ni orphelin, ni juif. La détresse et le dépaysement de ce petit garçon égaré, qui parle le soir à la lune pour que sa mère l'entende, dort par terre et enlève ses chaussures pour sentir le sol sous ses pieds, sont si touchants qu'on le prend immédiatement en sympathie.
Son acclimatation en Israël se fait heureusement au sein d'une famille pleine de bonne volonté (les parents sont impeccablement incarnés par Yael Abecassis et Roschdy Zem). Il peut aussi compter sur l'appui d'un vieux sage éthiopien, déraciné comme lui, qui l'a pris en affection et lui sert de guide. Il devra cependant vivre avec l'incompréhension de son destin, l'absence de sa mère et la culpabilité du mensonge originel...
Et de surcroît en Israël, nation au destin tourmenté par ses propres démons, qui n'est pas exempte d'une certaine xénophobie, mais aussi pays d'accueil : le film a l'immense mérite de montrer qu'Israël n'est pas qu'un pays en guerre, qu'on peut aussi y être aimé et y grandir, grâce à la générosité de presque tout un peuple envers sa diaspora religieuse (à ma connaissance nous n'avons jamais rapatriés en masse des chrétiens depuis un pays en guerre ...).
Le film est servi par la musique symphonique, belle et très émouvante par instants, d'Armand Amar. Evidemment elle joue parfois un peu sur la corde sensible, quand le mélodramatique affleure. Et 2 h 30 de films sont à la fois trop longs, et trop courts pour raconter 20 ans de la vie de ce garçon, incarnés par trois acteurs, sur trois époques qui semblent donner écho aux trois commandements d'origine... et dans trois langues (éthiopien, hébreu et français).
Le cinéaste n'a pas pu choisir entre son envie de conter Israël et l'Ethiopie ; entre le destin de ces 8000 expatriés (qu'il a longuement rencontrés avant de faire le film) et l'histoire particulière de Schlomo ; entre son enfance et sa rencontre du judaïsme, et son passage à l'âge adulte et sa rencontre de l'amour...
Il y a donc par moments des longueurs, et des ellipses tout à la fois. Mais les maladresses de ce film sont bien pardonnables, lui qui est surtout une fresque épique, une grande leçon d'histoire et d'humanisme. On en sort avec la gorge nouée, la résolution d'arrêter de se plaindre pour des conneries, et peut-être comme une envie prendre la main d'un réfugié pour connaître son histoire à lui...
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Wallace & Gromit, Le Secret du Lapin-Garou, un film de Nick Park
Voilà typiquement un film dont il n'est probablement pas besoin de faire l'article tant les fans petits et grands ne nous auront pas attendu pour aller le voir. Mais supposons qu'il existe un malheureux enfant au monde, privé de télé depuis 10 ans à Noël, et qui n'ait donc jamais croisé la route de nos deux sympathiques héros anglais, Wallace et Gromit.
Alors pour que cet enfant ne rate pas plus longtemps le phénomène qui va l'émerveiller comme nous tous : Wallace et Gromit sont deux personnages animés, ou plutôt formidablement animés (24 images/secondes en pâte à modeler, tu vois un peu le boulot) qui vivent des aventures loufoques, drôles, généralement pantouflardes au début et frénétiques à la fin, et surtout so british par leur humour et leur nonsense tout monthy-pythonesque.
C'est comme qui dirait le must en matière d'animation image par image. Ils ont déjà sévi au format moyen-métrage à trois reprises (citons Un mauvais Pantalon, le chef d'oeuvre incontestable, et d'ailleurs oscarisé de Nick Park leur génial créateur) et viennent désormais faire les malins sur leur premier long métrage, petit trublions anglais de 20 cm de haut (pour le plus grand) et qui ont joyeusement enfoncé le box-office américain.
Leur petite entreprise Anti-Pesto étant chargée de protéger les potagers de leur petite ville de lapins un brin envahissants (surtout à une semaine du concours du plus beau légume, attraction de l'année), ils se retrouvent confrontés à un monstre, le lapin-garou, créé accidentellement par une manipulation malencontreuse à la Frankenstein. Celui-ci menace de tout dévorer, ce qui serait un drame atroce pour la communauté : les intrépides se lancent donc à la recherche du Monstre.
Il s'agit donc officiellement du "premier film d'horreur végétarien". Il est, faut-il le préciser, bourré d'inventions, de trouvailles visuelles, de gadgets improbables, de poursuites pétaradantes et de références à des films de légende, il est très drôle et assez captivant dans l'ensemble, même si le rythme allongé permet au réalisateur de prendre un peu ses aises par moments (il faut avouer quelques baisses de rythme). Mais on ne boudera pas son plaisir puisqu'on peut passer cette fois-ci 3 fois plus de temps que d'habitude avec ces deux incroyables personnages...
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Trois Enterrements, un film avec Tommy Lee Jones
Bonne année à tous, vus trois films pendant les fêtes, tous dignes d'intérêt, à vous de choisir (je les ai quand même classé par ordre de préférence).
3 Enterrements aurait du être choniqué ici depuis longtemps (faut tout faire soi-même,'vous jure) : c'est un très original et très beau road movie/western qui fut écrit, dirigé et joué par un Tommy Lee Jones inspiré et impeccable. Il y incarne Pete, cow-boy dont l'ami Melquiades, clandestino mexicain, a été abattu (certes par erreur) par un policier de la frontière particulièrement brutal (épatant Barry Pepper, un nom à retenir). Fidèle à une parole donnée à son ami, il se met en tête de ramener son corps à sa famille restée au pays, mais en forçant l'assassin à l'accompagner. Imaginez un peu l'équipée improbable (un vieux impavide, un jeune facho et un macchabée), ou plutôt dépêchez-vous d'y aller : parole de gringo, c'est magistral, drôle et émouvant, c'est un chef d'oeuvre du genre et il vous reste environ une semaine.
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La Vérité Nue, avec Kevin Bacon, Colin firth, Alison Lohman
...La Vérité nue est un polar noir à l'ancienne, signé du toujours sulfureux Atom Egoyan qui y ajoute une bonne dose d'érotisme. L'histoire se passe dans les années 50, où une jeune fille morte est retrouvée dans la chambre de palace d'un duo d'animateurs célèbres venus faire un téléthon (incarnés par les excellents colin Firth et Kevin Bacon). Ils s'en tirent à l'époque sans dommages, mais stoppent tout net leur collaboration. Quinze ans plus tard une jeune journaliste (Alison Lohman, une bombe) veut comprendre ce qui s'est passé et rouvre la boite de Pandore... Histoire un peu conventionnelle mais ambiance tout à fait fascinante et la distribution est tout à fait parfaite (je défie les garçons de ne pas tomber amoureux de la journaliste et les filles de ne pas s'émouvoir devant les fesses de Kevin Bacon...).
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Angel - A, un film de Luc Besson aveC Jamel Debbouze, Rie Rasmussen
...Et enfin, Angel-A n'est pas aussi mauvais que ce que les critiques ciné, définitivement braqués contre Luc Besson (ainsi que Patrice Leconte, Claude Lelouch et quelques autres), veulent bien nous faire croire. C'est naïf, d'accord, cette histoire d'ange blond descendu aider le p'tit beur de service qui doit de l'argent à tout Paris. Mais c'est pas si mal joué, l'image est très soignée et on passe un moment plaisant. Alors n'hésitez pas si votre petit frère fan de Jamel Debbouze vous tanne ; rien que d'admirer la plastique de Rie Rasmussen garantit déjà de ne pas s'ennuyer un seul instant.
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A Scanner Darkly de Richard Linklater, ou Little Miss Sunshine de Jonathan Dayton ?
Mon premier, A Scanner Darkly est un film de science-fiction adapté d'une nouvelle de Philip K.Dick (Blade Runner, Ubik ...), écrit dans sa période la plus torturée et la plus toxicomane, où il habitait dans un squat avec de jeunes drogués. Le film en partie autobiographique traite donc d'un monde tombé sous l'emprise d'une drogue, The D Substance, où les services de police - eux-même pleins de malades - s'efforcent tant bien que mal d'endiguer le fléau, en collaboration avec une mystérieuse organisation, The New Path, qui promet la guérison aux toxicos arrêtés. On comprend vite que ceux-ci, complètement ailleurs, s'imaginent couverts d'insectes ou ne comprennent même plus, y compris à plusieurs, comment fonctionne un pédalier de vélo...
Pour matérialiser encore mieux l'état second dans lequel vit tout le monde, le cinéaste a utilisé un procédé de retouche d'image, le rotoscope , du même type que celui vu dans le très beau et français Renaissance (mais avec un traitement plus coloré, plus bédé). Le policier Bob Arctor (Keanu Reeves, magistralement paumé), au passé troublé (il avait une famille, il a tout perdu ...), vit et se shoote avec d'autres marginaux dont un certain Jim Barris, conspirationniste et paranoïaque (Robert Downey Jr, fabuleux en taré digne de Las Vegas Parano), une copine inquiète (Winona Ryder, belle mais borderline) et un abruti notoire (Woody Harrelson, parfait dans le rôle).
Les services de la police lui font constamment passer des tests mentaux déroutants, pour s'assurer de son état mental vacillant, dû aussi bien à la drogue qu'à la nature de son travail. En effet le tout se passe dans un monde où chacun est filmé et repéré partout et tout le temps ("dans 7 ans" disent-ils en introduction... on s'en rapproche en effet). Les policiers, pour ne pas se faire remarquer ni se compromettre, portent donc un costume d'anonymat (trouvaille visuellement fascinante), qui leur fait constamment changer d'apparence. Personne ne le connaissant autrement que comme l'Agent Fred, pas étonnant qu'on finisse par lui demander, pour arrêter Jim Barris, d'espionner... Bob Arctor, lui-même.
Le héros s'enfonce alors dans une spirale de dédoublement de la personnalité, aggravé par le costume d'anonymat. Qui sont ses amis, ses ennemis, pour qui roule le New Path ? Très maligne et flippante histoire de S.F. Dickienne, sur les musiques les plus étranges de Radiohead (et même de Thom Yorke) - si vous n'avez jamais rien lu de lui il y a fort à parier que l'envie vous vienne. Meilleur film de S.F. de l'année, jusqu'à preuve du contraire !
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A Scanner Darkly de Richard Linklater, ou Little Miss Sunshine de Jonathan Dayton ?
... Mon deuxième ? Litte Miss Sunshine, comédie familiale joyeuse et déjantée, où une famille entière de losers (père écrivain raté, fils ayant fait voeu de devenir muet jusqu'à devenir pilote, grand-père vieux satyre vulgaire, tonton expert de Marcel Proust et suicidaire, maman débordée), une famille de fous donc, décide sur un coup de tête d'accompagner la petite dernière (mignonne mais rondouillarde et binoclarde) à un concours de beauté à l'autre bout des USA, le tout dans un Combi Volkswagen qui ne démarre qu'en troisième. Une odyssée tendre, drôle et gentille, un vrai moment de bonheur simple, sur des musiques guillerettes du génial Sufjan Stevens, à se garder pour oublier une journée bien merdique au bureau !
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Babel, un film de Alejandro González Iñárritu, avec Brad Pitt, Gaël Garcia Bernal
Après le très sombre Amours Chiennes et le tortueux 21 Grammes, voici le nouveau film de A.G. Iñárritu. Sur une mécanique narrative entremêlée chronologiquement (mécanique qui devient un peu voyante à force, au bout de trois films sur le même principe !), il raconte comment plusieurs groupes d'individus voient leurs destins perturbés, autour d'un fusil de chasse qui les relie de près ou de loin (Maroc, Mexique, Japon).
Deux gamins marocains s'amusant avec ce fusil, touchent accidentellement une touriste américaine (Cate Blanchett) dans un bus, ce qui déclenche une terrible galère de son mari (Brad Pitt) pour gérer sa grave blessure en plein bled. Pendant ce temps aux USA, la nounou mexicaine de deux enfants les entraîne, bien malgré elle, dans un mauvais plan tout aussi dangereux.
Et au Japon, on suit la vie d'une jeune fille sourd-muette et mal dans sa peau, sans rapport apparent avec le reste des histoires - le principe étant l'éclaircissement progressif des liens et de la chronologie, bien sûr, mais ici un peu trop voyant pour être aussi déconcertant que dans 21 grammes.
Le film recèle des personnages intéressants (la jeune japonaise est très touchante, Brad Pitt est sobre et bon en mari affolé et dépassé, ainsi que la nounou mexicaine), même si certains ressorts narratifs sur l'incompréhension entre langues et cultures différentes (pourtant le "pitch" du film) auraient pu être bien mieux utilisés à mon sens - le plus bel exemple "babélien" étant finalement ces touristes américains, terrorisés de sortir du circuit balisé, et convaincus qu'on va les tuer, dans le paisible village marocain où ils ont atterri.
Avec quand même quelques très beaux moments de cinéma, grâce à une réalisation direction d'acteurs impeccables, il reste au final un très bon thriller, de ce qui aurait pû (dû) être un chef d'oeuvre. La prochaine fois ?
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Brokeback Mountain, un film de Ang Lee avec Jack Gyllenhall, Heath Ledger
Si vous vous intéressez un tout petit peu au cinéma, vous avez du voir arriver ce film, fraichement auréolé du Lion d'Or de Venise et de Golden Globes variés (autant dire, d'Oscars à venir), et vous savez probablement déjà qu'il s'agit d'une histoire d'amour entre deux cowboys. Ang Lee est donc, maintenant c'est sûr, un grand cinéaste : il avait su nous faire rêver avec Tigre et Dragon, nous faire passer un excellent moment (en tout cas en matière d'adaptation de comics) avec Hulk... et nous fait désormais fondre devant l'amour pourtant peu expansif de deux cowboys virils, filmé ici avec un classicisme tout Eastwoodien.
Jack et Ennis se rencontrent à 20 ans en faisant la saison d'alpage, perdus dans l'immensité sublime des montagnes rocheuses : l'un garde le camp de base et l'autre monte dormir avec les moutons (qui n'avaient sans doute jamais été aussi bien filmés), ils ne se voient que le matin et le soir. Collègues, puis amis, ils se bourrent la gueule une nuit où il fait froid dans la tente et dans leurs coeurs, et le passage à l'acte semble alors presque naturel entre hétéros. Mais cette idylle qui peut se vivre librement en pleine nature est évidemment impossible à envisager en ville.
Dans cette Amérique de bouseux du Wyoming, qui plus est dans les 60's, l'interdit social est certes moins visible que dans, par exemple, My Beautiful Laundrette (autre chef-d'oeuvre du genre) où les amants se faisaient casser la gueule, mais tout aussi fort et plus insidieux, à peine montré. Au fond ici, l'homosexualité n'est même pas interdite : elle n'existe tout simplement pas, elle est niée et cachée, même par ceux qui la surprennent en flagrant délit. Car un cowboy "normal", un good old boy comme on dit dans le Wyoming, il doit se trouver une gentille fille, lui coller 2 ou 3 marmots, acheter un beau pick-up, découper la dinde à Thanksgiving en faisant risette à beau-papa, finalement se laisser vieillir en votant républicain...
Le film pourrait au fond s'appeler "Retour à Brokeback Mountain" (plutôt que "Le secret de" qui est plutôt inadapté): Jack et Ennis mettent leurs sentiments entre parenthèses jusqu'à ces trop rares jours où ils peuvent s'échapper tous les deux dans la nature. Alors que leurs valises sociales se font sans cesse plus lourdes avec les années, vont-ils pouvoir s'émanciper et franchir la barrière sociale pour écouter leur coeur et commencer à vivre ?
Entre le plus enjoué, mais aussi le plus accro des deux, Jack (de son vrai nom Jack Gyllenhall, affectueux et touchant) et le taiseux à fleur de peau, à l'accent de péquenot (Heath Ledger, sobre et beau comme Steve Mc Queen) se noue un couple d'abord drôle, puis crédible, puis tout simplement bouleversant. Car en souvenir du temps heureux, chaque paysage de montagne, chaque musique douce à la guitare (par opposition à la country qui habite leurs vies) fait revenir l'émotion, et le toucher d'un vêtement de l'autre fait monter les larmes... Ce film pourrait bien être la plus belle love story académique depuis Sur la route de Madison et vous bouleverser autant qu'Eternal sunshine of the Spotless Mind, ne le ratez pas !
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Dans la Peau de Jacques Chirac, un film de Karl Zéro et Michel Royer
Avant d'aller voir les stars de Cannes, Ken, Pedro et Sophia (nul besoin de leur faire de la pub, nous les aimons presque tous à la folie), pourquoi ne pas aller voir d'abord Dans la Peau de Jacques Chirac de Karl Zero et Michel Royer (l'homme du Zapping de Canal) ? Ce film met en scène un choix exceptionnel d'images d'archives dont certaines très anciennes (en noir et blanc) et d'autres très récentes (ça va jusqu'au CPE, quand même !). Il est vrai que l'homme politique habite nos écrans télé depuis 1967, ça nous rajeunit pas hein ! Du jeune énarque assez bel homme mais déjà très agité, au pacha impavide, vieillissant et sourdingue, en passant par le quadra arrogant aux célèbres lunettes carrées, toute sa vie est retracée, plus ou moins par thèmes, plus ou moins chronologiquement.
Tous les morceaux de bravoure attendus y sont, le mouchage par François Miterrand, "le bruit et l'odeur" en entier (et avec l'image), les coups de gueule, les humiliations que lui fait subir Bernadette... et des séquences rigolotes de quand il voulait faire "proche du peuple" en allant faire le guignol en gilet de laine, en Corrèze. Bien sûr le fait d'avoir ajouté des faux commentaires en voix off, dits par Didier Gustin, donne une interprétation très "Vrai Journal" des faits, alors que pas mal d'images se passeraient très bien de commentaires. Le Chirac qui s'exprime est ainsi très proche de celui de sa marionnette : une sorte de glandeur roublard qui ne rêve que de conquête du pouvoir mais ne sait pas quoi en faire ensuite (ce qui énervera ses supporters), et comme sa marionnette il apparaît finalement comme un gars plutôt sympathique (ce qui énervera ses ennemis). Pas la peine de chercher plus loin pourquoi la critique n'a pas aimé ce film !...
Cependant cette voix off a le mérite de nous raconter une monographie de Chirac qui se suit très agréablement, et aussi de nous montrer le plus étonnant, ce qui aurait parfois pu nous échapper, par exemple ce début du conseil des ministres où Giscard arrive, en tant que président, à ne pas serrer la main de Chirac, son premier ministre, alors qu'il fait le tour de la table ! Mieux encore, cette petite tape que Bernadette lui fit dans le dos en 1995 quand il allait se montrer à la foule, et qui a bien failli faire basculer du balcon le grand couillon le soir-même de son élection (qu'est-ce qu'on aurait ri, je crois bien que j'en serais mort étouffé...)
Le montage de 40 ans de paroles publiques de Chirac rend évidemment facile le fait de le mettre devant ses changements d'avis, ses contradictions, ses lapsus et ses promesses non tenues... L'exercice serait réalisable avec pas mal d'hommes politiques. Il n'en reste pas moins que c'est très amusant, et que ça concerne quand même le type pour lequel le plus d'entre nous ont voté (oui, je sais, c'est un truc que pas mal de gens ont réussi à refouler dans leur inconscient, mais quand même). Alors ne me dites pas (comme lui) que ce genre de film, "ça vous en touche une sans bouger l'autre", et allez plutôt vous amuser un peu à ses dépens, chacun son tour, depuis le temps qu'il se fout de notre gu...
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Enfermés Dehors, un film de et avec Albert Dupontel
Vous l'aviez peut-être oublié mais LUI se rappelle de vous ! Albert Dupontel, auteur de l'inoubliable Bernie (selon moi l'un des films les plus drôles de tous les temps) et d'un Créateur à peine moins trash, revient avec sa bande de drôles de gueules habituelles dans un film qui repousse toutes les limites du burlesque, du trash, du mauvais goût et de l'hilarité en général. Il ne manque qu'un affront à une, ou plusieurs religions, pour que le plaisir soit complet...
Le héros de l'histoire, Roland, est un SDF un peu retardé, mettons un cousin à Bernie, qui trouve (je vous laisse découvrir comment) une panoplie complète de policier. Mais allez expliquer ça à un commissariat quand vous avez une tête de SDF... personne ne vous croira : en cinq minutes il est dehors, panoplie à la main. Alors pourquoi ne pas mettre le costume lui-même, au moins pour bouffer gratos et peut-être pour rigoler un peu ? Les circonstance vont l'amener à renconter une jeune maman, légèrement azimutée mais gentille (c'est pas parce qu'on a des godemichés plein son sac qu'on est forcément une vilaine fille, ça peut aussi être des intruments de travail), à qui ses beaux-parents ne veulent pas rendre sa petite fille. Elle est incarnée par Claude Perron, la même que toujours, et toujours aussi belle quand c'est Dupontel qui la met en scène : il est amoureux, nous aussi.
Ni une ni deux, notre policier amateur - mais téméraire - va donc se lancer dans l'enquête, croiser de puissants requins de la finance, de vrais policiers plutôt impuissants eux, des wagons de SDF à hurler d'horreur et de rire. Tout le film est parcouru de poursuites échevelées, qui posent Albert en digne successeur de Buster Keaton. Entre autre choses, il traverse ainsi assez régulièrement la vitrine d'une épicerie en vol plané, sniffe une colle de très bonne qualité qui fait sortir les gens des publicités, fait du surf sur un bus, se prend une mobylette dans la gueule, s'assomme un nombre incalculable de fois, tire des balles qui ne finissent jamais là où il l'avait prévu...
Certains acteurs et actrices reviennent eux aussi se faire maltraiter assez violemment : Hélène vincent, Roland Bertin (respectivement mutilée et écrasé dans Bernie) en tant que beaux-parents indignes, sont forcément mal partis face à une tel adversaire ! Mais il y a aussi divers anciens Deschiens dont une Yolande Moreau en roue libre, un Bruno Lochet et un Philippe Duquesne au summum de leur forme, et même Terry Gilliam en guest star ! Une musique déjantée, faite de remixes de Noir Désir et d'autres riffs de métal crasseux, achève de donner au tout un côté définitivement destroy. Et pourtant de toute cette noirceur transparaît un amour immense des petites gens, des ratés : les grands et les puissants, affreusement malmenés, ne peuvent trouver la rédemption que ramenés à hauteur de pavé. Voilà qui est en tout cas profondément moral !
Si j'ajoute que Albert Dupontel lui-même nous a avoué à l'avant-première (ah, au fait, je vous ai pas dit : dans la vie il est sympa, drôle, chaleureux et patient), que le film s'était fait avec de grosses difficultés financières (tout le monde a bossé gratos ou presque), il n'est que moral qu'à votre tour vous alliez le soutenir ! Mais alors dinez léger, mettez une ceinture et des bretelles, et même une pile neuve à votre pacemaker : avec Enfermés Déhors vous allez décoller pour une heure trente de montagnes russes émotionnelles, visuelles et zigomatiques que vous n'êtes pas prêts d'oublier !
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Fast Food Nation, un film de Richard Linklater
Fast Food Nation, voilà longtemps que j'ai marqué ça sur un post-it : en bonus sur le DVD de l'excellentissime Supersize Me de Morgan Spurlock, figurait un entretien passionnant avec Eric Schlosser, théoricien et pape de la dénociation de la malbouffe aux USA, et auteur du livre du même titre, dont ce film est adapté. Réalisé par l'hyperactif Richard Linklater, déjà auteur cette année de l'étrange et presque excellent A Scanner Darkly qu'à tort, vous n'êtes sans doute pas allé voir malgré nos conseils...
Sous forme de fiction, on suit ici plusieurs personnages. D'un côté l'enquête un brin timide et auto-censurée d'un cadre de chez Mickey's (une chaîne de fast-food tentaculaire parmi tant d'autres), qui voudrait comprendre comment et pourquoi il y a tant de coliformes fécaux (autrement dit, de merde) dans la viande des burgers ...
D'un autre côté, des immigrants mexicains illégaux, recrutés à l'Universal Meat Packing, entreprise inhumaine d'abattage des bêtes, où ils travaillent dans des conditions de sécurité déplorables. Entre les deux, interventions bien ciblées de guest-stars dans des petits rôles charmants (Bruce Willis en business man cynique, Ethan Hawke en militant cool du slow food, Avril Lavigne en activiste écolo), façon de donner un coup de pouce "politique" à ce film un peu poussif, qui attaque certes pour la première fois la question du fast food sous l'angle social... Car au final, bof bof quand même, ça sent un peu le film de commande.
Certes le film recèle de menus plaisirs : outre les petits rôles précités, on retrouve avec plaisir deux excellents acteurs vus dans Little Miss Sunshine (soit le père et le fils). Et puis on jouit de tirades où l'on traite "les gens de l'UMP" de putains d'enfoirés, menteurs, exploiteurs et autres injures sodomites... plutôt savoureux en France dans le contexte actuel. Disons pour conclure que ce film montre les sous-traitants du rêve américain de la bouffe pas chère. Pour le reste, le vrai film sur l'exploitation sociale des étudiants et jeunes chômeurs en fast food reste à faire. Et en attendant il n'est pas trop tard pour voir ou revoir Supersize Me, qui reste LA référence inégalée sur la mac-gerbe.
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Critique écrite le 19 avril 2008 par Philippe
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