Accueil Chronique album : Casey - Libérez La Bête, par Zeu Western Manooch
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Critique d'album

Casey : "Libérez La Bête"

Casey :

Soul Funk Rap / Rap

Critique écrite le 10 mai 2010 par Zeu Western Manooch

Casey c'est la France. Et si cette affirmation - un tantinet réductrice et provocatrice quand on connait la bête dont nous cause ce disque - si cette phrase, donc, pouvait avoir sa part de vérité ? Imaginez, alors ce que serait notre bonne vieille nation...A la fois bestiale et attachante. Dangereuse et fascinante. Enragée et tellement belle. Pure folie ? Qui sait ?
Des virées dans l'Angle Mort avec Zone Libre et Hamé à son engagement de toujours au sein d'Anfalsh prod., cette tribu de délinquant(e)s perfides, elle est de toutes les luttes, de tous les sauvetages d'un rap hardcore qui n'en a souvent plus que le nom. Poétesse énervée toute l'année, charmeuse de mots, rappeuse incendiaire, elle est sur tous les fronts, surfant sur le temps - plus de dix ans qu'elle roule pour le hip-hop - pour devenir aujourd'hui, elle peut toujours s'en défendre on s'en fout, un des piliers, détentrice d'une part de mémoire, voire de conscience, de l'underground d'ici.
Comme une suite logique, Libérez La Bête prolonge le précédent Tragédie D'une Trajectoire, lui-même déjà un sommet fédérateur après les premiers featurings sur Première Classe et Spécial Homicide. Il n'a pourtant rien à voir avec les décharges brutales entérinées sur ces derniers disques. Désormais la colère se maîtrise, ce qui finit d'accroître sa puissance, son efficience.
Casey laisse les instrus d'Héry & Laloo - minimales et sèches comme des triques - et la prose de quelques invités triés sur le haut du pavé (la Palme à Al, Mc à la plume revêche et animale) démâter l'auditoire et délimiter sa zone d'intervention, avant de venir régler le compte de chacun, et mettre définitivement les poings sur nos vies.
Les mots de Casey sont posés, réfléchis à l'extrême. Elle cogne avec eux, eux cognent pour elle, quand tant d'autres cherchent encore les virgules, perdant leurs temps comme le notre à brailler dans le vide. Et si ceux-là même, dans l'excès de langage, la démesure sclérosent toujours un peu plus le rap et le reste, elle, garde le cap. L'ascèse de la prose, lâchée sur la mesure, restant sa seule et unique arme (son sourire en coin aussi !). Ecoutez Sac de Sucre, vous comprendrez que "le rap d'immigrés" en a fini d'avoir bon dos.
Utilisant avec malice toutes les ficelles du genre comme les joueurs de Gwo Ka font corps avec leurs percus, cette amazone hardcore fait ici ce que peu sont parvenus à faire : transformer chacune de ses compositions en démonstration pugilistique et pédagogique. Frapper et transmettre, voila un extraordinaire credo, non ?
Maîtresse dans le maniement des armes verbales, ce disque en atteste, elle porte en elle à la fois le calme froid et dense de la révolte et la chaleur bouillante d'une intelligence à part, empreinte de justice. Chacune de ses phrases est là pour nous le rappeler.
Révolte...Justice...Les fondations même de la Rage...La sienne, comme était celle de Césaire, capable à tout instant de nous rendre "la foi sauvage des sorciers", pure et incandescente, intacte et inviolable.
Casey, c'est la France...Ah, si seulement...

2010 - Anfalsh Production
https://www.matiere-premiere.org/index.php
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 Critique écrite le 10 mai 2010 par Zeu Western Manooch
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