Accueil Chronique album : Joeystarr - Gare Au Jaguarr, par Philippe
Jeudi 21 novembre 2024 : 6751 concerts, 27228 chroniques de concert, 5420 critiques d'album.

Critique d'album

Joeystarr : "Gare Au Jaguarr"

Joeystarr :

Soul Funk Rap

Critique écrite le 29 octobre 2006 par Philippe

S'il y a bien un mec qui n'attire pas spontanément la sympathie, c'est Joeystarr. Grande et plutôt sale gueule, réputé macho et violent, on reste en plus sur une prestation live désinvolte l'an passé à Marsatac... Le bonhomme semble en roue libre depuis la fin de NTM. Grosse surprise du coup, que ce premier album solo qui s'ouvre par une bombe, J'arrive, claque inaugurale sur riff metal, qui fait déjà regretter d'avoir mis le doigt dans l'engrenage : il ricane, il braille (et chose notable, maintenant on le comprend !), il cogne, ça fait l'effet d'une énorme boule de nerf en liberté, on se sent comme devant un pitbull qui aurait pété sa laisse... Gare au jaguarr ! dit d'ailleurs la reprise misogyne mais marrante de Brassens, que celui-ci aurait probablement apprécié (et qui va valoir à ce disque une interdiction tout à fait débile). Cours, chanson combattante, ajoute toutes les raisons qui font encore courir la bête, et il y en a.
L'Intro du poids lourd comme un champion de boxe se finit dans un silence glaçant : personne n'applaudit, sur ce coup-là Didier Morville se pose comme seul contre tous. Il est là pour régler des comptes, d'abord avec le milieu du rap : sur Bad Boy il s'en prend à Kool Shen (qui semble l'avoir beaucoup déçu), mais aussi à Booba qu'il sample pour se moquer (et qui semble, renseignement pris, être en effet un illustre crétin). Pour finir, coup de boule (mérité) à Jean Gab'1, profiteur sans talent qui "vit dans le colon de Gyneco". Plein la gueule, il en met aussi à la classe politique et à Sarko en particulier sur Hot Hot, appuyé par des Questions intéressantes sur la police, posées par notre célèbre facteur révolutionnaire. Il se moque d'ailleurs aussi de lui-même et déplore dans un beau texte samplant Moustaki, sa propre Gueule de Métèque.
Ayant désormais l'âge du (très) grand frère, il ordonne au plus jeune : Lach'Pose ton Gun sur un rythme archi-dansant, et le conseille ensuite sur Chaque seconde (refrain balourd mais texte très bien écrit, la voix se fait presque touchante) : il ne s'agit plus de foutre le feu, mais de ne pas renoncer, de se bouger (et de commencer par aller voter bien sûr, il fait partie de Devoir de Mémoire)... Tout est dit en une phrase, entre deux aboiements et sur fond de bruit de bottes (Soldats) : 'Ce système pue, adaptez-le'.
Bon il y a quand même toujours chez lui son côté tête brulée, qui s'envoie en l'air à la Cigarette piégée et qui se met la tête dans le Carnaval, titube, traite les hôtesses de boniches et pour finir dégueule partout... on ne se refait pas. Mais l'album est enragé et dansant, politique et hargneux, et c'est une méchante claque : Joeystarr met à l'amende toute la génération de rappeurs-branleurs qui l'a suivi. on sort de l'écoute avec l'impression d'être passé dans une essoreuse mais, dès qu'on a ramassé toutes ses dents dans l'arrière cour, on a comme une envie de remonter directement en piste - la classe.
PS : L'album sera interdit à la vente dès le 6 novembre 2006... alors faites comme lui... Courez !
PS : Je confirme un retour sur scène réussi avec cet album !
(2006)
Vignette Philippe

 Critique écrite le 29 octobre 2006 par Philippe
 Envoyer un message à Philippe