Kim Novak : "Luck & Accident"
Le label bordelais Talitres fait le grand écart en faisant paraître coup sur coup l'album de Thee Stranded Horse (projet solo de Yann Tambour d'Encre dans un registre ethnique et acoustique) et ce premier album de Kim Novak, un album de rock, fier et flamboyant. Quand l'un se tourne vers l'Afrique, les normands affichent une très nette sensibilité anglophone tant dans le fond que dans la forme. Luck & Accident est pétri avec les mêmes ingrédients qui vaut au groupe rock de retrouver le sommet des charts aujourd'hui : un chant sûr et volontiers frondeur, des guitares tranchantes, une rythmique puissante. Kim Novak chasse sur les mêmes terres qu'Interpol, avec une instrumentation similaire et beaucoup d'influences communes (le post-punk et la new-wave des années 80, le Velvet Underground, Joy Division et The Cure). Si le quatuor se perd quelque peu dans des changements de rythme un peu forcé et des breaks trop soulignés en début d'album (les deux premiers morceaux, Better Run et Swallow), rapidement le groupe se montre captivant, plus fin, comme sur Turn A Rabbit, faussement dansant (The Rapture en version mélancolique) et surtout dès lors qu'il se laisse aller à plus de spontanéité. Lost At Play, porté par un piano martelé, dévoile ainsi une structure complexe empreinte d'une émotion qui vire à la colère. Plus loin encore, changement d'orientation avec quelques morceaux dépouillés, chantés d'une voix chaude, profonde et posée évoquant The National ou Tindersticks. Au fil de titres, on se laisse convaincre sans peine par tant de fougue et d'assurance. Il faut un minimum de classe pour assumer un disque comme Luck & Accident (l'exercice casse-gueule If dans un registre bien balayé ces derniers temps) ou ne pas se sentir écrasée sous le poids des références (Female Friends par exemple). Il y a bien sûr nombre de sorties dans ce registre depuis quelques temps, mais peu de la qualité de Luck & Accident.
Critique écrite le 30 avril 2007 par Denis