Accueil Chronique album : Moon Ra - S/T, par Phil2guy
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Critique d'album

Moon Ra : "S/T"

Moon Ra :

Pop - Rock / PsychéKrautStoner

Critique écrite le 23 novembre 2019 par Phil2guy

Quintet phocéen en activité depuis le début de la décennie, Moon Ra sort son second album, cette fois-ci chez The Weird Beard, un label anglais dévolu aux musiques psychédéliques et à ses avatars. Le groupe a soigné son " art work " avec comme pochette la photo en gros plan de la peau d'un pachyderme, et ce disque se trouve d'abord en format vinyle aux couleurs assorties aux tons de la pochette (le label a la particularité d'éditer des vinyles exclusivement en couleurs). S'il n'y a pas de lien réel entre le fond et la forme, cette esthétique soignée est réellement à la hauteur du contenu. Le groupe s'illustre dans un genre instrumental qui mélange habilement space rock, stoner, psyché et krautrock et les structures complexes des morceaux révèlent le goût de ses membres pour le post rock. L'album est constitué de six titres dont un seul dure moins de cinq minutes. Mais si la musique de Moon Ra est exigeante, elle n'en est pas moins très accessible et directe, et peut plaire aussi bien aux amateurs de " classic rock ". Le groupe s'est bien rodé sur les scènes marseillaises et des environs, et a acquis une assurance et une très bonne maîtrise instrumentale nettement perceptibles sur ce disque. Ce second album frappe aussi par la maîtrise du son et la qualité de la production et des compositions. Le premier titre, Spy's Uniform, commence comme le Pink Floyd planant du début des années 70 pour s'achever par des guitares furieuses dignes de Monster Magnet. Le second, Burn in / Burn out, plus apaisé, débute par les arpèges d'une guitare qui se mêlent à un motif de clavier très psyché, traversés par les déflagrations de la seconde guitare, qui envoie des riffs presque noise. Le clavier, très en avant, utilise différentes palettes de sons, comme celui de l'orgue Hammond. Mais aucun instrument ne prend le dessus sur l'autre, il y a une vraie alchimie de groupe, chacun est à sa juste place. On a en plus affaire ici à des musiciens en pleine possession de leurs moyens qui ne tombent jamais dans l'esbrouffe instrumentale ni la démonstration technique. Le troisième titre, Snowpiercer, démarre en trombe comme le meilleur Hawkwind et nous embarque direct dans un trip en direction de Mars pour ensuite nous faire planer dans le vide spatial grâce à une superbe nappe d'orgue et un solo de guitare plaintif et acide. Le groupe excelle dans les montées en puissance suivi d'accalmies où les guitares et le clavier, qui peuvent s'appuyer sur une section rythmique solide et puissante, donnent libre cours à leur sens mélodique. La groupe semble justement accorder une importance particulière aux ambiances et aux mélodies, leur musique est en cela très cinématographique et sollicite l'imagination. La face B s'ouvre sur Alkaid, mon morceau préféré de l'album, porté par une pulsation rythmique implacable et répétitive digne de Neu ! ou Can et un riff de guitare heavy à la Hawkwind (encore eux) sur lesquels le clavier et une seconde guitare très pysché s'entremêlent. Même si les influences du groupe sont très marquées, elles sont bien digérées et les musiciens font preuve de finesse et d'inventivité. Il y a toujours un motif d'orgue ou de guitare qui vient surprendre l'auditeur. Le groupe a réellement travaillé les arrangements sans rien perdre de sa spontanéité. Dead Mustaine (un hommage au chanteur pas encore mort de Megadeth?) est sans doute le titre le plus direct et rentre dedans de l'album et sonne comme du stoner rock dégraissé, avec un superbe break qui me rappelle les moments les plus déjantés de King Crimson. Le dernier titre Remontada démarre de manière très calme avec des roulements de batteries tribaux et un son d'orgue qui évoque celui des Doors et s'achève de manière frénétique par un motif répétitif joué " ad lib " à la manière des japonais de Acid Mother Temple. Cet album, réellement abouti, est donc une vraie réussite. Il révèle toutes ses richesses au fur et à mesure des écoutes et ne présente aucun moment faible. On a affaire ici à un groupe d'une grande inventivité et d'une grande musicalité. Ceux qui ont pu voir et apprécier Moon Ra sur scène pourront constater que toutes les qualités du groupe se retrouvent sur ce disque et on espère qu'il rencontrera ainsi une audience plus large et amplement méritée auprès de tous les amateurs de " spacestonerpyschékraut" et des autres.

2019 (The Weird Beard)

 Critique écrite le 23 novembre 2019 par Phil2guy
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