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Chronique de Concert

Alain Bashung

Alain Bashung en concert

Fiesta des suds Marseille 28 octobre 2008

Critique écrite le par

(1/3, version enthousiaste sans retenue :) Aller voir Alain Bashung sur scène en 2008 impose à chaque spectateur une question éthique : vais-je au concert pour entendre l'un des artistes français majeurs des 30 dernières années qui vient de sortir un bleu pétrole de toute beauté où vais-je voir Alain Bashung parce que c'est peut-être la dernière fois qu'on le peut voir sur scène ? On sait l'homme attaqué par un cancer, on sait l'homme diminué par une chimio qui lui a fait perdre cheveux et kilos, et pourtant l'Alsacien assure tous les deux soirs depuis un mois des concerts qui durent au minimum 2 heures.

Quelques jours avant son passage à la Fiesta des Suds, des rumeurs couraient donc la ville jusqu'au bureau de l'AFP qui prédisait l'annulation du concert. Mais les Cassandre ont beaucoup trop de travail en ce moment avec les marchés financiers. Et ce 28 octobre, à 20H50, l'homme était bien là sur la scène de la passerelle, devant 5 000 spectateurs pour envoûter son monde de sa voix magnétique et ses poèmes chevauchant les portées.


"Je vous souhaite un bon voyage et une température clémente". C'est par ces mots qu'il entame son concert, clin d'œil au temps pluvieux et frisquet qui règne sur Marseille ce soir. En pantalon et redingote noire sur une chemise blanche ouverte avec une écharpe noire qui lui protège le cou, la guitare noire en bandoulière, il entame seul Comme un lego, la chanson que Gérard Manset lui a composé pour son dernier album. Et si l'homme semble effectivement diminué, puisqu'un roadie est venu lui mettre la guitare et qu'il est assit sur un tabouret pendant le morceau, il reste la magie de la voix.

La voix d'Alain Bashung, reconnaissable entre toutes par son timbre nasillard et ses envolées métalliques, emporte déjà tout sur son passage. Ses musiciens, batterie, bassiste, guitariste et violoncellistes sont bien sagement installés derrière lui, entrent progressivement en scène. Tout le monde semble attentif à créer autour du chanteur un environnement protecteur. Les organisateurs de La Fiesta, qui savent si bien mettre les petits plats dans les grands pour certains, ont même installé un gros tuyau sur le côté droit de la scène pour lui envoyer un peu d'air chaud.

"Je vais vous faire des chansons que vous connaissez et puis vous faire découvrir quelques nouvelles", lancent-ils avant d'attaquer Je t'ai manqué. C'est vrai qu'il nous a manqué son Imprudence dont il était venu défendre les grands espaces à la fiesta en 2003. Mais de là à imaginer qu'il allait nous faire découvrir les morceaux de Bleu Pétrole, c'est mal nous connaître.


Sur Hier à Soussse, troisième titre du dernier album, le tabouret disparaît et Bashung chante debout et les premiers grands frissons parcourent le public. Il se tient légèrement en arrière, les épaules entrées et fait parler ses mains devant lui. On a peur qu'il perde l'équilibre quand il bouge un peu tant sa démarche semble mal assurée. Il titube encore plus sur l'impeccable Volontaire qui nous met un premier coup de poing au ventre. Il joue de l'harmonica de façon assez approximative et sa voix se casse quand il essaye de la pousser. Là, on se dit qu'on est en train de voir Saint Sébastien sur scène. Mais s'il tangue autour du micro, il tient quand même la barre et se reprend un peu sur Mes prisons. Sans instrument entre les mains, Bashung adopte un peu des attitudes de Gainsbourg sur scène, mains relâchées qu'il laisse exprimer tout ce que ses chansons racontent.

Sur le morceau suivant, Samuel Hall, le traitement nettement plus rock que la version de l'album fait encore monter la température. Là seulement, on prend conscience qu'il n'y a pas de clavier sur scène, que toutes les parties sont assurés en alternance par le guitariste et le violoncelliste, vraiment excellent. Si ce choix se révèle judicieux sur Vénus, le morceau suivant, avec le banjo qui s'appuie sur la contrebasse et le violoncelle jouées pincés, ce ne sera pas vraiment une réussite sur Je tuerai la pianiste, qui est massacrée par un traitement rythmique trop rapide. Entre deux, le public atteindra un premier climax sur La nuit je mens, magnifiée par la folk 12 cordes qui apporte l'emphase nécessaire.

Entre chaque morceau, Alain Bashung se recule de quelques pas et salue le public, la main sur le cœur, exactement comme le faisait cet été Léonard Cohen durant ses concerts. Manifestement, ça lui fait du bien d'être sur scène. D'ailleurs, malgré une goutte au nez certainement attrapée en arrivant dans la cité phocéenne dans la journée, il semble aller de mieux en mieux. Sur Légère éclaircie, Bashung se tient d'un coup les jambes écartées, il empoigne le micro comme s'il voulait le dompter, il retrouve ses poses de rocker. Et ma foi, ça a beaucoup de gueule.


S'en suit Mes Bras, le seul morceau de l'album Imprudence qu'il jouera ce soir. L'orage électrique est passée, le tabouret revient et il entame, à l'harmonica A perte de vue. Il enchaîne avec Happe, puis se retrouve à nouveau debout à la guitare sur Caravane. Trois morceaux tranquilles qui font un peu redescendre la température.

Puis, pour la seconde fois du concert, il s'adresse au public en lui expliquant "qu'il y a un morceau, dans ce film, Macadam Cowboy, qui me turlupine depuis longtemps. J'aimerais bien vous le faire ce soir." Je pense qu'il s'agit d'Everybody's talkin, mais je n'en suis pas sûr (quelqu'un pourra peut-être apporter des précisions). A la fin de la chanson il avance que "d'autres on aussi appris la musique avec ça". Et il reprend le premier couplet de Blowin'in the wind de Dylan puis enchaîne, souriant avec Osez Joséphine. L'autre grand moment de ce concert sera le morceau suivant, l'impressionnant Fantaisie militaire.


1h20 de concert et c'est déjà l'heure du rappel. Le public, chauffé à blanc, applaudit, hurle et tout ce bruit se démultiplie contre la passerelle autoroutière au-dessus de nos têtes. Le groupe remonte rapidement sur scène avec l'intro de Madame rêve. Bashung revient, tout sourire. A la fin du morceau, il prend sa guitare et parle à nouveau "Voilà un mi. On peut faire une carrière entière sur une seule note. Mais au bout de 40 ans, c'est bien d'en trouver une seconde". Sur ce, il entame Vertige de l'amour avant de conclure sur Malaxe. Avant de quitter la scène, il n'a plus besoin de personne pour enlever sa guitare.

Le public applaudit à tout rompre au point qu'il revient pour un second rappel. Il remercie encore une fois la foule et joue, seul à la guitare, le poignant Angora. Il conclut son concert démarré 2 heures plus tôt avec Nights in white satin des Moddy blues.


Voilà Bashung n'est pas mort, merci pour lui. Il faut absolument aller le voir sur scène pour deux raisons essentielles : aucun artiste français ne lui arrive à l'ongle du petit orteil et les concerts qu'ils donnent sont peut-être même la meilleure thérapie qu'il peut suivre pour lutter contre la maladie.

Photos par Pirlouiiiit

> Réponse le 29 octobre 2008, par Julien 13RU

Excellente chronique mon cher!! Je redécouvre une deuxième fois cet artiste que je ne connaissais guère... Merci!  Réagir

> Réponse le 29 octobre 2008, par cabask

Très bon compte rendu de concert. Je me suis aussi régalé. Je l'ai trouvé impeccable du début jusqu'à la fin, même si effectivement on pouvait craindre le pire à son arrivée sur scène. Il est vraiment à part.  Réagir

> Réponse le 29 octobre 2008, par gwenn

Juste la Grande classe Mr BASHUNG, magnifique concert, inoubliable. MAGIQUE, émouvant, j'en ai encore les larmes aux yeux ce matin. MERCI  Réagir

> Réponse le 29 octobre 2008, par sushi13

concert intense et magique de Mr Bashung et ses musiciens excellents , arrangements des chansons excellents : ceux qui ne l'ont pas vu courez le voir!!  Réagir

> Réponse le 29 octobre 2008, par ChloroPhil

Chronique qui, de plus, donne encore plus (était ce possible ?) envie d'aller le revoir sur scène !   Réagir

> Réponse le 30 octobre 2008, par The dude

Bravo pour ta chronique rigoureuse de cette soirée. Simplement tu ne parles pas des deux autres groupes Rimbaud et Mi. Tu les as vu? Qu'en as tu pensé? Perso, j'ai écouté le cd de Rimbaud à la FNAC dernièrement et j'ai bien accroché. J'aimerai bien savoir si ça vaut le coup sur scène.   Réagir

> Réponse le 30 octobre 2008, par Anne

Il fait certes froid et quelques gouttes perlent du ciel. Qui sait si ce n'est pas un message d'émotions ? De toute façon, on s'en fout du temps qu'il fait. Il est entré sur scène. Je me suis laissé happée, à la première seconde. Deux jours plus tard, je suis toujours ailleurs. Pas prête de revenir sur terre ... Un moment avec lui, éphémère et provisoire ? Pas certain . Il était magnifique, comme toujours . Merci M. Bashung  Réagir

> Réponse le 01 novembre 2008, par Kaïros

Bon je retente ma chance mes propos ayant sans doute été oubliés... pour ne pas dire censurés...?? A la question que valaient Rimbaud et Mi je répond que pour le premier cela ressemblait à du mauvais Dominique A, même intonation de voix (en faux), même phrasé, bref une découverte pour ceux qui ont une culture musicale plus que réduite, mais vu le public bavard de Bashung, cela ne m'étonne guère. La palme revient aux projections de son voyage en Sibérie imaginaire (vrai fausse bonne idée...lol) avec un esthétique assez moche. Mi en revanche m'a semblé beaucoup plus intéressante, avec des textes bien écrits, de bons arrangements (piano violons), à mon avis elle va aller loin.   Réagir


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