Chronique de Concert
AC/DC (feat. Axl Rose) + The Limiñanas
Le programme de cette soirée m'avait d'abord jeté dans les affres. A ma gauche, AC/DC déjà vu 3 fois mais repassant à 3 km à vol d'oiseau de chez moi - par définition immanquable donc. A condition bien sûr de se placer enfin tout devant (histoire de ne pas revoir des Playmobil dans un lavabo pour la 4ième fois), dans un Stade Vélodrôme rénové, payé de nos impôts (et pour des années !) mais pas encore revisité (puisque depuis sa réouverture, on y élève des chèvres) : billet acheté il y a au moins 6 mois ! A ma droite, The Limiñanas, l'un des tous meilleurs groupes de rock en activité en France, qui s'annonce au Poste à Galène il y a 3 semaines... le même putain de soir, à la même putain d'heure. Rhaaaââârgl, les c...! Dans pareil cas, ne peut s'appliquer que la technique Pirlouiiiit, autrement appelé le dédoublement véloporté !
Alors certes quand on a déjà vu un groupe dans le même stade avant travaux (... ma chronique de référence sur ce groupe, incluant un tutoriel gratuit et parfois bien pratique), et aussi sur la même tournée en 2015 (autre chronique où les photos de Manu Wino sont d'un tout autre niveau...), c'est un peu du vice : le plus raisonnable aurait bien sûr été de choisir (donc de renoncer) et de revendre cette place fort dispendieuse ! Mais le problème c'est que Brian Johnson étant Out of Office, les Australiens n'ont pas eu d'idée plus folle que de recruter Axl Rose...
Axel-putain-de-Rose ! L'idole de mon adolescence, mon premier grand amour en hard rock, pas revu sur scène depuis mes 18 ans. Dont acte, du coup, bim, immanquable derechef, j'y vais ! J'ai commencé par me garer scientifiquement vers 20 h 30 au plus près de la porte 7A qui mène à la "Pelouse Or" (en fait le Plastique Or mais chut, on paye 90 euros pour y poser le pied). Curieusement le stade ainsi couvert me semble presque avoir rétréci... Le site du producteur GDP étant au moins fiable sur la question, c'est à 20 h 45 pétantes, ouf, que la météorite AC/DC vient se crasher sur terre sur son écran haut de 5 étages. voilà qui m'ouvre des perspectives - je me suis fixé 3 chansons max !
Rock or Bust, et non pas rock or rust (alors que le décor en tôle ondulée commence à rouiller sérieusement) : le son est putain d'énorme à dix mètres de la scène tout devant, où c'est le barnum habituel. Avec un Angus Young définitivement imputrescible, qui duckwalke directement et cabotine à mort dans sa flanelle bleue, les autres rescapés ou nouveaux ou anciens revenus, qui font comme toujours de la figuration flegmatique... Et Axl Rose, toujours blessé au pied, qui arrive bien tanqué sur une chaise roulante, posé sur son bide et sur au moins 4 mentons. Vocalement il n'a pas pris une ride (facialement non plus, merci Dr Botox !), il est de bonne humeur et il s'avère qu'il est parfaitement qualifié pour reprendre la puissante Shoot to Thrill et la toujours huge Hell ain't no bad place to be ...
Cerise sur le gateau, me sachant attendu ailleurs, ils "terminent" pour moi par la toujours totalement jouissive Back in Black. Merci les gars ! Quoi qu'il en soit le fan standard d'AC/DC, jumpant sur son plastique d'or, a déjà presque oublié ce deuxième changement de chanteur, puisqu'il se prend quasiment le même show que d'habitude dans la vue et surtout dans les oreilles. Pour deux heures encore, il a rajeuni de 30 ans, avec ses cornes lumineuses, sa bière probablement sans alcool mais servie dans un beau gobelet siglé, son T-shirt tout neuf du groupe (certes le fan d'AC/DC méconnaît très largement la règle numéro 1 du snobisme rock : "le T-shirt du groupe du jour, jamais ne porteras !"), et il est prêt à s'égosiller une énième fois (on ose même plus dire une dernière fois ?) au son d'un set-list immuable à 92 % depuis Donington...
Tout comme ce groupe de bric et de broc, un peu pantelant quand même et bientôt gériatrique (pulsions violentes, démence, surdité, os poreux... c'est un vrai catalogue !), que le fan s'obstine encore à aller revoir (la seule façon de maintenir en vie un Angus qui ne manquera hélas pas de mourir d'ennui, le jour-même où leur neverending tour s'arrêtera pour de bon), ce fan m'inspire une fois encore moquerie et sympathie mêlées - après tout je suis bien re-re-revenu moi aussi ! Je le quitte donc sans plaisir (serais bien resté, en fait...) mais sans frustration non plus, certain que j'en ai vu assez pour cerner a peu près le truc et surtout, bien content d'avoir revu l'idole des white trash ! Décision est prise, où Axl et Slash iront reformer les Guns'n'Roses en France, j'irai, et je suis sûr de trouver deux ou trois crétins irrécupérables dans mes amis pour m'accompagner !
[Parti à 21 h 05 de devant la scène, je réalise ensuite une traversée de ville à tombeau ouvert sur ce bon vieux Couguar (Teisseire-Rabatau-Passerelle Vélosuicidaire-Jean Moulin-Timone-Baille-Vertus-Vitalis-Ferrari), établissant je pense un possible temps de référence en arrivant à 21 h 22 devant le Poste à Galène, à peu près dans le même état que Mad Max à la fin de sa Fury Road... Petit coup de pouce du destin, l'entrée dans la salle a pris un peu de retard et je ne manquerai finalement que le premier morceau du groupe !]
Et donc, enfin, The Limiñanas, dont les très beaux albums (Costa Blanca étant mon préféré) sidèrent nos platines depuis des années, repassent enfin à Marseille pour les défendre ! On entre dans un Poste rempli ras-de-la-gueule, sur le tempo chaloupé de Down Underground, ayant juste le temps d'attraper un rafraichissement avant que le concert devienne totalement limiñanadélique (et hop, Prisunic !). Le gang de 6 musicien.ne.s, sans Pascal Comelade (mais avec un sosie assez convaincant), est globalement assez mutique (à l'exception des filles, absolument charmantes et définitivement souriantes toutes les deux), et produit comme on l'espérait un son rond et enveloppant, sixties gorgé de fuzz et d'orgue soyeux, qui fera chalouper toute son audience de la première à la dernière note.
Petit point décevant tout de même, il semble rapidement évident que toutes les chansons impliquant un chant mâle trop en avant, ou un dialogue inter-sexe, ont été écartées de la setlist (ces messieurs étant hors de voix, peut-être ?), et ce sans explication : le groupe ne parle pas, il enchaîne ! Evidemment ça n'empêche pas d'avoir la superbe Liverpool bien sûr, et donc de décoller avec eux en classe affaire, mais ça écarte d'entrée tous les morceaux marrants (et parmi leurs meilleurs selon moi), allant de numéros de drague foireuse ("Ah ta gueule, blaireau !") aux name-droppings effrénés ("Kim Fowley, Bernard Blier..."). Du coup, l'impression ne me quittera pas que le groupe ne joue qu'à 80 % des possibilités de son répertoire, dont l'humour est pourtant une des premières choses qui m'avait séduit !
Dommage mais enfin, parti pris respectable par ailleurs bien sûr. Sinon à nous faire rire, le groupe parviendra néanmoins sans difficulté à nous faire frétiller de joie, en ressortant de vieux titres ultra-efficaces de ses tiroirs déjà bien garnis, comme Salvation ou Funeral Baby, où l'électricité devient palpable dans l'air moite - on note que M. Limiñana se garde malicieusement les notes les plus jouissives des morceaux (hé, c'est les siens, il a bien le droit non ?!), de celles que le public se joue en air guitar. Crank sonne comme du Sonics avec des filles (c'est super !), Green Fuzz comme du Cramps perpignanais (c'est sympa !), tandis que Garden of Love résonne comme un titre dont la guest star manquerait quand même cruellement (ce qui le fait un peu moins).
Mais la plupart des morceaux choisis fonctionne vraiment très bien, qu'ils soient down tempo (El Beach ou Zippo, ou AF 3458 et sa guitare minuscule), ou plus en mode cavalcade, comme la jolie (et oubliée) Betty & Johnny, au final diaboliquement vrillant pour le cerveau. Ainsi que la très efficace Dahlia Rouge, titre magnifiquement joué et qui me fait planer possiblement aussi haut que Higway to Hell, là-bas à l'autre bout de la ville... Le groupe quitte hélas un peu vite la scène, pour y revenir 3 fois sur de jolis (mais mono-morceau) rappels, réclamés à juste titre par une audience aussi frustrée que chauffée à blanc.
Toujours en mode "no explain, no complain,", The Limiñanas ne cède néanmoins rien sur son programme (même pas pour un Tigre du Bengale réclamé avec virulence par une gent féminine très en voix), et nous quitte sur son super One of us au riff stoogien, sans jamais vraiment nous avoir parlé. Pour la musique choisie et jouée, super job, mais nommer un ou une chargé.e de communication avec le public ne serait pas du luxe ! On repart néanmoins contents et charmés de ce concert, qui a eu le mérite de générer suffisamment de plaisir et de frustration mêlés, pour avoir envie de les revoir rapidement sur une prochaine tournée... un peu plus détendue, peut-être ?
Car c'est tout de même étonnant au final, en conclusion d'une soirée pour le moins dépaysante et variée pour moi, de constater qu'une star caractérielle doublée d'un connard notoire comme Axl Rose, s'avère finalement plus enjoué et blablateuse on stage, qu'un couple à l'évidence aussi simple et sympathique que les deux Limiñanas (je repars tout de même avec une setlist gentiment dédicacée !). Encore une preuve que le live restera toujours le complément indispensable à l'écoute des disques, pour appréhender complètement une oeuvre, et une personnalité artistique...
Photos : DIY bien sûr, désolé ! Impossible de s'approcher davantage, ni au Stade ni au Poste !
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Setlist (ramassée - rappels approximatifs)
Malamore
Down Underground
Prisunic
Liverpool
Russian roulette
Salvation
Funeral Baby
Crank
El Beach
AF 3458
Green Fuzz
Stella Star
Garden of Love
Dahlia Rouge
ZIppo
Betty & Johnny
Rappel --------
Suicide
Rappel --------
Migas 2000
I'm Dead
Rappel --------
One of Us
Je m'en vais
Critique écrite le 16 mai 2016 par Philippe
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