Chronique de Concert
Alain Souchon et Laurent Voulzy
Alors qu'ils collaborent ensemble depuis près de 40 ans, Souchon et Voulzy n'avaient jamais tourné ensemble. C'est donc à 71 ans pour l'un et 66 ans pour l'autre, que ces deux teenagers romantiques attardés ont enfin décidé de passer le cap pour le plus grand bonheur de leurs fans. Ce cap a été franchi dans un premier temps avec la parution d'un album commun, dans lequel on retrouve tout ce que l'on aime chez eux : des mélodies, des harmonies et des paroles simples, pleine de sensibilité.
Mais l'album n'était qu'un prétexte pour aller défendre leur répertoire sur scène. C'est d'ailleurs sur scène qu'on prend réellement conscience de l'importance et de la portée de leur association. Ces deux mecs sont une telle usine à tubes, que les deux heures trente d'un concert en mode Best of n'auront pas suffi à contenter les fans. En effet nombre de titres pourtant iconiques de leur collaboration n'auront pas été joué (quand je serai KO, un baiser, je veux du cuir, l'amour à la machine, sous les jupes des filles, rive gauche, la vie ne vaut rien, c'était menti ... Pourtant on ne peut pas dire qu'ils aient donné un concert à l'économie. Il était tout le contraire ... N'étant pas un adepte, loin s'en faut, des concerts de variétés, j'étais tout de même assez méfiant malgré le capital sympathie que m'évoque nt le duo et son répertoire...
Si l'entrée sur scènes de nos deux seniors à l'allure de lycéens s'est faite tout simplement avec une guitare et 2 voix sur j'ai 10 ans, la première partie du concert était un condensé de ce que je craignais trouvé à ce concert : Une orchestration variétoche, synthétisée, ponctuée d'applaudissements rythmé en mode public de Michel Drucker. Pire," Bubble star", "jamais content" et le très dispensable "caché derrière" était aussi vocalement très approximatifs....
Puis, heureusement, lorsqu'ils délaissèrent les artifices dégoulinants de l'orchestration variétoche pour revenir à des accompagnements presque umplugged, la magie se mit cette fois à opérer. Avec son allure d'ado frisé dégingandé, Alain Souchon a retrouvé la douceur de sa voix. Celle-ci a alors commencé à se marier comme on ne l'espérait presque plus avec le sucre parfumé à la cannelle de celle de Laurent Voulzy ; nous faisant ainsi oublier l'improbable tenue vestimentaire que l'homme à lunette a l'habitude de vêtir... ( jean basket avec redingote 18ème siècle pourpre vif : un délire d'ado ...)
Lorsqu'on écoute "et si ya plus personne", le nouveau titre "oiseau malin", "la fille d'avril" ou "Summerset maugham", on ne peut que se rendre compte de la singularité de l'écriture d'Alain Souchon. Avec des mots simples, des phrases courtes et des jeux de mots emplis de douceur et d'une nostalgie fantasmée, les chansons de Souchon charment tout le monde. Si l'on retrouve un peu de Trénet dans son style, il est résolument plus moderne et porté par des orchestrations pop d'inspirations sixties anglaises avec des harmonies héritées des Beach Boys ou de Simon and Garfunkel. A vrai dire, les chansons de Voulzy et Souchon n'appartiennent qu'à eux. Elle ne peuvent être chantées que par eux pour avoir du sens. Imaginez un instant Florent Pagny chanter "Belle ile en mer" ou Johnny Hallyday s'attaquer à "Oiseau Malin"...
Pourtant, même quand ils s'attaquent à un registre un peu plus grave comme "C'est déjà ca", ou la "ballade de Jim", leurs chansons conservent cette douceur en y joignant juste une pointe d'amertume qui cristallise leur propos. La complicité et la complémentarité des deux maîtres de cérémonie correspond lui aussi à l'ADN de leur chansons. On sent entre eux une vraie tendresse, et une osmose assez incroyable. Elle se traduira pendant le concert par des interludes foncièrement sympathiques entre les chansons.
Le concert se conclura par un final que tout le public espérait : Belle ile en mer, Rockcollection, Le soleil donne, Foule sentimentale, Jeanne, Le bagad de lann bihoué, Derrière les mots ...
C'est au final un très beau voyage, bucolique, sympathique et rempli d'amitié et d'harmonie vocale et de mélodies légère et séduisantes auquel nous avons eu la chance d'assister. On quitte la salle en ayant envie de lézarder dans un hamac, bercé par le bruit des vagues de la mer, en regardant passer de jolies jeunes filles dans des robes estivales, avec un verre de grenadine à portée de main. On a tout tout oublié des approximations du début du concert, qui étaient probablement plus symptomatiques du rodage d'un début de tournée que d'une réelle faille dans la prestation de ces deux gamins sexagénaires...
Critique écrite le 06 mai 2015 par lol
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