Chronique de Concert
Andrew Sudhibhasilp & Christophe Leloil
Cela fait déjà une semaine que j'ai assisté à ce concert... Comme d'habitude je me suis dépêché de mettre les photos et vidéos en ligne pour que les habitués du Roll's comme Anna qui n'ont pas pu venir en profitent un tout petit peu à distance, mais comme je savais que je n'allais pas voir de concert avant un moment car trop de boulot je me suis dit que j'avais le temps. Le temps et quelques notes bien maigres, juste de quoi donner un peu plus de corps à ma chronique que "je n'y connais toujours rien au jazz mais qu'est-ce que c'était bien".
J'ai déjà dû décrire la sensation étrange qui m'envahit à chaque fois que je m'approche du Roll'Studio le samedi soir à cette heure où le panier s'est vidé de ses touristes de la journée et où les habitants commencent à préparer leur diner (en tout cas c'est ce que j'imagine) derrière les volets ou rideaux à moitié fermés. Comme d'habitude je suis à la bourre pour le début du concert donc je monte les marches à toute vitesse et redescends le petit bout de la rue des Muettes. Devant un couple qui a l'air d'hésiter devant la porte (pas d'argent liquide ni chèque peut être ? ou alors peut être l'envie d'en profiter depuis l'extérieur puisque ça joue portes ouvertes).
On y entend en effet assez bien la trompette de Christophe Leloil et la guitare de Andrew Sudhibhasilp... Après avoir salué le plus silencieusement possible mais néanmoins comme il se doit Claude, j'arrive en haut des 3 marches qui relient le bar à la salle et constate qu'une bonne partie des sièges a été enlevé (distanciation oblige). Moins de monde, plus d'espace et la conscience d'être encore plus chanceux voire privilégié que d'habitude.
Le public silencieux n'en perd pas une miette, certains immortalisent les morceaux sur leur téléphone. La proximité est telle qu'on peut même se payer le luxe une fois le morceau fini de demander à Christophe quel est le nom du morceau qu'ils viennent de jouer... Celui-ci sera Something tells me de Jane Hall qui figure sur l'album These Rooms de son Jim Hall de mari. C'est aussi cela qui est agréable dans ces concerts (de jazz) c'est que bien souvent lorsque les artistes en reprennent d'autres ils n'hésitent pas à nous a raconter un peu plus sur leurs vies (et on se rend compte à quel point ils les aiment / respectent).
Bien sûr, comme là c'est Christophe celui-ci ne peut s'empêcher d'agrémenter cette petite leçon, de plaisanteries (citant Carla Bruni en raison de son Quelqu'un m'a dit). Et de préciser que (après cela) "le reste sera moins beau". Le reste ce sera ce morceau (dont je n'ai pas noté le titre mais peut-être enregistré un bout - Porte A ?) écrit pour une copine (présente dans la salle)...
Ou encore cet autre morceau un peu technique sur lequel un de ses élèves (présent dans la salle) a pas mal bossé récemment. A ses côtés, masqué et assis, Andrew, forcément plus discret, l'accompagne avec délicatesse et ce son électrique si caractéristique. Sur les passages où il joue seul (j'utilise cette formulation pour ne pas avoir à trancher entre "solos" et "soli") Christophe l'écoute souvent les yeux fermés...
Le dernier morceau de ce premier set sera Red Note, un morceau qu'ils ont joué récemment à la Villa Gaby en compagnie de Pierre Fenichel à la contrebasse, Cédrick Bec à la batterie à l'invitation du Jazz des 5 Continents. L'occasion de louer le talent de "Mme Andrew" Julia Minkin qui chantait sur ce morceau dont elle a écrit un texte sombre collant bien à la musique (red note faisant référence au signal lumineux du téléphone portable).
Je ne sais pas si comme Christophe je pourrais me permettre de dire que Julia est "une chanteuse qui se déguste" mais effectivement pour l'avoir vu ici même au sein de Bögö (hey Fred, Julia, Fabien, Patrick, Aurelie, vous attendez quoi pour sortir le disque ?) je suis absolument envouté par son chant. Je ne sais plus si c'est sur ce morceau mais nous aurons le droit à une intro percussive plus que sympathique !
Red Note directement enchainé avec Chemical (on reste dans le thème de l'angoisse) sur lesquels ils ne peuvent se retenir de secouer leurs têtes... En écoutant ce dernier morceau (je sais que je vais m'échapper à la pause), je réalise que mon petit coup de blues de la journée (changement de saison, beaucoup de boulot, plus la possibilité d'aller à autant de concerts que cela, ...) a disparu. Je suis comme régénéré comme à chaque fois que je passe par cet endroit indispensable à Marseille, surtout en ces temps où il devient si difficile pour le public de voir des groupes et plus grave, pour les artistes de se produire ainsi.
Je me sens bien mais c'est un plaisir que je ressens comme coupable puisque les miens sont à la maison, aussi c'est pour cela que je décide de rentrer pour les rejoindre pour le diner et partager avec eux mon enthousiasme, en espérant rester plus longtemps la prochaine fois, mais avec eux. Sur le chemin du retour, je pense à ce concert dont Claude m'a parlé au Torusky à la fin du mois, je croise les chats du Panier, je passe devant les restaurants et bars du Vieux Port, je remonte la Canebière, me retrouve sur la Plaine. Le dernier lieu que je croise est, comme souvent, le Baraki où ça joue aussi. Bonne ambiance entre habitués ... je ne m'arrête pas. Je suis chez moi.
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Critique écrite le 17 octobre 2020 par Pirlouiiiit
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