Chronique de Concert
Benjamin Clementine
En cette belle soirée d'hiver, il règne dans la salle du Moulin (Marseille) une atmosphère tamisée et dépouillée. Un piano, une chaise et l'attente d'un auteur-compositeur-interprète qui depuis quelques mois déjà a bouleversé des dizaines de milliers d'amateurs de musique. Des radios et festivals en passant par ces grands couturiers qui diffusent ses compositions lors de leurs défilés, des maisons de disques aux Francofolies et Victoire de la musique qu'il a remportée en ce début d'année, les concerts de la tournée actuelle de Benjamin Clementine affichent pour la plupart déjà complets. Marseille n'échappe pas à la loi du genre et ce soir, la salle est bondée.
Le calme de l'attente et en même temps cette sensation palpable, le désir d'écouter un artiste dont la destinée l'a fait émerger, tout comme son homologue Keziah Jones bien des années auparavant, d'un couloir de métro au studio d'enregistrement qui a vu naître en 2013 le morceau Cornerstone.
21 heures. Benjamin se présente à son public qui déjà l'acclame avec toute la chaleur possible. Pieds nus, il avance vers la lumière et salue. Applaudissements en rafale puis le silence se pose et le concert débute.
Un homme, un piano et déjà les notes de Condolence, morceau reconnaissable entre tous, puis la voix grave, émouvante qui jaillit et inonde la salle.
Beaucoup d'émotions, difficile avec mes pauvres mots de vous expliquer que ce soir, ma gorge se noue comme jamais ce ne fut le cas auparavant et que sur ce morceau, mes yeux se sont embués de larmes.
L'évocation par l'Artiste de certains passages douloureux de son errance dans Paris transpire dans sa musique.
Je pense que nous sommes nombreux à éprouver ce vertige musical. Je frissonne. Oui, je suis sensée vous écrire une chronique mais cet homme là, avec sa dignité magistrale, sa force implacable, son tempérament déterminé, et sa sensibilité hors du commun ne laisse personne indifférent. Comment vous "écrire" ce talent immense ? Comment ne pas évoquer ses propres mots ?
"I, Benjamin, I was born, so that i become someone one day".
Oui Benjamin, nous avons tous été emportés ce soir là par ton incroyable sensibilité et ta voix puissante. La vie ne t'a pas épargné, tu l'évoques si bien lorsque tu tentes de nous expliquer en anglais le tout premier des morceaux que tu as composés lorsque tu survivais à Paris. Mais tu t'arrêtes net, tes yeux se baissent dans une extrême humilité. La pudeur qui te caractérise et tes mots qui se perdent déjà. Le silence s'installe dans cette salle intimiste. Tu finis par un "anyways" qui signifie tant pour toi. "What i have done wrong ? I am alone in a box of stone".
Les notes Cornerstone que tu attaques avec une noirceur mêlées d'espoir s'envolent et nous atteignent en plein cur. KO debout.
Benjamin Clementine a construit son univers, un cocktail improbable entre Screamin'Jay Hawkins, Bill Withers, Antony Hegarty (surtout lorsqu'il monte dans les aigus qu'il maîtrise aussi bien que les tessitures les plus graves). Non en fait en y réfléchissant surtout pas de comparaison. Car Benjamin Clementine possède un monde à part qui n'appartient qu'à lui.
Le piano s'accorde avec un second instrument venu subtilement le caresser : le violoncelle. Discret et tout en douceur et légèreté, l'harmonie des deux instruments liés à celle de la voix de l'Artiste s'étendant à l'infinie, teintée de sonorités aussi riches que variées émerveillent le public.
En cette soirée, Benjamin Clementine nous a "emmené au pays des merveilles",
"Prenant la route qui mène
A mes rêves d'enfant
Sur des îles lointaines
Où rien n'est important
Que de vivre
...Je fuirai là laissant mon passé
Sans aucun remords
Sans bagage et le cur libéré
En chantant très fort"
C'est dans un français parfois tout aussi approximatif qu'émouvant que l'Artiste interprètera en toute fin de concert ce joli morceau d'Aznavour. Cette cover interprétée par l'Artiste avec délicatesse et tendresse laissera ce soir là flotter comme un délicat parfum de nostalgie. Nous en reprendrons le refrain d'un seul corps, il demandera d'éteindre les lumières de la scène et d'allumer celle de la salle pour mieux savourer ce spectacle étonnant. Et joignant ses mains en prière, il nous contemplera de longs instants, sans un mot, avec joie et étonnement mêlés.
De l'ombre à la lumière ...
Critique écrite le 12 mars 2015 par Calie-cotto
Envoyer un message à Calie-cotto
Voir toutes les critiques de concerts rédigées par Calie-cotto
> Réponse le 20 mars 2015, par Sandrael
[Le Moulin Marseille - 10 mars 2015 ] Et bien moi, je ne sais pas si c'est l'éloignement qui a voulu ça (j'étais assise en haut ), mais je suis mitigée... Il aura fallu 4 chansons avant d'obtenir un bon résultat sur le son (notamment les graves du violoncelle qui vibraient beaucoup) et ça a bouffé le tiers du set (10 chansons + 2), dont 2 chansons sublissimes. Soulignons la performance de la violoncelliste Barbara sur Adios, juste magnifique. Benji, je suis fan depuis 2 ans et là je suis restée un peu sur ma faim (trop d'attentes? ) même s'il m'a mis les poils par moments... Un set plutôt standard me semble t il... (Je me permets de faire une comparaison avec le concert du 14 mars au Paloma de Nîmes où le set était beaucoup plus long, beaucoup plus délicat et en finesse...., standing ovation, 2 ème rappel et yeux... La suite | Réagir
Benjamin Clementine : les dernières chroniques concerts
Rock Werchter - Jour 4 : Foo Fighters - Cage the elephant - Thuston Moore Group - The Kills - Benjamin Clementine - Alt-J par Cabask
Werchter, le 02/07/2017
Toutes les bonnes choses ont une fin et on entame le 4ème et dernier jour du festival Rock Werchter ce dimanche 2 juillet. Pour ne pas revivre le cauchemar de la veille et... La suite
Benjamin Clementine par Olivier Garcia
Fourvière, Lyon, le 29/06/2017
Le public est venu en nombre ce soir garnir les marches de l'amphithéâtre de Fourvière, rassuré de voir le ciel se dégager et la menace d'une soirée perturbée comme les précédentes voire même annulée s'estomper... et assister donc dans une ambiance bon enfant à, tout le monde l'espère, une belle performance, profondément habitée, à l'image de ce... La suite
(mon) Rock en Seine 2015, 1/2 : Ghost, Jeanne Added, Benjamin Clementine, Jacco Gardner, FFS / Franz Ferdinand & Sparks, (Offspring) par Philippe
Saint-Cloud, Parc de Saint-Cloud, le 28/08/2015
Petit plaisir annuel de fin d'été : venir passer un dernier beau week-end à Paris ... et à Rock en Seine, pour la neuvième fois déjà, en ce qui me concerne - comme le temps passe... La suite
Benjamin Clementine par Philippe
Le Moulin, Marseille, le 10/03/2015
"En fait, c'est à partir de maintenant que tu vas enfin pouvoir écouter Benjamin Clementine !" C'est la réflexion que je me suis faite en sortant de son concert : c'est un exemple... La suite
Le Moulin, Marseille : les dernières chroniques concerts
Usken + Droïdes par Cyriiiil
Leda Atomica Musique, Marseille, le 04/05/2024
Samedi soir après 3 heures de voitures (pour rentrer de Castellane), nous sommes allés au LAM (Leda Atomica Musique) pour allait voir Usken et Droïdes. Nous avions pris un hot dog... La suite
IAM + Relo par Sami
Le Moulin, Marseille, le 20/04/2024
Quelques semaines après un concert complet au Silo auquel on n'a pas pu s'y rendre, bonne surprise avec cette date supplémentaire d'IAM au Moulin, évidement également complet.On... La suite
Kill the Thrill (+ Jon Volante) par Pirlouiiiit
Moulin, Marseille, le 19/04/2024
Encore un soir avec trop de choix ... Pour moi ça se jouait entre Louise Osman feat. Hakim Hamadouche à la Meson, Jon Volante (ex KinG) et Kill the Thrill au Moulin, et Farouche... La suite
Massilia Sound System (interview avant leur concert au Moulin) par Cyriiiil & Luciiiie
théâtre du Moulin, Marseille, le 18/11/2022
Ce vendredi soir, après l'école ma sur (Luciiiie qui est au collège), mon père (Pirlouiiiit), mon autre sur et moi (Cyriiiil) sommes partis en vélo au Moulin (la... La suite