Chronique de Concert
Bernard Abeille trio
A chaque fois que je vais au Roll'Studio j'ai un petit pincement au cœur ... je ne sais pas si c'est le terme exact mais je me sens tout bizarre quand traverse le bout du Vieux Port côté mairie, que je passe devant l'Hotel Dieu et que je gare mon vélo au pied de la montée des Accoules avant de la remonter. Peut-être parce qu'a une certaine époque j'y venais plus souvent et de jour. Le dimanche. Svet répétait à l' église Saint Laurent et on allait souvent manger dans le coin ... bref là à chaque fois que je viens c'est de nuit (même si il n'est que 18h30). Et il y a encore plus longtemps les petit déj' au grand comptoir de Paris ... le temps passe, les habitudes changent.
En parlant d'habitude qui change, même si lorsque j'arrive en haut de la rue des Muettes je vois qu'il n'y a personne dans la rue, le concert n'a pas encore commencé lorsque j'entre dans le Roll's. Tout le monde est autour du bar, donc les 3 musiciens que s'empresse de me présenter Claude : Bernard Abeille, contrebassiste dont c'est la carte blanche, Gérard Murphy, saxophoniste dont le visage m'est aussi familier (dans quelle formation l'ai-je déjà photographié ?), et Jérome Mathevon, présenté comme le petit jeune de la bande (mais dont le visage m'est aussi familier), au piano.
La cave n'affiche pas encore complet au moment où Claire Abram nous présente les 3 prochains concerts : dont le duo blues Nasser / Tomi (désolé les autres je n'ai pas noté et oublié, mais il devait y avoir Perrine Mansuy et Eyma). Je me cale donc au fond de celle-ci dans les escaliers. Sitôt son introduction, pendant laquelle Bernard et Gérard sont présentés comme des pionniers du Roll's et pendant laquelle on apprendra que cela fait 32 ans que Bernard Abeille promène sa contrebasse à travers le monde, Bernard nous annonce que ce soir ils feront du jazz calme, les évènements extérieurs étant suffisamment bouleversants comme cela.
Et d'enchainer sur le fait que le jazz était sans doute la musique la plus écologique (mot qui reviendra souvent dans la soirée), puisqu'il fallait réfléchir pour la comprendre et de conclure qu'il sait qu'en général il y a pas mal d'initiés au Roll'Studio, étant entendu qu'il fallait quand même être un peu initié pour apprécier le jazz (ce qui m'amuse car comme je le disais à l'un d'entre eux comme pour excuser par avance ce que j'allais écrire sur eux après, après quand même près de 10 ans d'écoute de jazz en live j'ai l'impression de ne toujours rien en connaitre).
En tout cas ce soir ce sera une première puisque le trio n'a encore jamais joué en public avant ce soir. Je tente de noter le nom des morceaux et interprètes au fur et à mesure qu'il les dit. Nardis de (ou en tout cas rendu célèbre par) Miles Davies (sachant qu'on lui a parfois reprocher de piquer des morceaux à ses musiciens), puis Mr Syms de John Coltrane.
Mon regard se promène de l'un a l'autre ... leurs mains, leurs yeux, ... la façon que Jérôme à de chanter pendant qu'il joue, ce que fera aussi Bernard un peu plus tard dans le set. Dear old Stockholm un "traditionnel" qu'ils joueront aussi à la manière de Davies. Le morceau suivant sera dédié à un ami de Bernard qui aurait dû être là pour filmé le concert mais qui "a avalé sa caméra" définitivement. J'ai compris qu'il devait parler de Jacques Pierre aka "le croqueur d'image" que j'avais l'habitude de croiser dans les concerts de musique occitane.
Émotion palpable pendant ce double hommage, le morceau I remember Clifford étant à la base un hommage à Clifford Brown . Puis pour nous éduquer et nous permettre de réviser quelques classiques / standards ils se lanceront dans Confirmation de Charlie Parker, apparemment une figure imposée pour tout jazzman. Exercice réussi haut la main à grands coup de "yeah !"
La cave est maintenant pleine. Ils finiront le premier set avec Effendi du pianiste McCoy Tyner (merci à Gérard pour le nom répété à la pause et à internet pour boucher tous les trous), morceau au cours duquel on appréciera à nouveau l'adresse des 3 artistes du trio, et ne regagneront le bar en invitant tout le monde à en faire de même pour que le lieu vive encore longtemps, qu'après avoir précisé que le deuxième set serait plus mystique.
Intrigué et discutant avec Gérard et Claude (qui a profité de la présence de Michel Samson dans la salle pour vendre quelques A fond de cale), je resterai pour le début du set. Bernard Abeille nous fera une petit démonstration pédagogique de ce qu'est une contrebasse, nous présentant la sienne de 1880 (année de l'apparition du mot "écologie"), le nombre de bois différents qui la compose (6 ou 7), les sons d'animaux qu'on peut en tirer, pour mieux nous introduire un morceau tiré d'un de ses spectacle avec lequel il a beaucoup tourné où il rapproche la Baleine et la Contrebasse (spectacle qu'il refera à Marseille en avril).
Le morceau qu'il jouera en solo dans le noir sera en effet assez impressionnant on y entendait non seulement les baleines mais aussi la mer ... J'ai alors compris ce qu'étaient ses deux disques / livres sur le comptoir : un sur les baleines et l'autres sur les arbres avec (le) Philippe Forcioli ( de Hakim Hamadouche sans doute) comme conteur. Lorsque j'ai ouvert mon porte-monnaie à la recherche de ce billet de 20 euros qui m'aurait permis d'acquérir les 2 je me suis souvenu que je l'avais donné à Svet avant qu'elle ne parte avec les enfants à la Friche. Dommage.
Il sera ensuite rejoint par Jérôme et Gérard. Pour ma part il était l'heure d'y aller. Comme il n'y a pas de réseau au Roll's (ce qui est une bonne chose en soi) je filerai me disant qu'ils avaient dû revenir de la Friche maintenant. Ce qui tombait plutôt pas mal car vu comme je réagissais à chaque odeur de nourritures (friture, pizza, etc...) au grès des quartiers traversés je commençais à avoir bien faim. Encore un bien beau début de soirée passé au Roll'Studio qui a la double bonne idée de proposer des concerts qui commencent à 18h30 et de les faire commencer à l'heure annoncée ce qui permet après d'aller diner ou de voir d'autres belles choses en live, ou encore de rentrer passer la soirée en famille comme ce soir ..
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Critique écrite le 26 janvier 2020 par Pirlouiiiit
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