Chronique de Concert
Body/Head + Das Simple
On ne s'inquiétait pas vraiment pour elle, malgré un divorce (mais comment avez-vous pu nous faire çà!!?!) et la fin annoncée de Sonic Youth (mais comment avez-vous pu etc... !!?!) mais tout de même ! Quand elle revient avec un projet Body/Head " inspiré de Syd Barrett et de l'uvre de Catherine Breillat ", en tournée à Tourcoing, Bourg en Bresse et Châteauneuf de Gadagne (vous ne savez pas où c'est, moi non plus), on ne peut s'empêcher d'être à la fois dubitatif et curieux, ni de penser que soit elle est devenue folle, soit elle se prend pour une missionnaire, s'en allant prêcher la bonne parole (noise et expérimentale) dans les contrées les plus reculées... ce qui revient au même.
C'est donc à l'Akwaba, coopérative culturelle indisciplinaire et artistique, à Châteauneuf de Gadagne (84) le 23 septembre 2012, un dimanche à 18h00 que diable ! que Body/Head a choisi de se produire et d'inviter, pour assurer sa première partie Das Simple, groupe originaire de Marseille, et c'est bien la seule chose dont on soit à peu près sûr les concernant, le reste ne relevant que de conjectures et d'interprétations, tant trouver une case où ranger Das Simple et mettre des mots sur leur musique s'avère être une tâche ardue et redoutable.
A 18h30, Das Simple se risque d'entrée sur le bizarre, Alllleeez ! Salve de cris flippants et çà dépote déjà sévère.
En version quatuor improbable, batterie, basse et deux guitares - imaginez Raoul Duke, short de bain, marcel, chaussettes remontées à mi mollets, chapeau vissé sur la tête et lunettes de soleil, partageant la scène avec Sepultura (le bassiste) sous le regard figé d'un petit chien empaillé (en peluche peut-être, on aimerait mieux)... - Das Simple livre un spectacle musclé, noisy, un ultra métal ironique et décadent, au volume insoutenable.
Das Simple brouille les pistes et bouscule les attentes, alternant les passages rock distordus, les envolées psychédéliques et les attaques métalliques avec une audace et une énergie presque épuisantes. Même les accalmies sont trompeuses... c'est que çà finit toujours par dégénérer !!
Le groupe enchaîne les combinaisons, duo basse batterie robuste et saccadé, solo de basse ahurissant, dialogue entre les guitares, le tout ponctué de chants, cris et temps morts savamment orchestrés, avec une bonne dose d'humour et d'autodérision.
Un concert de Das Simple, pour les non-avertis, c'est comme écouter du free jazz mais en puissante version noise/métal. Cà pourrait être du grand n'importe quoi. On ne sait pas à quoi s'attendre. On appréhende la tournure que vont prendre les évènements. On ne sait plus trop qui suit qui, qui mène quoi, mais on se rend bien compte que les musiciens sont brillants, que tout est hyper maîtrisé et que l'à peu près n'existe tout bonnement pas chez eux. Ajoutez à cela une puissance sonore extrême... et vous comprendrez pourquoi mon cerveau est entré en résonance et j'ai manqué de m'évanouir (véridique!). " In girum imus nocte et consumimur igni", j'ai été consumée par le feu.
Alors que tout le monde sort dans le patio, Kim Gordon monte sur scène pour faire ses réglages, en petit short noir et chemise d'écolière, frange dans les yeux, égale à elle-même. C'est chouette de la voir, comme une bonne copine qu'on aurait perdue de vue depuis longtemps.
Vers 20h00, alors que la salle est encore vide, elle prend le micro et murmure, avec classe (il ne saurait en être autrement), un " Happy Birthday John Coltrane " en guise de bonjour. Elle a troqué sa basse contre une guitare électrique. A ses côtés, Bill Nace, guitariste free noise de Boston.
Dans leur dos, sur un écran, est projeté un plan-séquence en noir et blanc et au ralenti d'un couple. La femme s'assoit sur un canapé et fume. Un grand miroir reflète l'image de l'homme assis en face d'elle. Il boit un verre. La scène se répétera encore et encore jusqu'à évoluer très lentement tout au long du concert, plaçant le spectateur dans une situation d'attente et d'interrogations quant au dénouement et créant un sentiment de voyeurisme presque dérangeant.
Kim Gordon chante doucement, de sa voix monocorde reconnaissable entre mille, un peu comme sur le premier EP de Sonic Youth. Elle frappe de petits coups de poings sur le manche de sa guitare pour faire trembler les cordes. Elle et Bill Nace produisent des sons torturés, vibrants et obsessionnels, toujours dans la lenteur et dans les aigus.
Body/Head est en quête d'absolu et à la poursuite de l'intime, Elle joue avec le son, ses micros, déraille, glisse sa guitare au milieu du couple et s'immisce dans le public, frottant les cordes de sa guitare contre la tête des spectateurs un peu médusés... et matérialisant là certainement l'influence de Catherine Breillat... je montre facilement mon visage mais ne touchez pas à mon corps. Body. Head.
Body/Head va jouer une heure. Une heure de distorsions couinantes, lancinantes, saturées parfois psychédéliques, dans l'instant, improvisées, pures, minimalistes, extrêmes et exacerbées par l'absence de toute section rythmique.
Sans mode d'emploi ni gps, la performance (il s'agit en réalité plus d'un happening que d'un concert), s'avère terriblement difficile d'accès, nous n'étions pas beaucoup plus qu'une petite cinquantaine dans le public et il y a eu quelques désertions, mais n'est pas Kim Gordon qui veut.
De l'entendre faire ce qui lui plaît comme il lui plaît, j'ai acquis la conviction, que je n'avais pas forcément auparavant, qu'elle était l'âme et le fil conducteur de Sonic Youth. Les explorations personnelles de Kim Gordon sont un voyage et des remises en question que nous n'avons pas fini d'analyser...
Critique écrite le 30 septembre 2012 par Mai-lan
Envoyer un message à Mai-lan
Voir toutes les critiques de concerts rédigées par Mai-lan
Das Simple : les dernières chroniques concerts
Das Simple par pirlouiiiit
les Bancs Publics, Marseille, le 24/01/2014
Ca faisait un petit moment que j'avais reçu le nouvel album de Das Simple (sorti en octobre dernier) .... Seulement voilà trouver le temps / le moment pour écouter attentivement... La suite
Festival Mimi : Atonor + Das Simple + Blurt par Mystic Punk Pinguin
Hôpital Caroline - Le Frioul - Marseille, le 06/07/2012
Chaque année, le Festival MIMI officialise l'été marseillais. On prend le bateau jusqu'au Frioul, on se baigne après une journée de boulot, la plage sous l'Hôpital Caroline... La suite
Sabot, Das Simple par Senti
La Machine à Coudre - Marseille, le 19/06/2010
Hilary et Chris sont américains, habitent à Tabor en république Tchèque et pratiquent respectivement, de la batterie et de la basse, sous le nom de Sabot. Cette tournée représente... La suite
The Simple par ylf faure
Le Lounge - Marseille, le 03/11/2007
A la base j'avais invité une copine à un concert de musique cubaine aux Docks, mais ce dernier étant annulé, je cherche vite un concert de substition et me rappelle que Remy Decrouy m'avait dit quelques jours plus tôt qu'il jouait au sein de The Simple au Lounge ce soir.
Nous voilà donc, après quelques bières à Notre Dame du Mont, débarquant... La suite
Akwaba - Châteauneuf de Gadagne : les dernières chroniques concerts
Piers Faccini par Lionel Degiovanni
Akwaba, Chateauneuf-de-Gadagne, le 04/03/2022
Ce soir, retour dans une petite salle de concert toujours aussi sympathique, il s'agit de l'Akwaba à Châteauneuf de Gadagne. J'y retrouve un artiste que j'avais découvert en solo... La suite
Catfish + Kcidy par Lionel Degiovanni
Akwaba - Avignon, le 07/03/2015
Ce soir, départ pour le concert dans un lieu bien sympathique, l' AKWABA !
Je vais revoir ou plutôt redécouvrir CATFISH que j'avais pu découvrir lors du Paléo festival l'été... La suite
Kaly Live Dub - Ashkabad par Ysabel
Akwaba - Châteauneuf de Gadagne, le 01/02/2014
Ce soir, ce sont nos retrouvailles avec L'Akwaba ! Non pas que nous l'ayons boudé volontairement pendant cette année 2013 qui vient de s'achever, mais plutôt parce que ça c'est... La suite
Les Robertes + Heymoonshaker par Lionel Degiovanni
Akwaba - Chateauneuf de Gadagne, le 02/11/2013
Ce soir-là, direction l'Akwaba, petit lieu très sympathique, dans le Vaucluse. Ce lieu est niché dans Châteauneuf de Gadagne et accueille souvent des petites perles. La... La suite