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Chronique de Concert

Brendan Perry

Brendan Perry en concert

Ninkasi Kao - Lyon 13 Février 2019

Critique écrite le par

Mercredi soir sur Lyon, Direction Gerland pour une date soulignée et surlignée dans l'agenda : Brendan Perry au Ninkasi Kao. Arrivée à 20h lorsque je me rends au guichet, peu d'agitation vers la billetterie : tout le monde vient de s'engouffrer à l'intérieur de la salle. Lorsque je pénètre dans la fosse, noire de monde, je ne peux que réaffirmer cette intuition depuis longtemps vérifier : date à ne pas manquer ! Il est presque vain de tenter de retrouver un visage connu.

Le grand monsieur qui s'apprête sous peu à arriver sur scène est l'un des membres phare du groupe notoire : Dead Can Dance qu'il a créé en 1981 avec Lisa Gerrard, chanteuse à la voix envoutante. Si ce soir, la prêtresse des morts qui peuvent danser n'est pas présente sur scène, on peut toutefois noter trois concerts à venir : passages plus qu'attendus à Rennes au Liberté et au Grand Rex à Paris.

Toujours est-il que ce soir, Brendan Perry, bien qu'en l'absence de sa fidèle partenaire, remplit une salle qui s'impatiente de plonger son écoute dans l'oeuvre à la fois transcendante et intemporelle du baryton anglais. Il est accompagné de deux excellents musiciens Astrid Williamson et Richard Yale. Le groupe, faisant son apparition vers les alentours de 20h30 ouvre les festivités avec un morceau de Dead Can Dance : "Labour of Love". Pas de négociations possible, avec cette introduction, on s'embarque pour la soirée, la musique ne permet pas de retour et la voix du Monsieur, une fois vibrant dans nos oreilles, ne peut que nous entraîner de l'avant à mesure battante de ce "Labour of Love". Les trois titres suivants sont des reprises de Tim Buckley, "Happy Time", "Buzzin' Fly" et le très beau "Chase the Blues". Merveilleusement interprétés, ces covers n'ont pas à pâlir devant les originales car si les morceaux d'origines sont des chefs-d'oeuvres, Tim Buckley ne s'en retournera pas dans sa tombe. Brendan Perry et ses deux excellents musiciens ajoutent quelque chose en plus à ces chansons, grâce à l'une aura très particulière propre au chanteur : on aura une fois de plus l'impression de basculer dans une dimension éloignée de notre quotidien, quelque part comme en plein vol, une contemplation aérienne ouverte sur le monde.



Défilent "Berimbau" et "Canto de Ossanha" (cover de Baden Powell). Au contact de ces notes Dépaysantes et ressourçantes, l'imagination se lève et explore des contrées tour à tour ensoleillées, assombries et colorées par des nuances musicales et sonorités entremêlées de cultures différentes. L'ouïe se délecte de voyager autant dans la pénombre du Kao.

"The Carnival is over"... gros crush musical. Comme une retraite dans le temps, ce titre commence avec des notes de piano empreintes de gravité, comme une ritournelle solennelle qui semblent esquisser des pas s'éloignant sous le crépuscule. Viennent ensuite s'ajouter quelques subtilités lumineuses, comme une flopée d'étoiles, des notes de pianos aiguës pareilles à des lumières un peu fugitives surgissent, inconnues, de la nuit pour chaperonner une mélancolie évanescente. Puis la voix de Brendan Perry rejoint cette promenade mystérieuse... Profonde, harmonieuse et pleine de suavité, elle nous transporte jusqu'aux confins de souvenirs que l'on croyait oublier...

Le concert se poursuit avec "Song To The Siren", "Killing the Dream", "The Rising Tide" et "Severance", un morceau aux frontières de l'incantation digne d'annoncer la fin du songe musical... Et pourtant, les trois artistes reviendront par deux fois, ardemment réclamés par le public lyonnais pour jouer "Don't Fade Away" et "Medusa"... Et ce dernier morceau... ahhh en live, voilà que des frissons parcourent le corps tout entier, le paysage sonore dévoile un décors semblable à certains longs-métrages de Theo Angelopoulos qui questionnent la mémoire... Ce morceau qui se greffe à la fois dans l'espace, convoque un temps qui semble reculé... La mélodie qui s'éloigne et reparaît ressemble à une valse des souvenirs qui flottent, des images émergent dans ces mouvements gracieux mais fantomatiques, puis s'effacent pour ne laisser qu'un reflet vague... La poussière du temps embrasse chacun de ces mots... Sur place, j'ai la tête qui tourne et qui voudrait que jamais ne s'arrête ce morceau. L'impression de flotter, ou de voguer, d'errer quelque part perdue dans le temps. L'impression de se rapprocher d'un adieu pourtant, la mélodie, majestueuse finit par toucher à sa fin...

Puis la soirée prend fin, et le coeur bercé de nostalgie et parallèlement de joie, je regarde une dernière fois ce qui vient d'être très certainement l'un de mes meilleurs souvenirs des concerts de l'année ondoyer et s'estomper poétiquement derrière un rideau trop rapidement tombé à mon goût... Une soirée musicale enchanteresse, Merci beaucoup pour cette programmation le Ninkasi Kao !


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