Accueil Chronique de concert Buck 65, Airborn Audio, Omnikrom
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Chronique de Concert

Buck 65, Airborn Audio, Omnikrom

Cartonnerie, Reims 21 mai 2006

Critique écrite le par

Omnikrom, c'est deux gars du Québec en casquettes et bouteilles d'eau minérale qui rappent des textes un peu lestes, Ca sent le XXX ce soir, Où sont mes groupies, des condensés de poésie où le mot pouliche évoque une femme et non un animal. A moins que ce ne soit l'inverse. Ils partagent les mêmes thèmes d'inspiration que les français de TTC. Le dancefloor, le craquage de bassin et le collier de barbe. Suivant le point de vue choisi, on peut trouver ça moche, débile, indigne, comique, festif. En tout cas, eux s'amusent, ils sont en France depuis une semaine et ils sont bien contents d'avoir vu Paris.

Airborn Audio ? Ou bien était-ce autre chose, un ovni musical ? Pour moi, Airborn Audio était un groupe composé de deux anciens d'Anti Pop Consortium, soit deux hommes de couleur noire, M. Sayyid et High Priest, de New-York. Dimanche soir, il n'y a qu'un noir, M. Sayyid, accompagné d'un gars, crâne rasé, bien blanc. Après renseignement, j'apprends qu'High Priest n'a pas fait le voyage jusqu'à Reims ce soir. "Pour raisons personnelles", indique une affiche collée près de la billetterie. Et c'est Robin Relish, le gars blanc, qui le remplace. Je n'ai pas encore eu l'occasion d'écouter l'album d'Airborn Audio, mais visiblement ce n'est pas ce qu'ils nous ont joué dimanche soir.
Après un instrumental construit autour de percussions électroniques, M. Sayyid s'avance vers nous pour se présenter. "Tonight is not a show, tonight is a party". Le gaillard déborde d'énergie et de bonne humeur. Il nous dit comment il est content d'être ici, à Reims, un dimanche soir. Il nous raconte qu'ils ont eu des soucis de disques durs, que des rythmiques ont été effacées lors de leur voyage, mais que ce n'est pas grave, ils ont de quoi improviser et balancer des beats, il nous répète plusieurs fois que ce qu'on entend c'est de la "brand new shit", qu'on pourra retrouver sur une mixtape ou bien sur un nouveau disque prévu pour le mois de juillet.
M. Sayyid tient deux micros dans ses mains. Le regular mic et le delay mic, qui donne un écho à sa voix. Derrière lui, Robin Relish, se multiplie pour gérer tout l'attirail installé sur deux grandes tables à tréteaux. On trouve là une double platine vinyle, un ordinateur portable, une MPC, un clavier, un compresseur et encore d'autres boites dont j'ignore la ou les fonctions.
L'ensemble, M. Sayyid + Robin Relish, sonne assez, assez expérimental. Les rythmes digitaux se fracassent sur des ambiances de galaxies hostiles. Ce n'est pas la musique la plus funky qui soit, mais le charisme de M. Sayyid, à bloc du début à la fin, a fait facilement basculer le public de son côté. Le Mc n'a cessé d'arpenter la scène de long en large au contact du public et aussi d'avant en arrière pour aller taper des instrumentaux sur sa MPC aux côtés de Relish. En plus de rapper et de manier les machines, le bougre sait aussi chanter. Il possède une belle voix grave capable de provoquer des frissons, comme sur une chanson dédiée à un cousin mort plus tôt que prévu.

Buck 65 a un jeu de scène moins tapageur que M. Sayyid. Il se déplace très peu. Il faut dire qu'il est seul pour assurer son show, coincé entre le pied de son micro, une platine et un ordinateur portable. Il a l'air tout mignon au début, en pantalon de toile et chemise à manches courtes, mais au fil des morceaux, on voit l'excitation monter. Sa jambe droite bouge toute seule, par saccades, comme si le trop plein d'énergie s'évacuait par ce côté, sur son front, la sueur perle, et progressivement son visage prend les traits d'un être hybride entre desperado, séducteur et clown.
Ses compositions, simples et entrainantes, évoquent un far-west rétro futuriste, comme une réinvention des fameuses bandes son d'Ennio Moriconne pour les westerns de Sergio Leone. Il se met d'ailleurs lui-même en scène dans ses interprétations. Sous nos yeux, il donne vie aux personnages de ses textes en mimant leurs faits et gestes. Du mime, le petit Buck ne rechigne pas à passer à de petites facéties de séducteur comme une grimace, un clin d'œil, ou plus magique, une poignée de paillettes jetées en l'air. Ce Canadien pourrait donner des leçons de charme à plus d'un français. C'est qu'il a aussi un argument de poids en sa faveur, un piège à filles infaillible : une voix chaude et rocailleuse.
Victime consentante, de ce bourreau des cœurs hip-hop, une belle brune, répondant au prénom de Claire, viendra gratifier les spectateurs de sa présence en accompagnant Buck de sa voix sur deux morceaux, presque torrides. Après le retour de la belle dans les coulisses, le rapper-scratcher-cliqueur enchaîne avec un Wicked and weird version trash, déclamé à toute vitesse, puis 463, deux morceaux de l'album Talkin' Honky Blues de 2003. La soirée se conclura, définitivement, avec une chanson, toujours en anglais, qui empruntait son refrain à un texte célèbre de Jacques Brel, Au suivant.

 Critique écrite le 24 mai 2006 par Bertrand Lasseguette


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