Chronique de Concert
Ceux Qui Marchent Debout
A la saison des feuilles jaunes, Mardal, homo-chronicus fit tourner comme à son habitude son Kymco d'ivoire pour choisir sa direction. Celui-ci le mena sur le territoire du NOMAD'CAFE. Après s'être fait tatoué à l'entrée, sur le poignet selon le rituel local, il pénétra dans la caverne. Ceux Qui Marchent Debout y produisaient une étrange musique. Il ne savait pas que des années plus tard, on appellerait cela le Funk. Dans la salle, celles qui marchent debout, ainsi que leurs compagnons, se remuaient compulsivement dans une frénésie fiévreuse sans savoir que des années plus tard, on appellerait cela la danse.
Quel plaisir d'écouter un bon groupe funk ! Plaisir pour ceux qui les découvrent, et plaisir pour certains fans de la première heure -quelques belles gueules cabossées dans la salle- qui suivent le groupe depuis vingt ans (Bon anniversaire CQMD !) et ne loupent pas chaque apparition marseillaise pour évoquer benoitement, près du Grand Fleuve, leurs souvenirs des âges farouches.
Du funk avant tout, surtout et principalement, mais teinté parfois de reggae, de boogaloo ou autre latin soul, hip-hop, et toujours d'un rythme contagieux qui entretient chez le public des déhanchements irrépressibles. Quelle que soit l'estampille qu'on y accole, cette musique dépote, elle déchirait déjà sous l'ère James Brown, et dans plusieurs décennies, c'est encore elle qui soulèvera les foules : elle est intemporelle.
Il ne semblerait pas que les fortes personnalités de Ceux Qui Marchent Debout soient que huit sur scène (on maîtrise pourtant l'allumage du feu depuis longtemps). Superclark, le banjo chante et discute, les cordes de son instrument ne sont que quatre, mais il les fouette avec un tel positivisme qu'elles restituent dignement la superbe rythmique soul des meilleurs groupes des sixties. Fab et Rico les deux percussionnistes chantent et s'affairent opiniâtrement, mais avec un sourire constant sur un ensemble hétéroclite qu'ils partagent, les cloches enrichissent le son d'un versant latin. Bart, le trombone stompe sans fléchir, puis chante à son tour.
La trompette de Bruno qui chante aussi produit un son bizarre qui singularise le groupe tout en rappelant Prince, par moments. Arnaud "la Ouiche" chante et excelle au saxophone et Roufi, le sousaphone, impressionne par ses dimensions (son instrument pourrait aisément lui servir de toise), et chante itou. Ben, le petit dernier au clavier, chante et a droit lui aussi à quelques plages de solos qu'il honore admirablement.
Le bain de foule n'est pas un exercice mécanique, une simple trempette dont il faut s'acquitter comme si elle faisait partie d'un hypothétique cahier des charges, mais une longue baignade que Ceux Qui Marchent Debout pratiquent ensemble, tous, longtemps, et avec délectation au milieu d'un public ravi.
J'apprécie particulièrement un morceau construit dans la plus pure tradition soul/funk : un rythme s'installe, soutenu par le fouettement des cordes du banjo, quelques saccades brèves des cuivres, et coups de baguettes bien sentis des batteurs. Et on prend le temps de laisser monter la mayonnaise. Après quelques minutes, l'un des musiciens attaque son premier chorus. C'est SA phrase, mais il convient qu'elle reste brève. Le rythme continue et on prend encore le temps avant qu'un autre chorus ne lui réponde. La plage rythmique qui dure a plus d'importance que les solos successifs, elle joue un rôle immersif qui imprègne tout le public au fil des minutes : j'adore ça. Et tout le reste de cette bonne tranche musicale.
Les échanges avec le public sont constants et variés depuis l'appel au chant (C ! Q ! M ! D!), à taper dans les mains, à danser : on cultive assidûment le mythe de l'éternelle jeunesse, de la fraternité et de la joie de vivre. Ceux Qui Marchent Debout portent tous de nombreux colliers de perles qu'ils distribuent généreusement au public, un geste symbolique d'amour universel, abondant simple et généreux, que celles qui marchent debout sont en mesure d'apprécier pleinement. Le concert prend des allures de cérémonie tribale. Sur les diverses pages web (Ceux qui tissent la toile) consacrées à Ceux Qui Marchent Debout, on relève les termes de funk indépendant, autoproduction, collectif sans leader, esprit alternatif. Ces quelques locutions situent assez bien le message que Crâo a délivré à Rahan, qui à son tour l'a apporté à tous les frères rencontrés lors de ses pérégrinations, et qui depuis, se transmet de génération en génération. J'ai été fan longtemps, puis je lui ai préféré Kwaï Chang Caine, dans Kung Fu, il faut bien avouer que c'est un peu le même.
L'errance intentionnelle, délibérée, choisie. Puis l'errance, de son aspect le plus aléatoire à son aspect le plus programmé. Rencontrer l'autre pour lui apporter son message, son savoir, sa technique, son art, le meilleur de soi-même. Puis recevoir en retour la part qu'il a à offrir, ou pas. Et repartir, reprendre la route. Rahan, Kwaï Chang Caine, Lucky Luke, Ty Pennington et les maçons du cur, Jean Valjean, Christopher McCandless alias Alexander Supertramp (dans Into The Wild), Super Nanny, Gandhi, Médecins Sans Frontières, le Tour de France des Compagnons du Devoir, Victor Novak, Valérie Damidot : il doit bien exister quelque chose d'éternel, d'universel, quelque chose qui s'accorde avec l'imagination des hommes dans cette construction pour qu'on en retrouve autant d'incarnations, et d'avatars sous des formes, à des époques et sous des latitudes différentes. Ceux Qui Marchent Debout en déclinent une version concertante, musicale et festive. Leur dernier disque s'appelle Shoot The Freak.
NB : J'ai aussi appris qu'il existe un GPS Rahan en appli sur I-Phone : Mdr. L'eau a bien coulé sous les ponts depuis le coutelas d'ivoire. Désormais, il faut savoir où l'on va.
D'autres vidéos sur MARDALIFICATION.
Et plus de photos de McYavell là.
Critique écrite le 17 novembre 2012 par Mardal
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