Chronique de Concert
Christophe
La Coopérative de Mai, Clermont-Ferrand 8 mars 2009
Critique écrite le 10 mars 2009 par Pierre Andrieu
Spectacle pharaonique
Neuvième anniversaire en grandes pompes et très show biz pour la Coopérative de Mai avec la présence exceptionnelle du chanteur Christophe, en concert de préchauffe avant ses shows prévus à l'Olympia les 11, 12 et 13 mars 2009 puis en tournée... Si le retour de l'auteur du récent et audacieux Aimer ce que nous sommes avait de quoi réjouir, 7 ans après sa prestation très émouvante ici même, le spectacle pharaonique présenté (normal pour celui qui a un profil de sphinx avec ses longs cheveux lissés) et les atermoiements inhérents à tout filage public ont un peu dérouté.
Face 1 : Aimer ce que nous sommes
Après un petit discours du directeur de la salle informant le public que des morceaux pourraient être rejoués en cas de problème (c'est donc une répétition publique payante, avec, il est vrai, de nombreux invités !), Christophe fait longuement languir son public... On est certes ravi d'écouter cinq ou six titres de rhythm and blues présents dans son juke box personnel (sur scène, lui... ) mais malgré les plastiques avenantes d'Helena Noguerra et de son acolyte (qui actionnent le juke box et font un peu les potiches le reste du temps), on attend de pied ferme que le show Christophe démarre enfin. Finalement, à 21h20, la star se présente sur les planches, immédiatement suivie par une partie des nombreux musiciens et invités.
Le dernier des Bevilacqua est venu bien accompagné
Une très belle section de seize cordes (pas toujours bien sonorisée malheureusement) dirigées par Eumir Deodato, la trompette magique d'Erik Truffaz, l'harmonica de Diabolo, l'intrépide Diego Carrasco accompagné par son groupe de flamenco et un groupe bien construit autour de la bassiste de Bowie Gail Ann Dorsey (un peu trop technique, juste l'espace de quelques instants), du piano de Pascal Charpentier (d'une sobriété exemplaire) et du guitariste de Tanger Christophe Van Huffel (parfois un peu bavard, mais plutôt classe sinon) accompagnent le dernier des Bevilacqua sur scène pour ce concert véritablement pharaonique. Le show est divisé en deux faces (face one et... face two), permettant à Christophe de présenter très (trop ?) longuement son dernier album Aimer ce que nous sommes au cours de la première partie, avant de ravir ses fans avec les tubes ayant jalonné sa fructueuse et passionnante carrière. Une chose est sure et marquera les esprits au cours des deux parties du concert : la voix de Christophe est toujours impressionnante, elle arrive en quelques instants à créer une atmosphère, sans oublier de faire passer un frisson d'émotion dans le dos.
Comme mon imaginaire est beau...
Les nouveaux morceaux, a priori un peu difficiles, passent bien sur scène, le choix audacieux des arrangements apporte un plus mais le côté répétition coupe un peu le plaisir : on se serait bien passé des problèmes techniques, des petites remontrances de Christophe ("il est où mon fauteuil ?, là il faudra commencer plus tôt...") et de ses discours aussi incompréhensibles qu'abscons (difficile de faire aussi drôle que son brillant disciple Sébastien Tellier... ), voire de ses facéties : "je vais me moucher, je sais pas vous mais les bronchites en ce moment, moi ça n'arrête pas !", "J'aimerais mettre des panneaux dans mon dos pour que vous voyez comme mon imaginaire est beau" .
Idéal pour rouler en Ferrari Testarossa à 300 km/h sur une autoroute allemande
Pas sûr qu'à L'Olympia, le public ait à subir autant de parasites à l'émotion provoquée par un show alternant entre pop sophistiquée, électro French Touch à la Tellier/Air (idéal pour rouler en Ferrari Testarossa à 300 km/h sur une autoroute allemande), rock planant, dérives électroniques à la Suicide et variétés françaises de qualité. De temps à autres, on se demande quand même combien tout cela a pu coûter et s'il était nécessaire de faire arriver le batteur Carmine Appice sur une batterie roulante (comme chez Michel Polnareff !) Certaines idées de scénographie sont en revanche brillantes : avec par exemple, un écran géant sur lequel est projeté un film avec une femme filmée en direct par une vraie équipe de tournage (sur Odore du femina). Certaines vidéos sont, elles, un peu décevantes, on se croirait parfois dans une comédie musicale mise en scène par Kamel Ouali (Cléopâtre) ; d'autres sont intrigantes (on pense aux cultissimes Mulholland Drive de David Lynch et Crash de David Cronenberg) et justifient le choix de Christophe et d'Andrée Puttman. Malgré quelques aléas inhérents à l'essuyage des plâtres et à la mégalomanie du maître de cérémonie, ne boudons toutefois pas notre plaisir ; voir Christophe répéter sa tournée devant nous est quand même un sacré privilège. Au bout d'une heure de spectacle, avec sa décontraction coutumière (pour cette soirée), Christophe décrète une pause cigarette d'un quart d'heure qui durera en fait une demi-heure...
Face 2 : best of Christophe
Tout le monde est de retour sur scène pour la partie best of du concert, avec un Christophe alternant admirablement entre variétés de latin lover un peu vieilli, pop classieuse à en chialer de bonheur et divagations arty étrangement belles. Le beau bizarre, Ces petits luxes, Succès fou (sur lequel Christophe enlève ses lunettes noires, pour le clin d'il... ), Senorita, Daisy, Les paradis perdus (gâchés par un larsen sur le micro, arghhh !), Le dernier des Bevilacqua et le toujours immense Les Mots Bleus (chaque fois que l'intro de ce morceau commence, on est parcouru de frissons de bonheur) sont interprétés avec concentration, foi et un talent fou pour revisiter son répertoire. On signalera de nouveaux arrangements flamenco sur Senorita, quelques solos de trompettes et de saxophone bien sentis, des cordes souvent bouleversantes et, il faut le dire une version rock baloche écurante pour le pourtant superbe à l'origine Les Marionnettes. Comme lors de son retour scénique il y a sept ans, Christophe tient à interpréter un morceau à la guitare sèche hésitante (Petite fille du soleil), touchant mais très approximatif. Le véritable hic de la soirée sera le solo de batterie lamentablement bas du front et démonstratif de Carmine Apice, qui fait immédiatement redescendre du moment de sensualité créé par Les Mots Bleus. C'est tout Christophe ça, tutoyer les étoiles filantes et puis tout gâcher quelques secondes après par une fanfaronnade à l'italienne, une kitscherie dramatique ou un excès de superficialité. Comme le concert se termine par un long morceau du nouvel album, Lita, on retiendra un concert prometteur pour l'avenir, avec de nombreux défauts à régler, et quantités de bons moments à affiner pour le plus grand bonheur des fans de l'auteur d'Aline (oubliée ce soir). Finissons cette chronique en souhaitant un bon anniversaire à la Coopé, avec pour 2009/2010, une équilibre retrouvé entre les concerts consensuels dans la grande salle (nécessaires à la survie financière du lieu, mais trop nombreux en ce moment à notre goût) et les petits concerts défricheurs dans le club (qui nous manquent beaucoup).
Liens : www.christophe-lesite.com, www.lacoope.com, www.myspace.com/lacooperativedemai.
Photos : Droits Réservés
Critique écrite le 10 mars 2009 par Pierre Andrieu
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