Chronique de Concert
Concert Dessiné 1+9+8+4 (festival Oh les Beaux Jours)
Rendez-vous pour le deuxième jour de la deuxième édition de Oh les Beaux Jours ! , festival thématique et pluridisciplinaire dispatché aux quatre coins du centre ville, sauf pour une petite incartade dans le 14e au Théâtre du Merlan . Mais c'est à La Friche de la Belle de Mai que l'on se rejoint ce soir pour mouiller l'encre en pleines bulles de concert dessiné.
Après Looking for Banjo et sa ballade mal famée de l'an passé, les dessinateurs s'attaquent désormais à un monument littéraire : 1984 de Georges Orwell . Sur l'affiche, on retrouve Alfred, Richard Guérineau, Benoit Guillaume et Laureline Mattiussi à qui se greffe pour cette édition Mathilde Domecq .
La bande-son dystopique de la soirée est aux mains de trois musiciens : Rémi Foucard au violon + clavier, Jérôme Sedrati à la batterie et Yan Wagner au chant + clavier distillent une ambiance cold wave, rehaussée de la voix et de la prestance crooner d'un frontman à la Jarvis Cocker . La performance démarre sur l'esquisse d'un monde infernal et déshumanisé sur lequel règne l'il omniscient de Big Brother.
Les protagonistes se divisent en deux clans : des silhouettes écrasées d'angoisse ou désorientées face aux représentants de l'ordre établi, du "Ministère de la Vérité" ; des brutes casquées systématiquement armées, tranchées d'encre et de traits abrupts.
La descente aux enfers dans les tréfonds de la censure s'effeuille, page après page, sur une ambiance sonore qui alterne entre minimalisme atmosphérique aux accents mélancoliques et rythmique electro presque dansante.
L'il comme le slogan indélébile s'affiche sur toutes les pages, tandis que des slogans absurdes alimentent la détresse du paysage "La guerre, c'est la paix", "La liberté, c'est l'esclavage", "L'ignorance, c'est la force". Les pages sulfureuses de 1984 , tel le "Livre" de Goldstein s'arrachent et tranchent l'air, créant la panique répressive et libératoire, écrasant même l'il inquisiteur vers une catharsis finale.
Prenant à contre-pied l'anti happy-end d' Orwell , les cinq dessinateurs s'acharnent sur ce monde de mort et le font sombrer dans le chaos et la poussière, et au cur de cette apocalypse fumante, seule la nature à perte d'horizon se relève. L'homme esquissé, goutte d'encre dans ce nouveau monde, est au centre, un peu sonné mais à l'aube d'une nouvelle vie.
Derrière lui, un soleil majestueux le pousse vers son avenir qu'il lui reste à tracer. En moins d'une heure, pas moins de 16 tableaux prennent vie, avec une incroyable intensité et une luxuriance de détails.
L'atmosphère, pesante comme une nuit sans fin, éclabousse le public d'un chapitrage d'émotions. Le suspense de la narration est alimenté par l'instrumentation variée, laissant voix au silence, résonnant sur la page qui ne reste jamais blanche.
Enfin, l'ombre de Frank Sinatra plane sur le show avec l'ironique It was a very good year ; les dessinateurs clôturent leur hommage à Orwell , sans oublier de faire le tour des présentations et de nous rappeler dans un clin d'il cette fois inoffensif que "Oh les beaux jours ! is loving you". L'amour semble avoir remporté la partie et animé la réécriture de 1984 .
Main dans la main, dessinateurs et musiciens saluent la foule conquise comme des comédiens, courbettes et sourires un peu timides. Nous, c'est leur performance en direct, leurs tiroirs personnels s'emboitant dans une même inspiration et leur optimisme à toute épreuve que l'on salue.
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Critique écrite le 25 mai 2018 par odliz
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