Chronique de Concert
Da Silva + Dimoné
Car arrivé pour les deux derniers morceaux, je manque effectivement la montée en puissance de ce set fou, mais je me prends de plein fouet LE Phénomène Dimoné, à savoir une sorte de Zébulon électrique à moustache et à l'accent languedocien, un vociférateur survolté, une pile, une gerbe d'étincelles. Un débit de paroles syncopées, effrénées, haranguées, vendeur de rêves dans une foire Lépine du verbe, au rythme d'une guitare nerveuse et tranchante, et d'un accompagnement percutant aux claviers et samples de son complice de route Jean Christophe Sirven. Car si on tergiverse souvent entre l'emploi des deux langues sur du rock, Dimoné sait, lui, faire "percuter" du français "comme" de l'anglo-saxon.
Dimoné est un artiste fou, à l'imagination prolifique (qui suit un tant soit peu sa page FB mesurera l'effervescence de ce regard qui observe tout, capte tout, le digère, le malaxe et le ré-arrange), une folie, qui croit progressivement au cours de ses spectacles, pour finir en apothéose, dans un dialogue fictif suréaliste entre l'interprète et son ampli, sa guitare, ses larsens, et où on s'attend à tout moment à ce qu'il craque une allumette pour faire flamber son instrument.
Dimoné est un fou, mais à la folie bienfaitrice, libératrice le temps d'un concert, à voir à tout prix sur scène.
Miracle des programmations, le changement de plateau assez long fait place à un tout autre artiste, Da Silva, que je devine plus posé, réservé, plus introspectif.
Nostalgique que je suis, je dois confesser ici, que le virage du cinquième album "Villa Rosa" de Da Silva m'inquiétait un peu. Annoncées ça et là, la nouvelle tonalité pop-joyeuse, voire les tendances aux embardées disco, quand ce n'est pas carrément la "Vie en Rose" (sic) que Da Silva aurait atteinte, m'ont laissé les yeux écarquillés. Moi qui me figurait plutôt Emmanuel Da Silva, comme un mélancolique définitif, touchant et fin observateur de la nature humaine... bref, c'est un peu comme si la presse musicale m'annonçait tout à coup Miossec s'adonnant à du reggae festif.
Par conséquent, la perspective d'un concert très synthétique, où les claviers vintage auraient suppléé les guitares folk me faisait un peu peur.
Mais, accompagné des deux réalisateurs du dernier album Frédéric Fortuny et Thibault Barbillon qui assurent ici les claviers et la basse, du subtil Jean-Pierre Ensuque aux guitares et d'un batteur métronomique, dont le nom m'a échappé (qu'il me pardonne), Da Silva alterne des approches, des attaques, des attitudes bien plus variées, subtiles et parfaitement équilibrées.
Une audacieuse entrée en matière avec un improbable Eté, à l'atmosphère superbe digne d'un Christophe, suivi d'un Puit et de 20 ans, aux bases rythmiques des couplets qui vous happent ; une très touchante Fin du Mois ; des Jour Peut-Etre et des Concessions malheureusement décevants ; de très pop et très mécaniques Villa Rosa et Coureur de Fond ; une belle Averse donnant dans un rock plus puissant que la tonalité Louise Attaque du violon originel ; une incontournable Indécision ; une voix rauque De Là Haut, impeccable ; sans omettre les morceaux à chanter seul à la guitare avec les choeurs du public Pour le Mieux et Le Carnaval... un album aux photos multiples, comme autant d'instantanés de la vie d'un artiste approchant la quarantaine.
Un concert donc bien plus enlevé et multiple qu'un simple spectacle pop, le tout interprété par un artiste apparemment sincère, ouvert et humain (je confirme, pour l'avoir croisé dans la rue, puis dans le hall d'entrée de L'Espace Julien), parfois extrêmement concentré sur ses interprétations, malgré une salle très clairsemée en ce mercredi soir pluvieux, soir de match de surcroît.
Et malgré une fin de set sur une déroutante Remise (terminer un concert par "quand l'angoisse te prend elle ne te ment pas ", faut quand même oser...), ce très bon concert sera effectivement à la hauteur de cette Villa Rosa, décrite par Da Silva comme une villa abritant une dizaine de pièces, à l'image de toutes ses chansons, décorée chacune différemment - à moins que ce ne soit les pièces abritant dix stades différents de la vie de l'interprète. Une agréable surprise.
Critique écrite le 06 février 2014 par Flag
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