Chronique de Concert
Le Détail + Malin + Deadwood
Réjouissant plateau de rock punchy au Poste à Galène, ce jeudi soir. Si on prend d'abord peur en voyant la faible affluence, tout rentrera dans l'ordre au moment où la musique commencera. Au moins, on aura eu le temps de papoter avec plein de gens, le groupe Deadwood y compris (curieusement, ces jeunes gens nous aiment bien, après nos quelque chroniques "à peine" enthousiastes sur le présent site...). Au final l'affluence sera suffisante pour faire du bruit et remplir la salle d'en bas, et c'est bien l'essentiel. Et moi, je devrai compléter une de mes maximes les plus sacrées, la règne numberouane du snobisme rock : "le T-shirt du groupe du jour, jamais ne porteras !" par un appendice : "...sauf si le groupe l'a offert, rien qu'à toi !"
Pour ouvrir le bal, voici le trio Le Détail, dont j'ai seulement aperçu les sommets de tête à la Rue du Rock (et en plus, en croyant que c'était Mon Vier... bref). C'est donc du rock français, un genre assez old school et plus trop pratiqué qu'on a pourtant beaucoup aimé, ici avec de belles guitares & basse et gros amplis sur scène (ça sonne !) ; Le groupe a des textes engagés et d'après ce qu'on en a compris, pas bêtes (Lachez, Lachez !).
Le chanteur a une diction qui peut rappeler un Reuno, d'autant que le son du groupe flirte par moments avec celui de Lofofora (en un peu moins hargneux, quand même, mais avec une touche metal indéniable dans la guitare). Quelques titres sont un peu trop étirés en dialogues de cordes mais dans l'ensemble c'est sympa et ils font plaisir à voir à la fin du concert, manifestement ravis et un peu émus d'avoir foulé une scène locale quand même assez mythique (hé ! les Black Keys ont commencé leur carrière météorique ici... entre beaucoup d'autres !)
Vient/viennent ensuite Les/Le Malin, groupe emmené depuis le début (4 albums, quand même !) par un petit blondinet assez dingue mais fort sympathique (on a blagué à la Rue du Rock, où ils ont déjà joué eux aussi), qui a fait pas mal de changements de personnel jusqu'à atteindre son idéal : un trio pétaradant de rock qu'on pourrait qualifier de joyeusement crétin et décalé : "Regarde ! Tu vois ?! Tu vois pas ?!" "Tout le Monde s'en fout" etc etc.
Texte rigolos donc, c'est leur force et leur faiblesse... Par moments on a du mal à vraiment cerner le projet ("entre Roch Voisine et Slayer" selon leur bandcamp...) et heureusement, il y a aussi des titres qui déboitent (Baby Baby, rock'n'roll furibard et sale, super !), même si les sauts latéraux et les simagrées marrantes du chanteur peuvent, là encore, semer le trouble.
Je n'aime pas tout mais il y a du très bon et surtout, une originalité indéniable chez ce type capable d'écrire sur les Bourrelets de sauvetage ou de parodier (non, plutôt de the-texas-chainsaw-massacrer !), en parfaite harmonie avec les deux autres tarés qui l'accompagnent à la batterie et à la basse, un Gigi, l'Amoroso qui ne leur a rien fait (ou du moins, rien de plus qu'à nous !). A ce stade on ne s'étonne plus que le foufou Fabien finisse en crowdsurfing après avoir hurlé comme une bête, et que le trio sorte au son de Tout Doucement... L'univers de Katerine n'est pas loin, et on a besoin aussi de gens qui s'amusent sans retenue sur scène, quitte à nous égarer en route, alors bravo à "Pabien Malin" et surtout : no explain, no complain !
Sur ces entrefaites j'ai donc appris pas mal de choses sur les Deadwood dont deux assez cruciales : ils ont joué et survécu au Sud Side, devant 2000 bikers tatoués d'une part ; Violette travaille sa voix au whisky et à la clope d'autre part (il n'y a que comme ça qu'on développe un timbre aussi rauque et sexy, c'est un fait... devinez qui applique ce même régime, et qui boit du thé vert, entre Marianne Faifhfull et Jane Birkin ?).
Mr Deadwood attaque donc seul par quelques titres, et l'on sait déjà par expérience qu'il occupe une scène sans problème, avec son blues électro-cradingue d'enfer (Death Chant), sa voix amochée et poignante, ses ribambelles de pédales et ordinateur d'effets, son expression hallucinée de chanteur possédé... qui aboie comme un damné, lui aussi (décidément, ça gueule, ce soir !), nous entraînant dans une transe tribale à sa suite, lui et sa gratte déglinguée... Running through the woods, le bois mort ici, c'est celui des petites statuettes de Blair Witch, bien sûr...
Mais ce qu'on sait déjà aussi c'est que Deadwood prend toute son ampleur quand il est deux sur scène, rejoint par sa chanteuse en robe rouge, armée de sa boite à tonnerre et de son squelette d'oiseau habituels, de ses petites danses vaudou et ses mimiques outrancières, elle aussi habitée par sa musique... D'entrée, ils nous envoient ce titre badalamentien fascinant (qu'ils m'ont promis d'enregistrer bientôt sur disque !), où la voix de madame s'enveloppe dans des violons imaginaires - je pense à Shirley Bassey et à Tom Waits à chaque fois !
Et rapidement une fureur contagieuse les/nous gagne, leurs titres se font plus toxiques, plus vénères, plus trippants et viscéraux encore que dans notre souvenir. On envie les personnes qui les découvrent ce soir (même s'il y en a de moins en moins dans la salle, et tant mieux !), on se morfond que ce duo infernal n'ait qu'une adresse de squat à Marseille (trop peu pour Phocea Rocks, hélas...), mais on se sent prêt à plaider leur cause devant le diable lui-même, voire devant le Président & Leader Bien-Aimé de l'association...
Il n'y à qu'à contempler mes notes, définitivement illisibles ou incohérentes à ce stade ("ils piaillent comme de vieux corbacks maléfiques" - sic...), pour voir que j'étais manifestement parti ailleurs en leur compagnie ("blues électroïde chaotique = climax !" - des fois je me fais presque peur). Le public, au final d'une bonne centaine, se perd avec délices dans leur univers gothique où le zombie de Robert Johnson (ou de Hasil Adkins ?) fait sonner sa guitare sur les boucles électroniques de John Carpenter (ou de Giorgio Moroder ?).
Une belle heure dans leur train-fantôme rock'n'roll à donf, blues from the crypt, songs the lord taught us, le tout secoué à la gégène d'une boite à rythme qui a manifestement passé 20 ans dans les mains d'un teufeur (bon, c'est un ordi mais quand même), c'est pile ce qu'il nous fallait pour conclure idéalement cette belle soirée. Eux aussi auraient pu finir en slam, mais nous gratifient à la place d'un rappel triomphant et déchaîné...
Rhâââ... Merci aux trois groupes, tous dignes d'intérêt et très différents, et aux courageux organisateurs/trices de l'asso' "Ca Va Passer" (à qui on doit déjà plusieurs autres belles dates), et à bientôt !
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Critique écrite le 01 octobre 2016 par Philippe
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