Chronique de Concert
Dinosaur Jr.
Quarante ans ! Beaucoup de leurs pairs de la scène alternative n'y sont pas arrivés. Les Replacements, sabordés. Les Screaming Trees, carbonisés. Sans parler de leurs fils adoptifs de Seattle. Là, c'est l'hécatombe. Tous ces groupes qui n'ont pas eu la chance, pas eu le temps de devenir... des dinosaures.
Et donc en 2022 on va voir Dinosaur Jr. comme on va voir les Stones, ou une exposition sur Picasso. Un peu comme un pèlerinage, en somme. Et ce soir, le Trabendo, c'est un peu le Saint Jacques de Compostelle du larsen. Le Lourdes du feedback. Les jeunes (et moins jeunes) brebis viennent s'entasser pour s'abreuver de la bonne parole dispensée par le bon père Mascis et ses deux apôtres. Un genre de communion, mais avec de la bonne zic. Et de la bière en guise de vin de messe.
Ça fait longtemps que J. Mascis a les cheveux blancs et nous aussi, ça commence à se voir. Mais on arrive presque à l'oublier pendant quatre-vingt dix minutes de prosélytisme électrique, de sauvagerie contrôlée, avec même... attention... des tubes ! Bah oui. "Start Choppin'", "Get Me", "Out There", "Freak Scene"... Des putains de classiques, des hymnes (pour rester sur la métaphore religieuse) repris en chœur par plusieurs générations de fans. Des enfants avec leurs parents, des adolescents qui s'encanaillent, et des quinquas qui viennent pour essayer de retrouver leurs vingt ans le temps d'une soirée...
Un truc à savoir, c'est que ça joue fort. Très fort. Trop fort, peut-être. C'est que pour arriver à la transe, il faut pousser les potards jusqu'à onze. Et ça marche : il n'aura fallu que quelques secondes pour que la marée humaine dans la fosse se transforme en tsunami. Un maelström de chair, de cheveux et de sueur, propulsé par la batterie spartiate de Murph, le ronflement infernal de la basse tenue par Lou Barlow et les envolées psychédéliques de J. Mascis.
Plein à craquer, le Trabendo n'a pas cédé sous les assauts soniques du trio. Nos tympans, en revanche, ont bien morflé.
Plus de photos et chronique (en anglais) sur www.ElectricEyeRock.com
Critique écrite le 23 octobre 2022 par Electric Eye
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