Chronique de Concert
Eastern Committee + Harvey Digger (Folk Session #6)
Ce week-end aura été placé sous le signe de la découverte de salles ... et c'est vrai qu'il est tout aussi excitant de découvrir une nouvelle salle qu'un nouveau groupe, surtout lorsqu'on en entend parlé depuis quelques années et qu'on y a toujours pas mis les pieds. Après la Cité de la Musique (où je vais très peu) vendredi, la Station Alexandre (où je n'étais jamais allé) samedi, ce soir c'était donc au tour de Point de Bascule.
L'occasion d'insister sur la quantité de lieux qu'il y a Marseille et autour (combien de fois ai-je entendu qu'il n'y a rien, de la bouche de gens qui ne regardent pas plus loin que la lucarne de leur télé ...). Et c'est important de le souligner de temps en temps : à côté des mastodontes dont on trouve la prog annoncée partout (parce qu'ils y a des préventes et donc la possibilité de grappiller de l'argent sur les billetteries) il y a un nombre encore plus important de salles plus petites et moins promotionnées, et que c'est justement à ces dernières là que l'on reconnait voire que l'on doit l'activité musicale d'une ville.
Sans la Machine à Coudre, la Meson, le Roll'Studio, le Lounge, le Floor, le Dan Racing, l'Enthropy, le Paradox, l'Embobineuse, el Ache de Cuba, le O'Bundies, le Planet Mundo K'fé, le Bicock, la Caravelle, le No Mad Café, le Duke, Lollipop, Massilia Records, théâtre de Lenche, des Argonautes ... et tous les lieux dans lesquelles je n'ai honteusement jamais mis les pieds encore car hors de portée de mon vélo ou par manque de curiosité, il n'y aurait pas de une aussi bouillonnante scène marseillaise (au sens large) que ce soit rock, jazz, chanson, world et même electro (je suis mon branché bar à DJ) ou hip hop (dans une moindre mesure). Bref tous ces lieux insuffisamment aidées par les collectivités (par rapport aux grosses structures bling bling qui n'accueillent que des artistes connus) alors que ce sont ces premiers qui accomplissent tout le travail de fond et permettent la création !
Bref lorsque j'arrive dans ce lieu qui fait clairement partie de ces lieux là, je suis en retard et en sueurs d'avoir grimper jusqu'en haut de la rue Breteuil en vélo (après avoir fait un sprint en poussette sur la longueur du boulevard Chave). Demandant à l'entrée si on pouvait me donner un conseil sur où accrocher mon vélo (pas de poteau visible dans la cour), on m'invite à mettre mon vélo à l'intérieur du Point Bascule. Je prends ma carte d'adhérent et sans avoir vraiment jeter un coup d'œil à l'espace bar me précipite dans la salle de concert proprement dite, séparée par une double porte.
Waw ! je ne m'attendais pas à ça. Une salle toute en longueur (mais pas si étroite que ça du tout) avec des murs en pierres apparentes. Une scène a peine surélevée, et un fond de scène noir. Je ne sais pas pourquoi (peut être à cause de la superficie, des rangées de chaises et de la musique que j'entends en rentrant) mais je pense instantanément au feu-Tonic (cette salle ou sévissaient John Zorn et sa clique avant de déménager au Stone et que celle ci ne connaisse le même sort que le CBGB's et pour les même raison - fermeture pour cause de loyer devenu exorbitant).
Devant une vingtaine de personnes attentives, Eastern Committee est déjà à l'œuvre. Ce sont eux, que je n'avais pas vu depuis leur passage au Lollipop Music Store (il y a 2 ans), qui m'ont donné la force / le courage de venir ici un dimanche. Lui (Pedro) à la guitare, elle (Julie) à la batterie, le chant partagé avec leurs voix qui se réponde parfaitement. Son chant (à lui) très Newcombe-Reed-Cave, son chant (à elle) très Gordon-Lynch-Smith.
Ayant vu Pedro aka Moondawn il y a peu à l'Espace Espace Montévideo, mon attention est surtout porté sur Julia et son jeu sec et doux à la batterie. Attention quand je dis doux, je ne dis pas mou. Il y a une réelle tension / nervosité dans son jeu. D'ailleurs son visage est assez dur (je n'ai décelé qu'un début de sourire sur la fin).
Je n'assisterai qu'à une grosse vingtaine de minutes mais suffisamment pour les entendre chanter ensemble et séparemment et en instrumental. Eastern Committee n'est pas un groupe très vieux, mais ce n'est clairement pas un groupes de jeunots. Souhaitons que le fait qu'ils se soient trouvés quelques collègues au sein de Microphone Recordings leur offre de nouvelles perspectives.
A la pause, j'ai tout le temps d'admirer le lieu ... bar spacieux ... des trucs à lire dans tous les coins et tous les sens ... En scrutant le mur je bloque sur cette feuille qui décrit le lieu en ces termes "spécificité du lieu : - gratuité de mise à disposition - géré par des bénévoles - fonctionne sans subventions - pas de communication média". On se demande comment c'est possible et que ça ne doit pas être facile tous les jours, mais ça fait plaisir. L'ambiance ici me fait penser à un truc intermédiaire entre l'Espace Montevideo (en moins branché) et l'Embobineuse (en moins oppressant / plus aéré). Vu là où est situé le lieu, les gens qui sont là ne le sont pas par hasard ...
On nous prévient que le deuxième groupe va attaquer. En fait Harvey Digger est tout seul, et c'est le bonhomme qui allait et venait un peu nerveusement près de la porte d'entrée (ce qui peut tout à fait se comprendre avant de monter sur scène). Par contre ce qui est curieux c'est que plutôt que d'arriver des loges ou d'être déjà sur scène il attend près du premier rang de spectateurs ... il s'installe ensuite sur la chaise entre les deux guitares et prend l'acoustique, tout cela sans un mot ni regard vers le public.
Visiblement toujours assez stressé il enchainera plusieurs morceaux instrumentaux penché sur sa guitare acoustique là encore sans faire cas du public (ni entre les morceaux, ni pendant les longs re accordages) sauf à un moment à un pote pour lui demander si il a bien lancé l'enregistrement et à un autre moment où il s'adressera à l'ingé son. Pendant les morceaux aucune importance sa dextérité et ses morceaux étaient tellement plaisant qu'on finissait par l'oublier, mais dès que ceux ci se terminaient on (en tout cas je) était re-frappé par cette espèce de gêne contagieuse.
En tout cas, je me répète les morceaux eux même étaient vraiment chouettes : répétitifs (dans le bon sens du terme), hypnotiques comme ceux de Seabuckthorn* par exemple mais sans effets ni artifices. Cette série de morceaux acoustiques prendra fin lorsqu'une corde cassera. Il finira la morceau et sans un mot se lèvera pour se placer devant l'autre micro avec une guitare électrique. Là non plus pas un mot. Ça en devenait vraiment gênant, d'autant que son regard était vraiment fuyant.
Pour continuer la comparaison avec Seabuckthorn, Andy son seul membre jouait lui aussi seul et en silence, mais il était déjà là lorsque nous sommes entrés, et semblé plus recueilli que stressé. Ce que je veux faire remarquer là c'est que j'ai déjà vu des sets silencieux sans que cela ne me paraisse étrange. Fin de parenthèse. La deuxième partie du set sera du coup radicalement différente, car outre la nature électrique de la guitare, il chantera.
Des chansons en anglais pas spécialement gaies qui parlaient (dans ce que j'ai compris) de fille partie, à oublier, de déception, d'amour déc(h)u ... avec quelques passages déclamés de façon un peu trop théâtrale pour moi. Me rappelant que le lendemain ma semaine de travail commençait je me suis rapproché du fond de la salle et le temps prendre quelques photos de plus il a finit un morceau, se levé et est descendu de scène vers le public (plutôt que vers la loge). Pris de court nous avons à peine eu le temps d'applaudir et avons fini par sortir de la salle.
Drôle de final ... à l'image de ce set, dont je garderai quand même le bon souvenir de la première partie. Je ne resterai pas trop longtemps (juste celui de dire bonjour et au revoir à quelques personnes) mais je reviendrai assurément ici, et pourquoi pas pour le volume 7 de d'une folk session comme ce soir ...
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et une petite de Harvey Digger ici
Critique écrite le 25 janvier 2012 par Pirlouiiiit
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