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Chronique de Concert

Eiffel + Yell

MJC Oullins 13 avril 2001

Critique écrite le par

Rock et pop à la MJC Oullins

La venue d'Eiffel à la MJC a attiré un public important, qui n'a pas été déçu par la performance du groupe français, qui confirme les espoirs placés en lui.

Eiffel en concert, c'est déjà un petit événement. Le groupe commence à se faire un nom et une place sur les ondes par le biais de son nouvel album "Abricotine", et le nombre de personnes présentes, tout comme la venue de TLM, ne faisait qu'attester le bien que l'on pense du quatuor.
Mais n'anticipons pas. Entre l'attente dans le vent glacial d'avril et la montée d'Eiffel sur la scène, une première récompense était livrée au public grâce à Yell, qui assurait la première partie. Dès le premier instrumental d'introduction, chacun oublie ses derniers frissons, envahi par le rock alternatif des Lyonnais. L'excellente technique et l'acoustique de la salle servent à la perfection la musique de Yell, qui est à la fois puissante et claire.
Alors que le rythme marqué par la batterie semble envelopper la foule comme des pulsations cardiaques de la salle, la basse se ressent dans les pieds et les jambes, qui vibrent en cadence. Les riffs tranchants délivrés par la guitare saisissent aux tripes et imposent l'énergie du groupe. C'est alors qu'arrivent Karine et Christine, les deux chanteuses, aux voix quasiment jumelles mais aux charismes totalement différents. Christine, la blonde, semble empreinte de fragilité. Concentrée sur les morceaux, jusqu'à en paraître soucieuse, elle apporte une touche de légèreté qui emmène la tête vers les hauteurs tandis que le corps subit les assauts de la musique. De l'autre côté, Karine, la brune, apporte, en quelque sorte, le piment à la musique de Yell (et inutile de lorgner vers quatre Anglaises lobotomisées, c'est de vrai piment dont je parle). Si elle dégage parfois une douceur qui va de pair avec le chant de sa comparse, son chant et son attitude évoquent plus souvent une secousse salvatrice, un coup de poing dans des tympans endormis par la guimauve radiophonique.
Les morceaux se succèdent, en français ou en anglais, mais la pression ne retombe jamais en dessous du niveau des premiers morceaux, parfois dépassé à l'occasion de certains morceaux frôlant un punk du meilleur effet. Le rock alternatif brut de Yell s'accompagne cependant de nombreuses variations dues aux effets marquant les sons de la guitare et de la basse, aux deux voix simultanées, ainsi qu'à l'utilisation d'une deuxième guitare par Christine sur certains morceaux. On ne s'en lasse pas...
A tel point que les Lyonnais, qui jouent visiblement à domicile, devront s'acquitter d'un rappel pour satisfaire un public dont une partie les connaît apparemment depuis longtemps.

Après une courte pause, mise à profit pour goûter la bière (par ailleurs très bonne) servie au comptoir, on retourne vers la salle qui s'est extraordinairement remplie alors que les verres se vidaient de l'autre côté de la porte. Les fans d'Eiffel, qui devaient se cacher jusque là, ont investi la salle, maintenant pleine jusqu'à l'entrée.
Lorsque le groupe monte sur scène, un frémissement parcourt l'assistance, qui anticipe déjà son plaisir. Une anticipation qui ne sera pas déçue. On sent l'expérience du groupe de Romain Humeau dès les premières notes. Les morceaux sont carrés, chaque note tombe parfaitement à sa place. Conséquence du live, le son est nettement plus brut que sur l'album, et les morceaux sonnent tout de même moins "ado" qu'à l'accoutumée. Mais ça ne semble pas déranger une seconde le public, qui chante, applaudit et saute à tout va.
Face à cette ferveur, Damien et Nicolas servent un soutien rythmique irréprochable. Sur un côté de la scène, Estelle partage son temps entre la deuxième guitare et les claviers, apportant sans cesse une dose de clarté aux morceaux. Le centre de la scène est occupé par Romain qui, derrière son micro et sa guitare, évoque aussitôt un poète torturé du XXIè siècle. C'est à travers lui que se focalise toute l'énergie dégagée par le groupe et par le public. Tous sont portés par la voix du chanteur, qui semble tournoyer dans la salle alors que la musique imprègne le public, à moins que ce ne soit le contraire.
Du premier au dernier morceau, la communion entre Eiffel et son public est parfaite, alors que les titres se succèdent, que Romain change de guitare, et qu'Estelle alterne guitare et claviers. Les fans semblent tombés dans une faille temporelle, dans laquelle une version plus longue de "Te revoir" est offerte aux fans.
Au bout d'un temps que personne n'a vu passer, chacun se réveille. C'est fini, le groupe est parti, les lumières se rallument. Pour ceux qui ont vu les deux groupes jouer, malgré les deux styles différents (rock alternatif grungy et pop atypique et passionnelle), la chute est plus difficile, après un tel raz-de-marée d'énergie plus ou moins brute. Les yeux et les oreilles en ont eu plus que leur part, et le corps tout entier risque de vibrer pendant un moment.

Plus que jamais, les absents ont eu tort ....

 Critique écrite le 25 avril 2001 par Nicolas Gervais


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