Chronique de Concert
Evangelista + Ches Smith
C'est Ches Smith, percussionniste agile et tentaculaire chez (entre autres) les excellents Xiu Xiu et les non moins excellents Secret Chief 3, qui donne le beat de départ. Seul face à son amoncellement de futs et de cymbales, Ches s'emploie à développer un tourbillon rythmique bicéphale. La rencontre d'une cadence endiablée, où chaque mouvement est synonyme d'un coup de feu, et d'aplats minimalistes ponctués de grésillements vibra-phoniques. Le combat de la polyrythmie cathartique construite aux forceps contre le souffle libre et improvisé des bruits électroniques jetés en pâture au silence. Technique ce qu'il faut, Ches ne tombe pas dans la démonstration dénuée d'émotion. Le groove tribal renait toujours des parties les plus bruitistes pour relancer la machine-infernale. Ne s'autorisant aucun temps-mort, la performance se veut brève mais d'une intensité rare. Pour cause, c'est également Ches Smith qui tiendra la section rythmique à bout de bras pour le set chaotique et incantatoire d'Evangelista.
C'est avec sa nonchalance habituelle que Carla Bozulich harangue sa troupe, règle les derniers détails techniques de son capricieux set de pédales et lance quelques regards complices à Tara Barnes, bassiste et seul véritable membre permanent du groupe aux côtés de Carla. Hello Voyager, dernier disque des new-yorkais, est une frise schizophrène et hétéroclite où s'entrechoque blues, post-punk et rock-post dérangé. Le concert suivra les mêmes travers paradoxaux, bancals et harmonieux, angoissés et chaleureux. Interrompant les premières mesures pour venir rapprocher elle-même le public vers le devant de la scène, Carla dévoile immédiatement ses intentions : créer une entité intimiste. L'atmosphère est unique ; Soufflée par l'enchevêtrement d'un chant bluesy et habité et d'une instrumentalisation sachant faire le grand écart entre le minimalisme et la densité la plus éruptive, lorsque violoncelle, samples, guitares et rythmes dantesques poussent vers la même direction pour crever le plafond. D'un instant à l'autre, Evangelista parvient à passer d'un morceau furieux et métallique - comme le très Neptune "Smooth Jazz" - à une tirade veloutée déclamée les bras enlacés autour d'une personne prise au hasard dans le public ("Can you feel love !?") ou une reprise très rock de "So Today I'm A Boy" de Anthony And The Johnsons. Evangelista tisse sa musique d'amour et de haine, de paroles douces et de cris désemparés.
Un voyage semé d'embûches et d'onirisme. Un concert au premier rang sur des montagnes russes. Il ne fallait pas louper le train.
Chronique initialement publiée sur www.metalorgie.com
Critique écrite le 29 janvier 2009 par Senti
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