Chronique de Concert
Ez3kiel [Ezekiel] extended
Retour, enfin, au Moulin, historiquement une de mes salles préférées, où il y a encore un an je pensais ne plus jamais revenir. Surement de gros changements acoustiques et autres mais pour le reste, on retrouve la salle peu changée, toujours très classieuse et bien sonorisée. Ca tombe bien, le concert de jour ne pourra pas se satisfaire d'une acoustique approximative : c'est le groupe Ez3kiel, dont on sait qu'il donne des concerts régulièrement sublimes (celui avec Nosfell étant l'un des 5 plus beaux de ma vie, toutes catégories confondues !) et produit des disques essentiels pour lesquels une platine vinyle est un équipement indispensable.
En attendant le début avec des camarades, je reconnais le type au merchandising comme un membre du groupe, et j'engage la conversation pour en apprendre de belles sur eux : il n'y a plus que 2 membres des 4 d'origine sur scène, lui est "passé à autre chose" (enfin il est quand même là ce soir) et Yann Nguema, le bassiste-graphiste du groupe, se consacre désormais à la vidéo ! Il y a donc sur scène 10 garçons dont huit inédits, et deux filles. Qu'à cela ne tienne, on sait que le son et l'image seront sans doute magnifiques, impression confirmée dès le premier titre (même si les lumières monteront en puissance et les projections commenceront plus tard). Hélas, la salle est assise et bien sûr, c'est la plus mauvaise position pour recevoir de la musique vibrante. Enfin...
C'est en tout cas un beau petit "orchestre-commando" déployé ici : theremine, batterie, guitares, violons et autres cellos, clavier, xylophone... Et le tout s'ébroue rapidement sur la tonitruante Adamantium, qui développe un très gros son et un final déjà faramineux. Les chansons en 'ine' (Naphtaline, Léopoldine) suivent, toute en finesse, la mélodie jouée magnifiquement au theremine (le joueur concentré est assez fascinant à regarder). On est déjà en manque de vocabulaire, comme espéré, pour décrire la prestation : hypnotique, poétique, lancinante, etc. Leopoldine développe de nouvelles images animées, magnifiques et aériennes comme des bulles de savon (ou plutôt des flocons de neige) - le titre se termine quand même à fond, avec même quelques hurlements au micro.
Suit une chanson que je ne connais pas mais que je trouve, selon notes, "sicilienne", ambiance Nino Rota, avec la guitare typique et une statue en marbre qui pleure à grosses gouttes sur l'écran. A réécouter ! Et puis l'historique et fantomatique The Wedding, où le graphiste peut lâcher ses chevaux, tournoyant dans l'immense théâtre vide et traversé de spectres. En allant chercher à boire, je passe d'ailleurs regarder par dessus son épaule, à la console son - il a l'air de s'amuser comme un petit fou. Le morceau (13 minutes !) continue à se déployer, en plusieurs mouvements dont un mélancolique avec les cellos seuls, rejoints enfin par le reste de l'orchestre : c'est vraiment très beau !
Puis une sirène à main est actionnée, avant le début de leur très belle et pertinente reprise du thème de Romeo & Juliette de Prokofiev, qui joue le chaud et le froid, et va jusqu'au deuxième mouvement joué à la flute traversière. C'est magnifique (et en plus c'est le morceau le plus intéressant de cette oeuvre un peu ch... par ailleurs). Nouveau moment magique, l'introduction au piano d'Insomnies, belle à en verser une larme (un peu comme du Yann Tiersen première époque), où les globes lumineux sur scène sont découverts des tissus blancs qui les couvraient : ils renferment de petites statues, qui seront délicaement effleurées par des lumières pour la suite du concert. Très jolie idée de mise en scène...
Autre passage "obligé" (mais espéré !), leur historique Lac des Signes, en version presque un peu jazzy, mais toujours avec des ballerines qui tournent, virent et finalement tombent. On se souvient avec plaisir des petits jeux graphiques qu'il y avait sur le disque de Naphtaline, où l'on pouvait animer ses propres vidéos. Evidemment là aussi l'enchantement des oreilles le dispute à celui des yeux... Après un morceau inconnu, dub un peu long, autre morceau de bravoure qui me rappelle leur rencontre avec Nosfell : Exebecce et ses jardins fantasmatiques, où apparaissent et disparaissent des sculptures improbables dans un paysage de lande désolée. C'est si beau qu'on arrive à faire abstraction des gourdes qui dansent devant les barrières, emmerdant les premiers rangs, comme si on était venu les voir elles...
Emporté par mes sens, je m'aperçois avec surprise qu'une grosse heure est déjà passée quand retentit Kika, premier morceau écouté sur le premier album que j'ai tenu d'eux entre mes mains (il est des premières fois qu'on oublie pas !) : toujours touchante même si elle ne débouche plus sur leur saignante Barb4ry, d'autant qu'elle est appuyée par une magnifique vidéo d'une texture rouge... sang. Le best-of continue avec l'inusable Volfoni's Revenge (est-ce bien le même Volfoni dont nous parlons, le petit Raoul ?), réinterprétée ici de façon surprenante, hachée menu, ventilée façon puzzle et étirée à l'infini par l'orchestre, joliment parcouru de projecteurs-poursuites blanches, qui reflètent des volutes de fumée dans l'air.
L'orchestre du jour salue, se présente et revient nous jouer, pour le final, la mélancolique (voire poignante) Subaphonic pour finir. C'est déjà terminé hélas, 1 h 30 sont passées comme dans un rêve, et la magie a opéré, comme toujours. L'avantage de la musique principalement instrumentale d'Ez3kiel, c'est que le groupe vous fait vibrer même quand il a changé pratiquement tout son personnel sur scène, d'autant que l'aspect visuel est toujours traité avec le plus grand sérieux... et la plus belle légèreté. Et dire que pendant ce temps, Woodkid squatte les charts avec son galimatias pompiers et sans mélodie, et ses visuels déprimants...
A la demande d'une nymphette en goguette, nous repassons voir le beau Yann avant de sortir (avenant comme toujours, il acceptera de bonne grâce une photo !), moi plutôt dans l'idée de lui gratter une set-list. Ce sera finalement sur scène, en faisant jouer un copinage éhonté avec un roadie, qu'on arrivera à en obtenir une. Au final, même sans vrai nouvel album à défendre, Ez3kiel nous a fascinés, comme toujours. En outre, le renouvellement progressif des orchestrations, des images et des animations vidéo, font qu'il est tout à fait indispensable de les revoir, au moins toutes les quelques années, afin de ne pas perdre leur formidable fil créateur...
Setlist :
Derrière l'Ecran
Adamantium
Naphtaline
Léopoldine
The Girl with the sun in her hair
The Wedding
Romeo & Juliette
Insomnies
Le Lac des Signes
Siren 17
Exebecce
Kika
Volfoni's Revenge
Encore :
Subaphonic
Critique écrite le 26 avril 2013 par Philippe
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