Chronique de Concert
Giedré + Auguste Wood
Pour moi c'est un illustre inconnu que ce grand gaillard ayant piqué la tenue de scène d'Angus Young, mais, pour pas mal de personnes qui regardent les trucs dans la lanterne magique abrutissante, c'est le gars qui a fait l'émission La France a un incroyable talent, émission dans laquelle, il est, semble-t-il, allé plus loin que le 15 français de rugby. Pourtant le Dany Boon ardéchois envoie un bon paquet de coups de coudes, et pas seulement. Ce croisement improbable entre un Gaston Ouvrard (z'avez qu'à chercher qui c'est!!!) et un Bobby Lapointe qui aurait piqué le speed de Lemmy est un phénomène à ne pas rater.
C'est drôle, ça va vite, très vite, trop vite parfois (le temps de se concentrer pour faire une photo et j'avais perdu souvent le propos). Le gars est élevé au grain et en plein air cela se voit à ses cuisses musclées et brillantes, à son pelage lustré, à sa pêche énorme. Il part dans tout les sens, s'arrête, grimace, gesticule, saute, repart, donne une fin génialissime à un tube des années 80, fait participer le public. Bref, c'est frais, décapant, une belle découverte et une belle entrée en matière pour la pièce maîtresse de la soirée .
Giedré je connais. J'ai déjà vu, entendu. J'ai déjà fait des petits anus avec mes doigts. Mais, ce soir le concept du spectacle est différent, c'est un Constacle. Non pas un spectacle pour les cons (quoique !!), mais un concert-spectacle. C'est à dire que la belle blonde ne va pas nous redonner à vivre avec ses anciens personnages et ses anciennes chansons, mais nous en offrir de nouveaux très entourés de spectacle théâtralisé. Elle vient de là Giedré, non pas du blues, imbécile !, mais du théâtre, de l'improvisation. C'est donc avec son fidèle Sandrine, DJ, musicien, claviériste, légèrement déficient mentalement que Giedré va nous donner une nouvelle brochette de personnages à mâchouiller.
Même si ça reste impertinent, un peu scato, volontairement vulgaire et grossier, il se rajoute à ce spectacle une énorme touche d'humanité. Il y a du Frédéric Dard dans ce spectacle (et c'est un lecteur assidu de ce grand bonhomme qui le dit). Cette vulgarité assumée cache difficilement une énorme tendresse pour ces personnages. Cet éboueur, cette femme en maison de retraite, cette mère qui n'en peut plus, cet exhibitionniste et tout les autres nous émeuvent. Leur petitesse, leur solitude, leur invisibilité nous bouleversent de rire, car à travers ces portraits au vitriol, c'est de nous dont Giedré parle. De celles et ceux qui doivent traverser la rue pour trouver du travail, celles et ceux que l'on croise dans les gares et qui ne sont rien, invisibles, mais contrairement aux propos d'un certain Emmanuel, il n'y a aucun mépris dans les mots les plus crus de Giedré, non au contraire, il y a une tendresse infinie.
Le spectacle est drôle parce que touchant, émouvant parce que vrai, le côté théâtralisé avec Sandrine est parfois, à mon avis un peu lourd, un peu long (mais il faut meubler avec moins de chansons). Giedré je ne pensais pas avoir la larme à l'oeil en venant à ton constacle, et pourtant. Par contre j'ai une petite question pour toi : "Comment as-tu su la raison pour laquelle je voulais faire du Rock ?"
Photos : Jérôme Justine
Critique écrite le 23 octobre 2019 par Jérôme Justine
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