Chronique de Concert
Hubert-Félix Thiéfaine
C'est un concert fleuve de près de 3 heures que nous a offert Hubert-Félix Thiéfaine. On ne peut que saluer le professionnalisme de sa performance et de son groupe. Avec 10 musiciens sur scène, les relectures de ses titres historiques étaient extrêmement travaillées, rodées et diablement efficaces. On était loin des sonorités "blues folk" qui m'avaient déplu par le passé, grâce notamment à 3 guitaristes ultra précis (dont Alice Botté et Yann Péchin), et à des sonorités de claviers qui retrouvaient l'esprit des directions musicales les plus intéressantes de sa discographie. Ce fut l'occasion pour moi de me replonger avec plaisir dans des titres comme "22 mai 1968", "Les dingues et les paumés", "La vierge au Dodge 51", "Soleil cherche futur", "Lorelei sebasto cha", "Alligator 427" mais aussi de découvrir de grandes chansons comme "Exercice simple de provocation avec 33 fois le mot coupable", "Sweet amanite phalloïde queen", "Critique du chapitre", "Vendredi 13 à 5h" ou "Confession d'un never been".
Si tout le concert, réglé avec la minutie d'une horlogerie suisse, est impressionnant, on regrettera cependant par moment qu'il ne soit pas un peu plus dépouillé. Probablement construit pour tenir le choc et envoyer du lourd dans de très grandes salles comme les Zénith et Bercy, le son global du groupe écrase tout sur son passage dans un Olympia qui se serait d'avantage accommodé d'un peu plus de finesse de spontanéité et de subtilité. Les morceaux plus intimistes comme "Mathématiques souterraines", "Je t'en remets au vent", "La dèche, le twist et le reste" ou un "Automne à Tanger" nous confortent dans ce sentiment, puisqu'ils charrient de superbes émotions et une vraie intensité. Il faut dire qu'ils laissent plus de place à la voix de Thiéfaine, qui confirme qu'il est un grand chanteur. Sa voix est juste, belle, émouvante et puissante quand il le faut et ne souffre pas une demie seconde de ses 71 printemps. Physiquement, HFT en parait d'ailleurs bien 15 de moins et sa silhouette élancée dégage beaucoup d'élégance, de charisme et de présence ; il tient la scène avec une vraie autorité.
On ne peut pas non plus évoquer un concert de Thiéfaine sans évoquer ses textes. S'ils sont tourmentés, torturés, fumeux et profondément marqués par la poésie de Baudelaire, de Poe, de Rimbaud et de Léo Ferré, ils restent formidablement bien écrits et porteurs d'une poésie singulière ou s'entremêlent spleen, nostalgie, folie, références bibliques et surréalisme. Qui d'autre que lui peut proposer des textes aussi beaux que "La ruelle des morts", "Je t'en remets aux vent", ou aussi alambiqués que "L'ascenseur de 22H43" ou "Alligator 427" ?
Le public, dont la moyenne d'âge est assez âgée, est tout acquis à sa cause pendant les 3 h de spectacle, de la première à la dernière chanson. Le concert se clôturera avec un rappel ou sera forcément joué "La fille du coupeur de joints", la chanson la plus populaire (mais très loin à mes yeux d'être la plus intéressante) de son répertoire, ou le public chantera les churs à gorges déployées.
Cette grand-messe de jubilé consacrée aux 40 ans de la carrière de Thiéfaine fut une belle démonstration de force de son talent, de la profondeur de son répertoire et d'un professionnalisme à toute épreuve où rien n'a été laissé au hasard. Si l'on aurait aimé par moment d'avantage de simplicité, force est de constater que ce concert a donné l'envie de nous replonger dans la discographie où il reste pas mal de chansons à découvrir ou à redécouvrir. C'était donc un bon concert.
Photo : Manu Wino manuwino.com www.facebook.com/manuwino
Critique écrite le 25 novembre 2019 par lol
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