Chronique de Concert
Irina Popovska
Tandis que certains de mes petits camarades de liveinmarseille se retrouvent à l'Embobineuse pour une soirée néo-post cabaret-indus-pop-noise-baroque tendance country-yéyé, je décide quant à moi de poursuivre ma tournée des nouveaux lieux marseillais. Après La Rouille , je m'invite ce soir au Non-Lieu , ou comment transformer un restau italien en une salle de concerts-spectacles. À gauche en rentrant, un petit espace est aménagé pour une expo photo ; de beaux clichés de gueules et de foules en noir et blanc. Et puis on pénètre dans la salle de bal aux colonnades en placo rouge qui donnent à la fois un côté kitsch et un joli charme désuet à la salle. Nini, la grande prêtresse des lieux, veille à alimenter les convives déjà nombreux en chips vertes et autres cornichons russes, tandis que les shots de vodka passent de main en main. L'ambiance décalée à la russe est de mise. François, l'autre tenancier, éparpille ça et là des chaises pour un concert qui promet pourtant d'être énergique.
Et justement, la voilà qui rentre en piste, Девушка (= mademoiselle >> + 1 pour la recherche dans le dictionnaire) Irina Popopvska qui viendrait de la splendide (et glaciale) ville de Novossibirsk en Sibérie, réputée pour ses portraits de Iouri Gagarine aux murs de ses stations de métro et son musée de locomotives à ciel ouvert, comme un hommage au transsibérien qui y fait halte après trois jours de voyage et qui aurait semble-t-il inspiré notre Irina Popovska . Affaire à suivre...
Pour l'instant, on la retrouve accompagnée de son acolyte Serguei Poupoutchenko , qu'on dirait tout droit sorti d'un Kraftwerk version RDA. En tout cas, outre la force tranquille de son charisme glacial, DJ Serguei envoie du bois (son côté prolétaire, vraisemblablement) et passe avec fluidité d'une bande son électronique, certes relativement minimaliste mais chouettement bidouillée, à un accompagnement musical basse ou guitare entre accords, solos résolument électriques et notes plaquées d'ambiance, teintant la musique d'une agressivité punk qui colle déjà à la peau d' Irina . Irina , plantureuse déesse, dans sa magnifique robe bustier à balconnet paillette qui aurait fait pâlir d'envie une Madonna période Like a Virgin .
Elle accueille le public marseillais de son téléphone-micro rose relié à un pad qui amplifie sa voix et prolonge ses "alloooo" cliniques. Et sa voix justement, parlons-en : tantôt susurrée, tantôt gueulée, lascive, rauque ou poignante ; à travers elle, Irina nous fait voyager dans les steppes rongées par le froid et réchauffées à la va-vite par la vodka polonaise. Irina se déchaîne comme une poupée russe mâtinée de Nina Hagen , maltraite même un chien en peluche (RIP Vladimir), taquine les enfants qui rôdent un peu trop près et ventile de son éventail rose ce que cache encore sa robe. En plein milieu, un petit aparté très cabaret nous donne à voir Irina en pleine pause éthylique et contemplative, assise au piano d'apparat, tandis qu'à demi-souffle, le fidèle Serguei dégaine une bande-son de circonstance.
Et puis Irina -Heidi ("Fuck Heidi") se réanime, tourbillonne, plie mais ne rompt pas, nous perce en plein cur de sa voix que la langue russe arrive à rendre, par à-coups, mélancolique. rnEt puis Irina -Martine ("Fuck Martine") nous distille sa propagande, par petites touches "Fuck the crisis, we're here to party" avec un subtil anglais francisé : "This is a song about an omelette , an omelette you know", "I am chauvine , you know" et nous envoie un petit manuel sonore et didactique, ou comment apprendre le russe en trois phrases essentielles en intro du retentissant Kalachnikov . Ma mémoire à temps partiel n'a pas pu tout retenir, dommage, je ne saurais plus dire en russe "les Etats-Unis est un merveilleux pays"... rnAprès une heure de spectacle et comme nous sommes "very very super", Irina et Serguei nous offrent un rappel de deux chansons dont le très populaire Fuck you Kalinka qui finit de mettre en transe le fan-club d' Irina ici présent et de conquérir les autres victimes de la déferlante.
Un sans faute. On s'attarde encore quelque peu au comptoir où l'ambiance cosy et décontractée ne nous pousse pas vraiment dehors, pour affronter les -30° de l'hiver sibérico-marseillais.
Photos by Fred Kodiak
Critique écrite le 21 décembre 2015 par odliz
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