Chronique de Concert
Jacques Higelin + BatPointG (festival Avec le Temps)
Photo : Pixxxo
"Mon espèce est en voie de disparition, je suis l'homme à l'accordéon !" : une phrase qui pourrait résumer à elle seule la prestation du (par trop) méconnu Bat point G (sans pour autant être réductrice, en aucune façon).
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Un show bâti dans la grande tradition des nombreux Rockers Français dits "festifs" des 90's : de l'humour, de l'énergie, un "rien" d'engagement et de la qualité musicale ; le tout augmenté aujourd'hui d'un "flow" en provenance directe du Slam et du récent album (recommandé, pour les fans du genre) : Juste Une Note (Postillon et Crachouillis/2013).
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De quoi chauffer à "donf" (accompagné du très précis et déconnant Mister Tchack/batterie) une salle remplie à craquer et déjà en souffrance, sur ce sujet très précis (une température quasi Africaine, pas un souffle d'air et près d'une quarantaine de personnes forcées d'assister au show depuis le haut des escaliers ou depuis le couloir (portes d'accès ouvertes, pour ce faire). Une chaleur qui occasionnera d'ailleurs certaines défections en "cours de", des débuts de malaises provoquant des replis forcés vers le hall d'entrée, correctement ventilé... lui.
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"Faire juste une note / Une manière de dire non / Arrêtons le carcan des formats de chanson / Faire juste une note / Une réaction d'opposition / Une envie de faire une chanson anti chanson".
À suivre...
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Part II
"Je ne sais pas si, vous, mais, moi... j'aime !"
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Fort d'un récent album d'une grande qualité - à l'image de son prédécesseur Coup de Foudre/2010 - intitulé Beau Repaire, le grand Jacques (présent depuis la veille en vos terres phocéennes) investi la scène d'un pas décidé sur le coup des neuf heures : cheveux au vent (nul/pas un souffle) veste sombre (au diapason de son regard) et rictus d'envie (d'en découdre) fiché de sec au coin des lèvres : "Dans ce monde à la dérive / Barré comme un bateau ivre / Où sont passés les commandants de bord / Et d'abord / Qu'on ait voté pour ou contre / C'est la course contre la montre / Entre les plus faibles et les plus forts / Plus d'accord... (Délire d'Alarme). Un premier extrait durant lequel il ne tarde pas à déserter vite l'micro central pour s'en aller s'asseoir derrière les ivoires du piano : visiblement attiré par lui comme une bimbo par un footballeur ou un banquier Suisse par des valises de marque remplies à "donf".
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Pendant cet intermède de "touches" en Noir & Blanc, le fidèle Mahut (multiples percussions et regard permanent de savant fou en goguette) surveille la gent musicienne qui l'accompagne et veille au grain du rythme, soutenu à l'autre bout par le grandissime Alice Botté (guitares/voix) : toujours aux aguets, prêt à bondir sur le manche au moindre espace (encore libre) laissé pour y glisser de la note à foison : tel le fauve de légende - le tigre en chasse ou le trader aux arrêts (contre la) de rigueur boursière, ou budgétaire.
Photo : Pixxxo
Un premier titre suivi du très printanier et reggae-isant de la rythmique Seul : "Seul le retour des beaux jours et de la saison des amours champêtres / L'alouette et l'hirondelle, le merle et les moineaux / Chantent à tue-tête... le syndrome Trenet, encore et toujours. Histoire de déflorer, encore et toujours, cet abouti et judicieux Beau Repaire, voici que se profile (de l'eau) l'un des sommets du susdit album : La Balade au Bord de l'Eau ; du Higelin pur tannins - toujours un rien rêche, quoique déjà rond, fondu depuis pas mal de temps... - qui commence piano mais ne cesse de monter, gonfler puis rouler et gronder par la suite, tels les flots déchainés lancés à la surface de nos humaines envies bercées longtemps au fil de... l'ô (pas l'Histoire surestimée de même appellation, non, le liquide essentiel qui nous compose en grande partie et nous humidifie sans cesse le "dedans").
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Sortie subrepticement des limbes lointaines et excitées du passé (Alertez Les Bébés/76) J'suis qu'un Grain de Poussière - l'eau, puis le désert, enchaînées dos-à-dos ? Pourquoi pas, après tout... - porté par un duo de fils du vent sec et boisé (basse + guitare acoustique) s'en vient ravir puis combler l'humain (céans) : celui doté de quelque chose entre les deux oreilles, il va sans dire.
Le temps de détailler un brin la scène - bâtie à l'identique d'une antique cave de répét', avec loupiotes tamisées, étuis de guitare alignés, table et établi en chantier - et après une rapide "intro" parlée dont il a le secret, place au mythique et (toujours autant) attendu Paris-New York / New York-Paris : revisitée du rythme, un rien moins Blues "basique", que parfois, par le passé (soit) mais toujours aussi jouissive, effrénée et emballante. Un début de morceau monté un peu de guingois - pour cause de placement de guitare à contretemps du Jacques himself ! - mais qui ne cessera néanmoins de "monter" et "monter" en intensité par la suite, de reprendre peu à peu du poil du fauve (lâché avec son ticket troué à la main !) au fur et à mesure, sous les à-coups acérés d'une section rythmique au taquet (Mr Zaf/basse et Arnaud Dieterlen/batterie) et nanti, en guise de point d'orgue, d'un changement de guitare "en vol" du génial Alice (seul dans son "il", à ce niveau d'excellence) : "Pour résister à l'apathie / Il va falloir beaucoup d'énergie !". Assurément.
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Après une intro axée sur les dégâts de la phallocratie arrogante qui se mue rapidement en un appel à la résistance féminine (sur fond de Femens dénudées, vantées) v'la que s'pointe Rendez-Vous en Gare d'Angoulême : qui sonne tellementHigelin "familière", qu'on se surprend furtivement à se demander de quel album (récent ou passé) elle provient, réjoui et... s'en va. Une magnifique Chanson, plus loin - quoique malheureusement un rien noyée par un rideau serré serré de notes de basse par trop omniprésentes ! - retour à la séminale, sculpturale (vaginale ?) Mona Lisa Klaxon : nantie en outre, du premier solo vraiment "senti" du maître (piano à) queue. "Dans les yeux fous du monstre / Passe une étrange lueur" : pourquoi est-ce que je songe à Poutine (le dictateur, pas le plat typique de même appellation) à ce moment très précis, mystère ; peut-être à cause de celle que j'ai cru voir passer dans les siennes, ce matin, au moment d'annoncer l'annexion définitive de la Crimée par la Russie, qui sait...
Photo : Pixxxo
"Elle avait un grain de folie dans les yeux / Un grain de beauté dans la voix / Un regard d'enfant fasciné par ses démons intérieurs..." : le magnifique Être Là, Être en Vie dédié à la défunte Barbara : amie de longue date du chanteur/poète au regard (toujours) humide (quand il l'évoque). Passant gaiement, d'une femme à l'autre, il nous gratifiera par la suite d'une très longue intro (impro ?) dédiée à sa récente collaboration d'avec l'actrice Sandrine Bonnaire, soutenu de bravitude au piano par le "classique" Christopher Board : un Duo d'Anges Heureux qui irradie la fin de la première face du 33t de Beau Repaire ; une longue, longue, longue intro, touchante et drôle à la fois, revenant sur leur rencontre présupposée à bord de TGV, qui déraillera un brin pour s'en aller égratigner au passage les deux chanteurs/danseurs insupportables (sur scène) que sont (qu'étaient ?) Mick Jagger et Claude François. Des petits "grands" excités en permanence, casse couilles et agités du bocal (complétés de trio par l'ex-locataire de l'Élysée : Nicolas "S" !) suspectés de penser plus à jogger ou frimer, qu'à jouer : courts extraits choisis d'une logorrhée qui aura failli mener une partie du public (hilare) au bord de la fêlure de côtes, rien moins. " Je t'allume / Tu m'éteins / Je te fume / Tu m'étreins / Tu me plais / Je te plains / Tu me plains / Je te plume / Tu me cherches / Je te trouve...".
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Malgré un "balancier" originel difficile à retranscrire de fidélité, live, Le Berceau de la Vie surgira fort opportunément pour situer au mieux les enjeux de la soirée : un appel du pied lancé à la vie, au partage, à la lutte, à la jouissance, à l'harmonie, à l'amour, au présent, au carpe diem, à l'"après"...
En parlant de vie et envies, j'me f'rais bien une p'tite Rousse au Chocolat, moi, histoire que de rameuter mes neurones (d'époque) détruits pour les ramener vers les terres oubliées de passion du Casino de Paris(et Bandol), du Théâtre Antique d'Orange, de Toulon, du Grand Rex (le cinéma Parisien, pas le berger allemand souvent de même prénomation), de Bercy, du Bataclan ou du Zénith... en attendant le Trianon de juin prochain (ultime étape de cette longue, longue, tournée).
La version de Champagne, fut en tout point magistrale - un morceau à faire étudier de force à tout aspirant poète ou écrivain, ou tout du moins, aux lycéens et ados du moment, détruits (im)patiemment du quotidien à la Télé Réalité : son langage ordurier, son galimatias, ses stupides sautes d'humeurs scénarisées et batailles rangées mort-nées, ses enfilades d'ego surdimensionnés nantis de regards absents avec vue sur l'amer ou le... vide ?
Je me demande par ailleurs, si ce n'est pas dans ce dénuement qu'elle porte/sonne le mieux : le maître de toute chose aux cordes vocales et piano, soutenu de paumes de maître par l'âme damnée Mahut (aux commandes des percussions de toutes sonorités et/ou provenances ethniques variées). De quoi tirer le rideau d'une belle soirée en beauté, sans regrets.
Photo : Pixxxo
Impression amplement confirmée par le très dense et très "noir" Irradié : bénéficiant étrangement, ici et ce soir, d'une descente de piano très proche du Riders On The Storm des Doors et d'une rythmique tambours + synthés, lugubre et envoûtante, très proche du Alligators 427 du gars Hubert-Félix Thiéfaine... autre grand lettré et personnage atypique de notre hexagone chantant, tout aussi capable de pondre de la machine à chanter de la variété au kilo (Hallyday, Obispo, Maé, Pagny,) que des individus "décalés" de ce (fort) calibre : moins nombreux, soit, mais ô combien essentiels, tels Manset, Murat, Jipé Nataf, Bashung, Gainsbourg, Lavilliers, Charlélie, Arthur H, Polnareff(des débuts), Souchon, Rodolphe Burger...
Un diamant toujours brut, le Jacques : parfois mal dépoli, parfois rude ou coupant, toujours brillant de mille éclats. Un éternel électron libre, souriant constamment (à jamais ?) à la vie. Parfois : "Perdu comme un enfant, dans l'il du firmament / Prisonnier d'un courant d'air / LE fils de la terre et du vent" ; souvent : "Égaré, insouciant / Dans l'âme du printemps / Cur battant, cur serré / Par la colère / Par l'éphémère, beauté / De la vie..." ; quoique toujours prêt à : "Chanter la folie, la jouissance / L'amour de la vie / digne et jolie", jusqu'à c'que son cur flanche... définitivement !
Photo : Pixxxo
Chansons Jouées :
Délire d'Alarme
Seul
La Balade au Bord de l'Eau
J'suis Qu'Un Grain de Poussière
Paris-New York / New York-Paris
Rendez-Vous en Gare d'Angoulême
Chanson
Mona Lisa Klaxon
Être Là, Être en Vie
Duo d'Anges Heureux
Hey Man
Le Berceau de la Vie
La Rousse au Chocolat
Champagne
Irradié
Critique écrite le 21 mars 2014 par Jacques 2 Chabannes
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