Chronique de Concert
Jean-Michel Jarre (Electronica World Tour 2016)
"T'as vu papa, y'a Jean-Michel Jarre qui passe au Zénith ! C'est dans un an, fin novembre. " "Ah oui ? J'aimerais bien y aller, si je suis pas mort d'ici là !" "Papa, t'as 74 ans mais t'es en pleine forme, tu vas vivre encore au moins 20 ans ! J'essaierai de trouver des places, ça te fera un cadeau de Noël." Cette discussion entre deux fans de Jean-Michel Jarre période années 80, notre père et votre serviteur donc, a conduit à ce nous nous retrouvions au Zénith d'Auvergne à Cournon, pour l'étape auvergnate de l'Electronica World Tour 2016.
La configuration de la salle - pas du tout pleine, loin de là - est en places assises, ce qui peut paraître un peu bizarre pour un spectacle où pas mal de morceaux sont plutôt dansants, mais ce choix a semble-t-il été fait car le public a majoritairement l'âge de l'artiste, qui affiche 68 ans au compteur, et parce que ça permet de vendre des places plus chères, le maximum de 113 euros étant atteint devant le scène dans le carré or, où nous nous trouvons (merci pour les invitations d'ailleurs... ). C'est là, avec une vue imprenable sur la scène et quasiment la tète dans les enceintes qu'on apprécie le début du show 2016 pharaonique de Jean-Michel Jarre, qui entame sa prestation avec les très bons et très planants, The Heart of Noise, Part 1 et The Heart of Noise, Part 2. Tout commence par une semonce de basse, qui défonce les oreilles et donne le ton : si l'on est sensible et si l'on est trop près de la source sonore il faut des protections auditives ! Heureusement qu'on avait prévu le coup pour nous-mêmes et surtout notre géniteur, sinon on avait une mort par arrêt cardiaque sur la conscience ! Bref...
A part ça, le décollage dans le trip de Jarre se fait en douceur avec des nappes de synthés évoquant joliment l'intro de "Shine On You Crazy Diamond" de Pink Floyd. Le son est énorme, les visuels sont bluffants (des murs de Led formant des panneaux d'écrans mobiles sur lesquels sont projetées des images en direct, plus des effets 3D, des lasers etc), et tout cela est immédiatement immersif : on ne sait plus où on habite, où l'on est exactement, on se croit en partance pour une autre planète ! Malheureusement, les titres truffés de synthés aux sons clinquants soi-disant actuels et trop "Boum boum bas du front" à notre goût comme "Automatic, Pt. 2", "Circus" ou "Stardust" viennent un peu casser le truc. Pour nous seulement, le reste du public, composé de fans, semblant apprécier, à sa manière, assez discrète... Clairement, au niveau de l'ambiance, on n'est pas en été à Barcelone lors du week-end du fameux festival Sonar (où Jarre a joué en juin), mais bien un lundi du mois de novembre prés de Clermont-Ferrand !
Cela dit, malgré quelques incartades en territoire consensuel et jeuniste, avec également quelques discours sympathiques mais cassant le rythme, celui dont la réputation de mégalo notoire n'est plus à faire, s'en sort plutôt bien dès qu'il dégaine en compagnie de ses deux musiciens multi-instrumentites ses "tubes" compatibles avec le 21ème siècle ou ses titres récents les plus réussis. Donnant la sensation de flotter dans l'espace, "Oxygène 2" est un pur bonheur, comme les interprétations trippantes d'"Equinoxe 7" et de "Souvenir de Chine" d'ailleurs. Réalisé avec la participation du précieux lanceur d'alerte Edward Snowden, "Exit" fait forte impression dans le registre "bombardement de bleeps". Comme l'entêtant "Conquistador", une collaboration avec Gesaffelstein, ou le stratosphérique et bien nommé "Zero Gravity", fruit d'un travail en studio avec Tangerine Dream. L'un de nos moments préférés étant sans aucun doute "Oxygène 4", qui nous rappelle de très bons souvenirs adolescents passés à rêver devant les méga live de Jarre dans des lieux plus exotiques et gigantesques les uns que les autres.
Aux manettes derrière son futuriste pupitre, le chef d'orchestre synthétique Jean-Michel Jarre fait le show avec tout un tas de trouvailles spectaculaires, comme ces lunettes qui filment ce qu'il joue ou quand il empoigne une guitare électrique pour un final avec larsens, mais aussi des passages déjà cultes comme la partie où il se saisit de son légendaire synthé guitare, ou encore le point d'orgue du set, la mythique harpe laser, qui cartonne toujours autant, même s'il paraît que tout est "fake". Vers la fin, et à la demande expresse de l'artiste, le public finit par se lever et danser devant la scène, ce qui fait enfin décoller l'ambiance. Les défauts inhérents à ce type de concert - en forme de machine à remonter le temps et à faire du fric - passent au second plan, l'énorme spectacle proposé par le fringuant sexagénaire en mettant vraiment plein les yeux et les oreilles, autorisant à passer d'assez inoubliables instants hors du temps et des modes. Idéal pour faire plaisir à de vieux fans (comme notre père, ravi et toujours vivant, rassurez-vous !), ce concert est à voir au moins une fois dans sa vie si on est fou de synthétiseurs ! Et pourquoi pas lors de la tournée des festivals prévue en 2017 ?
Photos : Yann Cabello (album complet ici) www.yanncabello.com, www.facebook.com/yann.cabello.7, twitter.com/YannCabello, instagram.com/profocus63...
Critique écrite le 05 janvier 2017 par Pierre Andrieu
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