Chronique de Concert
Keith Richards Overdose + A Date With Elvis
Jolie proposition artistique que ces Nocturnes de la Friche Belle-de-Mai : avant 22 heures, on peut monter sur les toits et dans les expositions (qui tournent désormais assez vite pour qu'on puisse y aller presque une fois par mois), après c'est concert autour du restaurant du lieu, les Grandes Tables de la Friche, un fort bon rapport qualité-prix et un personnel assez sympa. Bon, hier soir c'était pas le moment d'y manger ni même d'y boire un verre, ils étaient complètement dépassés (en tout cas, au bar). Mais les scènes, une dehors sous la passerelle (ambiance Dock des Suds avant travaux) et l'autre dedans dans le resto, derrière un rideau de cordelettes (ambiance "Ce Soir Ou Jamais") étaient fort joliment installées toutes les deux. J'ai entendu sans problème le premier accord de guitare alors que j'étais au bout de la terrasse, un étage plus haut. Ouch ! Manifestement "on" n'était pas venus jusqu'ici pour vendre des cravates.
J'avoue que j'étais curieux de voir si on allait pas se retrouver à trois pelés à ce concert. Parce que faire sortir les Keith Richards Overdose des caves suintantes où ils se plaisent habituellement, c'était déjà quelque chose, mais trainer en plus la galaxie rock de Marseille avec eux... c'était pas gagné d'avance. Et finalement, si : les masochistes habituels de l'acouphène étaient tou(te)s venu(e)s, une fois encore, se faire scalpelliser l'oreille interne par ces joyeux artificiers du rock'n'roll joué tout à fond. Mélangés au public "cultureux" du lieu et avec une pointe d'habitants du quartier, ça faisait une jolie petite troupe devant la scène quand le beau brun au regard fou (descriptif entendu dans la foule) et ses sbires ont balancé la purée, et une petite foule qui y est restée tout le concert !
Chroniqués dix mille fois ici, vous savez probablement déjà qu'on les kiffe grave, notamment parce qu'ils jouent du rockabilly ultra classique avec un son punk rauque. Ils sont déjà naturellement bruyants donc, mais avec cette scène et comme tout groupe qui joue entre deux planchers en béton, ça sonnait vraiment très fort, je dirais "métallique", malgré les efforts louables (et audibles !) de leur Ingéson pour améliorer la situation en cours de route. Au contraire par exemple, dans le même genre, d'un concert des Cowboys from Outerspace aux Docks des Suds il y a environ 10 ans, dont je ne me souviens que comme d'un long tunnel de bruit blanc, migraine et saignement de nez... Ce son brut décoffré avait en tout cas l'avantage, pour les gens qui ne les auraient jamais vus avant, de rappeler leurs glorieux débuts à la regrettée Enthröpy, où la scène trop étroite les obligeait comiquement à jouer de profil...
une fois tombé la veste, le chanteur est monté dans le rouge, s'en donnant à coeur joie sur des titres de plus en plus furax (selon une jolie progression et même si de l'aveu du guitariste, ils n'ont pas toujours tous joué le même morceau au même moment). Les autres membres du groupe ont fait preuve de leur flegme habituel (le bassiste n'ayant même pas tombé l'écharpe) pour suivre leur fantasque leader. Que ce soit leurs fumantes compositions néoclassiques (Alligator, Chain Reaction etc.), ou leurs quelques fantastiques reprises (Going Home, Hippy Shake), ils ont tout fait avec classe et fougue et le public les a naturellement suivis dans leur prêche halluciné. Y'a comme ça des groupes avec lesquels il suffit de laisser l'effet se faire. As good as ever : bravo & à bientôt de retour sous terre, messieurs ?
Le groupe suivant, A Date With Elvis avait coché toutes les cases de la checklist des trucs qui m'agacent. Un nom frimeur/branché, un chanteur poseur gominé à mèche en costume cintré (toute une apparence raccord avec leur nom), ce nom écrit en très grand derrière eux, le micro vintage et cerise sur le gateau, une appréciation négative 5 minutes avant le concert par un ami qui les avait déjà vus. Conjugué à la queue toujours pénible au bar qui ne servait plus que de la pisse batave de chez Heineken, et à la perspective de garder mon gniard seul toute la journée du lendemain, j'aurais pas parié que j'allais rester plus de 5 minutes. Et pourtant. Déjà, le son beaucoup plus policé dans cet endroit, servait admirablement le propos. De belles guitares, de beaux effets bien maîtrisés : la moitié du boulot était déja faite, un vrai baume pour nos oreilles encore un peu douloureuses.
Ensuite, dans un autre style que les précédents, la même efficacité totalement imparable au bout de trois chansons ! Par exemple, ont fait piétiner furieusement tout le public sur un morceau a environ un seul accord (Let me go) ?, mais super prenant ! Ou bien, ont sorti un riff "Them-like" (style Baby please don't go) qui a rendu tout le monde dingue. Bien sûr, ils ont beaucoup écouté Jack White en général, les White Stripes en particulier : un univers de duo guitare-batterie clairement référencé. Mais ça n'explique pas la petite touche "Prince" supplémentaire du chanteur (physique et vocale !), qui les éloignait du blues pour les rapprocher subtilement d'un son plus groovy, plus sautillant, appuyé sur sa voix intéressante et variée.
Enfin, des chansons comme ça, bien écrites et bien jouées, avec de la Gretsch joliment distordue, on peut en écouter 50 d'affilée sans problème. Et puis il s'est même avéré que les deux gars ne la ramenaient absolument pas, bien au contraire ! Leur attitude modeste et souriante a fini de me convaincre que ma checklist de préjugés était bonne à mettre aux chiottes, concernant A Date With Elvis. Pour pas un rond, ils nous ont donné un meilleur concert que le très surestimé Hanni El Khatib il y a quelques mois... Même si un craquement persistant dans le son à la fin a peut-être écourté leur set, ils ont fait l'unanimité dans l'échantillon représentatif des 4 ou 5 potes interviewés après. Alors notez leur prochaine date et allez-y sans faute avec toutes les filles qui vous ont trainé voir le bellâtre californien, ça leur apprendra un peu, non mais.
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Critique écrite le 26 avril 2014 par Philippe
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