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Chronique de Concert

Klô Plegag + Chevalrex

Klô Plegag + Chevalrex en concert

La Gare - Maubec 24 janvier 2015

Critique écrite le par

Les salles de ma région me gâtent décidément en ce début d'année. Après La Meson, c'est La Gare du Coustellet qui m'offre sa toute nouvelle déco et ses sourires ! Nouveaux aménagements pour les locataires de passage, nouveaux aménagements pour le public, équipe d'une amabilité comme dans les notices... La Gare vous fait de l'oeil dès que vous franchissez son seuil. Et si ça ne suffit pas à vous faire fondre, je ne saurai trop vous conseiller de prendre le temps de déguster avant les concerts, dans la verrière et en compagnie des bénévoles et des artistes, le repas mijoté sur place. Personnellement, mes papilles se remémorent encore leur dernière blanquette de veau et leur île flottante maison... hemm, enfin, bon... reprenons.


On était déjà tous sur notre petit nuage après ces plaisirs conviviaux et culinaires, c'était sans compter les concerts eux-mêmes, qui ont fini de nous extirper de la surface de la planète pour quelques heures.

Chevalrex, alias Remy Poncet dans le reste de sa vie grouillante (graphiste ? producteur ?...), nous chope à froid avant même que l'on ait pu dire que couic, avec une curieuse alchimie de musique minimalisme à base de boite à rythmes, de guitares et de mini-bugle, agrémentée de morceaux de machins et de trucs sonores qu'il déclenche à son bon vouloir à l'aide d'un sorte de magnétophone brandi à tout-va.


Le tout dans une énergie et un rythme bluffant pour ce garçon aux faux airs de gendre idéal et qui nous livre une voix chantée ou un phrasé-parlé trompeusement calmes et posés, et les évocations des méandres des premières heures de l'âge adulte (" Je sais j'ai perdu la terre / mais j'n'ai pas perdu la raison / j'entends très bien de là-haut / la voix de ma mère / qui m'demande si c'est plus beau d'là haut / à travers mon hublot / si j'aperçois dans l'jardin / le chat des voisins ", Mon Hublot ; " Paraît qu'la vie sur terre est un mystère / Mais j'reviendrai demain / troquer mon pull de célibataire / contre une tunique de libertain / voir s'il fait beau sur mon pays / et dans les yeux d'Emilie ", Seconde Main).

Le boulimique Chevalrex, dans une curieuse transe à mi-chemin entre une lutte et une capoeira au milieu de son attirail, ne laisse place à pratiquement aucun temps mort, comme s'il voulait tout nous montrer, tout nous faire écouter, tout nous dire dans le temps imparti (et nous laisse par la même occasion bouche bée). Le résultat est une atmosphère de quasi cinématographie musicale à la frontière entre Mathieu Boogaerts, Dominique A, Cocorosie et Nouvelle Vague.


Dans la quasi foulée, toute l'équipe de Klô Pelgag débarque d'on-ne-sait-où, grimée et déguisée à souhait. Elle-même dans une grenouillère improbable, son contrebassiste dans une tenue Empire Contre-Attaque baroque, son batteur couvert de ‘strips' nasales, ... personne n'aurait été étonné si on avait placé de petites hélices sur les casquettes bariolées des musiciennes en robes blanches... Un peu comme si les glaces québécoises avait recraché tout d'un coup toute la chambrée des frères et soeurs de Peter Pan dans notre bas monde.


Klô Pelgag révèle sur scène un concentré de folie et d'humour pince-sans-rire, des mains qui volent littéralement sur son clavier, et une voix qui fuse, ici étranglée, là rauque, et qui se termine en arabesques vocales. Un don mélodique certain, accompagné, outre d'une section rythmique de batterie-à-interner et contrebasse-à-lier, d'un trio de cordes parfait, vraisemblablement gage de sérieux ... et d'exubérance mêlée, les trois jeunes filles n'étant pas les dernières dans la bonne humeur générale. On aura droit à tout : au tour de magie, aux figurines de Batman, à la boite de Docteur Maboul qui circule autour de la scène... (on peut bien révéler ces détails sans crainte de briser l'effet de surprise, je gage que tout est différent à chaque date).


Pour qui ne connaît pas Klô Pelgag (à l'image de votre serviteur), on ne parvient pas tout-à-fait à savoir de qui du lard ou du cochon, tant l'ensemble porte, sans ciller, des textes soufflant le chaud et le froid, mais d'une poésie paradoxalement délicieuse (" tu as grandi dans un arbre / trop grand pour perdre une feuille / trop petit pour un cercueil / c'est un arbre épouvantail ", Le silence Epouvantail ; " Je l'ai connue en fièvre vers la fin de sa vie / il lui arrivait de disparaître dans la maladie / mais elle revenait toujours dans sa vie alitée / je l'ai connue en fièvre vers la fin de sa vie ", La Fièvre des Fleurs). Et avec toujours ce même sourire innocent type " ben-quoi ? " et avec, de surcroît, l'accent québécois qui n'aide pas à distinguer le vrai du faux... à moins que ce ne soit l'inverse. La vie serait-elle bien plus acceptable avec un brin de folie ?

Quoiqu'il en soit, le tout est réellement jouissif à voir et à écouter. Une heure et quelques de lâcher-prise, avant de refermer le livre de contes, et de ressortir de la salle.


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