Chronique de Concert
Louis Ville
Être ami avec Pirlouiiiit, le photographe de concerts le plus prolixe de Marseille (sinon de France), présente des avantages et des inconvénients. Un gros avantage par exemple : quand il organise un "concert à la maiiiison", rare moment intimiste avec un artiste, il vous en parle. Un petit inconvénient : malgré son dispositif complet de captation du concert, et malgré qu'il ait plein de choses à raconter (cf le concert précédent, de David Lafore), vous le savez bien, qu'il demandera une chronique en retour !
Alors qu'on a pas pris de notes pour ne pas se faire remarquer, et qu'il n'y avait pas de set-list à ramasser ! Qu'à cela ne tienne, il y en a assez à dire comme ça sur Louis Ville. Déjà, qu'il a une dégaine d'artiste buriné, façon pistolero : le genre d'image mentale que je me fais du personnage de Vernon Subutex de Despentes (très bon, mais trop jeune, joué par Romain Duris...) : une présence naturelle et attachante, un peu fatiguée peut-être, mais suintant la musique par tous les pores.
Ensuite, un jeu de guitare aussi précis que sans ostentation, du simple accompagnement en picking étouffé de ritournelles, au jeu plus abrasif avec bottleneck et en open-tuning pour des morceaux plus rock ou blues, au fil de trois guitares piochées avec gourmandise. Savoir chanter et jouer de la guitare en même temps, c'est assez courant, mais exceller dans les deux à la fois, sans jamais la moindre once d'esbroufe ou de gras ni sur l'un ni sur l'autre, ça l'est déjà bien moins...
Et surtout, Monsieur Ville a d'abord une voix. Est d'abord une voix. Une putain de voix ! Merveilleusement polie par les années, sans doute par le tabac et peut-être par d'autres choses (Wikipedia le classe comme ancien punk, ça ouvre des perspectives, même s'il carbure désormais au Pac à l'eau...). Une voix caressante et claire quand il la laisse couler de source, déchirante et rapeuse quand il la pousse dans ses retranchements.
Comme un chaînon manquant entre (...dans l'ordre où il m'y a fait penser) Arno pour le timbre et la puissance, Jacques Higelin pour la virtuosité, voire Arthur H. pour certaines gravités. Ou même Daniel Darc pour certains propos crus, dits avec l'air de rien, et pour le petit côté poète maudit. Une de ces voix qu'on écouterait vous lire le bottin, en somme. Avec tout ça, même sans pratiquement le connaître sans doute (tout comme moi), il tient déjà toute l'audience dans sa main en quelques minutes (les minuscules ayant pour la plupart filé galoper à l'étage), d'autant qu'il est d'une compagnie tout à fait agréable, modeste et marrante à la fois.
Parmi les chansons marquantes (mais comme dit, la plupart l'étaient) : celle sur sa rue et son amoureuse qui y habite (chanson qui m'a trotté dans la tête un bon moment après), celle sur les "clac-clac-clac" de serrures qu'on entend en prison, une reprise de la Calle de Manu Chao (sa voix faisant des miracles en espagnol aussi). Ou une chanson d'amour poignante, qui parlait d'être non plus deux, mais mille... Ou encore celle qui se moquait des bla-bla politiques... Et puis, la chanson de la tartine, 4 vers dignes d'un Renaud jeune, qu'on lui a fait bisser. Oui, avec une set-list, j'aurais été plus précis, c'est sûr !
Fin d'après-midi délicieuse donc, merci, terminée par un apéritif fort sympathique (et déjà, repousseur de cette saloperie qu'on appelle le dimanche soir !), où l'artiste était évidemment très disponible, et avec des disques à proposer. Par contre, après avoir interrogé la demoiselle qui l'accompagnait, puis Louis Ville lui-même, je n'étais pas plus avancé, sur lequel des 4 choisir...
J'ai donc pris Le Bal des Fous, comportant la plupart des titres qui m'avaient le plus plu, ainsi qu'un accompagnement léger, comparable à celui de ce soir. Je vous les recommande tous les deux : ce disque, mais surtout cet artiste, à (re)découvrir !
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Critique écrite le 26 novembre 2019 par Philippe
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