Chronique de Concert
Lucio Bukowski & Oster Lapwass + Les Envahysseurs
Les Envahysseurs from Marseille débarquent à deux MC et un DJ qui pose l'ambiance avec la bande-son de la célèbre série quasi éponyme à un grec près ; ils envoient une demi-heure de beats oldschool teintés de groove et de soul sur un flow engagé entre ping pong et clash, maillot de l'Ajax et polo blanc en vitrine.
La sauce prend, le feeling passe 5/5 en mode bouillant quand la trap vient remplacer le beat à l'ancienne. Après avoir "chargé notre atmosphère", les Envahysseurs laissent la place après quelques minutes de flottement à Oster Lapwass qui vient tranquillement installer son matos : un laptop et un sweat aux armes de l'Animalerie, une teille d'Havana Club et deux de coca pour un bédo laser ; les munitions sont prêtes.
Le beatmaker balance un son electro et fait monter la pression "Du bruit pour Lucio", gimmick qu'il répètera tout au long du set et qui trouvera son écho jusqu'à la dernière goutte du show. Justement, le voilà qui débarque, Lucio Bukowski et ses trois bouteilles d'eau minérale, le regard posé, l'aura sereine mais la verve acérée, implacable. Bukowski aka littéraire surdoué de l' Animalerie, le collectif de rappeurs lyonnais qui sévit depuis le début des années 2000. Avec comme noyau dur et pendant complémentaire Oster Lapwass, qui à mesure que les un, deux, trois, quatre et cinq verres de rhum coca s'enchainent, se déchaine derrière ses instrus spécial Requiem, un piano "version Mozart" ciselé d'electro qui tire vers la drum'n bass où les nappes enveloppantes se drapent d'une grosse basse lourde qui vient, en ménageant ses effets, scalper la salle.
Détaillant entre autres D'un blues l'autre, Le Sphinx, Les faiseurs d'illusion sortent des lapins morts de leurs chapeaux ou encore le cathartique Donuts, Lucio, droit devant son micro, caterpillar et bonnet, assène punchlines poétiques, jeux de mots droits-au-but et explorations existentielles, avec toujours le fil rouge d'une narration ultra immergée, entre regard réaliste sur l'existence et la danse rance de ses épreuves, et références parsemées. C'est ainsi qu'on rendra hommage à Franck Mickael -qui "comptabilise 4 sur l'échelle de 2Pac qui lui-même comptabilise 4 sur l'échelle de 2Pac" et qu'on saluera au passage Jean Pierre Melville avant de faire une pause mentale sur la trame "le silence est un refrain que je connais" ( Ogni giorno è la scuola ).
Lucio fait baisser la lumière et élève l'horizon, cultivant un côté poète maudit qu'il envoie valser dans une déferlante d'humour entre deux flows et curs avec les doigts de petites fans sous le charme. Ce qui n'arrive pas à détourner le MC du droit chemin, poursuivant sa croisade poétique. Les ectoplasmes sont abattus par des balles à blanc ( Reliquaire ) et pendant ce temps là, Oster siffle son troisième verre. Le "meilleur beatmaker 2016 selon Bonnet (Poney ?) magazine" s'éclipse en coulisses le temps d'un poème d'une vingtaine de minutes qui nous laisse en tête à tête avec Bukowski l'écrivain. Texte sur pupitre, il s'assoit face à un public captivé, quoiqu'un peu dérouté par la longueur du monologue, et s'envole dans une rêverie urbaine blasée option cynique, distillée en bribes contemplatives et slogans poétiques. "Nous nous colonisons" ; c'est le monstre ordinaire qu'il décrit : celui que nous côtoyons tous pour parfois l'incarner. Le remède ? "Écrire encore".
L'instru se fade en un cur qui bat et Lapwass plus joice que jamais réapparait du rideau, s'emmêle dans ses instrus, trompe l'il avec du "faites du bruit", échange des vannes avec Lucio sous fond d'electro speedé avant d'enchainer sur une instru sombre et massive "à la Vald" qui feature aussi dans l' Animalerie. Puis il emprunte les notes dissonantes d'un clavier à la Stromae pendant que Lucio rend hommage à la Stella Artois et à Pablo Neruda dans Mon Ardoise .
Puis la salle est plongée dans le noir pour un dernier track sur une instru sweet comme une parenthèse enchantée, avant un final sur fond d'au revoir présidentiel version Lucio Giscard d'Estain. Le premier rappel s'ouvre sur une démo de flow magistral : "et puis je me rends quand le soleil arrive", nouvel extrait à demi éponyme de son dernier opus ( Nativité ) et annonciateur d'un départ imminent, le duo est rattrapé par une nouvelle vague de rappel chaud bouillant d'un public qui ne veut décidément pas couper le fil.
Les lights stromboscopent façon boite de nuit, la basse grasse alimente le dancefloor speedé jusqu'au climax fumée opaque et Havana.
Coup de grâce et grande classe. On a envie de poursuivre l'afeuteur, mais l'heure tourne et les métros s'épuisent. Alors comme on ne peut pas être au détour et au Moulin, on s'éclipse ; ça tombe bien, les portes sont grande ouvertes sur les flaques de goudron. L'air glacé nous fige, mais les lyrics qui s'ébruitent dans nos souvenirs nous font l'effet d'un rhum coca bien tassé.
À retrouver là (entre autres)
> https://soundcloud.com/lesenvahysseurs/les-envahysseurs-ou-est-charlie
> https://soundcloud.com/oster-lapwassrnrnrnrnrn
PS : yo no soy photographe ; les photos ne sont que des captures d'ambiance à l'arrache. Cimer pour la compréhension compréhensive.
Critique écrite le 04 février 2018 par odliz
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