Chronique de Concert
Mr Marcaille + Child Bites
Sagouin,e, n.m. : enfant, personne malpropre, grossière. Mr Marcaille est l'incarnation du mot "sagouin", comme on pouvait le supposer à lire les chroniques précédentes, mais il va falloir patienter encore un peu pour s'en rendre compte.... Je me pointe ce soir-là à l'Embobineuse, où je ne viens décidément pas assez souvent (dernière fois - Thee Oh Sees, juin 2012, rien à voir !), à 21 h 25 pour un concert annoncé à 21 h. Et les tauliers très aimables ont la gentillesse de ne pas pouffer en m'annonçant que je suis la première entrée de ce soir... On me rappelle que c'est une bonne heure plus tard en principe que ça se passe, dans ce haut lieu culturel certifié ni In, ni Off, mais juste Out of Marseille Provence 2013.
J'attends donc gentiment, un magazine à la main, écoutant de la bonne musique dans l'esprit de ce qu'on va voir ce soir-là (par exemple : Apocalyptica plays Sepultura by 4 cellos, Chaos AD jouée aux cordes, 1997, toute une époque !!). Mais en l'occurrence une heure après l'heure, c'est un type au costume improbable qui vient faire un discours non moins improbable, bourré de private jokes manifestement (une fille s'étrangle de rire tout du long, au point qu'on l'étranglerait bien tout court) : il semble être très drôle pour 4 à 5 personnes et juste supportable pour les autres. Ses blagues vaseuses sur le nom Child Bites ne m'auront même pas fait sourire, même après les 3 bières bues pour passer le temps. Bref, je passe à côté, dont acte, ça ne m'était pas destiné non plus !
Heureusement, IL finit par arriver sur scène, le petit sagouin en question ! D'abord, se mettre en slip pour être à l'aise, se rincer à la bière, roter un bon coup, chausser ses deux caisses (une à chaque pied), son violoncelle et son micro : Mr Marcaille est un, accrochez vous à votre slip vous aussi, one-man-death-metal-band ! Tout est dans l'intitulé : à lui tout seul, l'affreux jojo petit, gros, hirsute, suant, crachant, et pas nécessairement propre par ailleurs, fait autant de raffut que le groupe Slayer tout entier ! Et il est absolument réjouissant de le regarder et de l'écouter ! Maltraiter son cello (mais pour en tirer des riffs rythmés et musicaux, hein !), trépigner furieusement dans ses caisses et assez rapidement, se mettre à hurler comme un possédé (la partie la moins musicale du truc, comme souvent dans le death metal)...
Et entre chaque morceau, se lever pour nous toiser d'un air mauvais, éructant diverses insultes, vomissant même un peu à un moment, histoire de faire de la place. "Good food in : good food out !" philosophe-t-il alors, avec un certain à-propos. Il réussit aussi une figure technique de haute volée : cracher un molard au plafond, et rattraper dans la bouche la partie de celui-ci qui retombe en filin. Très impressionnant ! Une fille en extase, n'y tenant plus, s'écriera alors : "mais... c'est l'idéal masculin !", récoltant juste un grognement de la Bête mais les rires francs du public, le mien y compris.
Mais hey, outre le spectacle très distrayant : musicalement quand même, ça assure ! A en relire mes notes : "batterie tribale sepulturesque, riff violoncelle tuant, c'est magnifique" : Mr Marcaille déboîte et en plus, il est super drôle. A noter par exemple La balade de Jimi Hendrix, de deux secondes, dont je peux citer les paroles de mémoire (vomies) : "He's dead !". Mais aussi, des chansons très écrites sur des sujets comme "pendre le pape par les couilles" (Lequel, demande quelqu'un ? Tous, répond-il !), ou bien "sur les plafonds, parce que y'en a quand même beaucoup"... Je repense fugacement que j'ai endormi mon fils en début de soirée avec Gare au Gorille : que penserait Georges Brassens d'un tel personnage ? Nul doute qu'il lui plairait, au moins un peu : c'est un vrai pornographe des temps modernes !
Un passage notablement plus lent dans le concert (mais pas moins hurlé), en hommage à Satan, suit : pour le coup on pense aux élucubrations sinistres de Sunn O))) et on se dit que le sire Marcaille est quand même plus rigolo à regarder que les moines du drone metal. Chanson terminale, Andre The Giant, titre assez formidable dédicacé à un oncle catcheur, et défunt, du chanteur : si c'était un type avec la gueule torve et la hargne de Marcaille, mais avec en plus une taille de géant, il a du faire trembler ses adversaires ! Puis un rappel, encore hurlé et sympa, et l'artiste finit, avec à-propos, en montrant son cul à l'assistance qui le réclame depuis un moment avant une courte reprise unplugged de A la Queue-leu-leu. Prestation jubilatoire, à la fois visuellement dégueu et techniquement très impressionnante.
3 vidéos à voir impérativement en fin de chronique, pour vous donner une idée d'un spectacle quand même hors du commun...
En comparaison, les Child Bites from Detroit, sans être antipathiques (ils ont passé tout le concert précédent à éructer de joie dans le public), sont vachement moins drôles, et leur musique moins fun aussi. Déjà, ils commencent à la minute où j'allais partir : je me donne donc trois chansons. Hardcore avec des structures complexes, c'est du metal "intello", très bien exécuté mais potentiellement un peu ... chiant. D'ailleurs le public (qui mourra sans doute plutôt que de vous l'avouer après coup) s'emmerde clairement, à quelques exceptions près (les plus perchéEs). De plus le groupe joue 4 ou 5 fois plus fort que son prédécesseur et pour le coup, à environ 50 % au-delà des 105 dB de la règlementation (un peu bas, eux) : on souffre quand même et on recule un peu, prudemment.
Quand ça commence à me faire penser (selon notes) à "de la Oï jouée plus vite et plus fort" - autant dire, c'est quand même pas du Mozart - je décide de m'escaper après 4 morceaux. Je pense avoir saisi l'idée de ce groupe très velu mais pas aussi plaisant dans le genre pileux que, par exemple, Mastodon. On retiendra quand même les super looks barbus hipsters de ces américains, mais ça ne vaut pas la subtilité de nos Conger ! Conger ! locaux, qu'il a fallu zapper ce soir... Le gros défaut rédhibitoire de Child Bites, je le comprends en partant : on ne peut pas suivre leur musique avec la tête et le metal sans suivre avec la tête, c'est quand même pas aussi chouette.
Très belle soirée quand même, puisque je ressors de là sourd, bourré et heureux. Merci l'Embobineuse et à bientôt j'espère.
Photos dégueu (comme le sujet), voir plutôt 3 vidéos par ici !
Critique écrite le 02 avril 2013 par Philippe
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