Accueil Chronique de concert Nacimiento - The Waves - Iynx
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Chronique de Concert

Nacimiento - The Waves - Iynx

L'Usine - Istres 14 mai 2007

Critique écrite le par

Il aura fallu 13 sessions de 3 groupes pour en arriver à cette fameuse "finale" de l'édition 2007 du respectable tremplin de l'Usine istréenne : au menu, trois formations qu'un "Monsieur Loyal" nous présentera comme "toutes dans le même style (Rock electro, rock FM, et...rock, nous précisera-t-il)...." avec un aplomb surprenant : quand on sait que le duo de Iynx lorgne du côté d'Asian Dub, que les Waves assument une fusion metal tout droit issue de la scène américaine des 90's, et que Nacimiento évolue dans un registre très typé "pop anglaise indie" avec son double chant et son violon , on peut se dire que le gars a dû manquer un épisode... Mais bref, ne décrions pas un des dispositif de région auquel on a même pas envie de coller l'étiquette de "tremplin" tant ce serait réducteur vis-à-vis de l'arène du Café-musique de l'Usine, petite perle architecturale et acoustique : l'esprit de la "compétition" qui s'y déroule tous les ans à coups de Mardi soirs gratuits y est séduisant, la sélection rigoureuse, et les palmarès révèlent bien souvent de splendides projets musicaux. Bref, trêve de compliments et place à l'ambiance du jour.

Audience ? Clairsemée. Tendance ? melting pot de hardos tatoués en bas de treillis bien alcoolisés, de jeunes filles techno-hippies légèrement collées, de demoiselles aguichantes un peu classieuses et de trentenaires neo blasés qui aiment hocher la tête ou taper du pied avec un air entendu. Quizz : qui vient pour écouter quoi ?...

Bon, c'est à Nacimiento d'ouvrir le bal : avec une intro en crescendo ils plantent le décor : ce sera romantique, un peu torturé (dans le son aussi d'aiileurs, quelque chose de grave avec un petit côté "goth" en plus rude dans le mix qui ne va pas sans me déplaire) et assez en retrait. Le set s'oriente petit à petit vers ce mélange qui fait la foce de Nacimiento, entre titres franchement pop, presque sautillants (même les hardos, encore un peu plus chauds que tout à l'heure, se laisseront aller à quelques pas de danse mi-moqueurs mi-excités), d'autres bien plus indie avec des questions-réponses entre passages rock "à la Bloc Party" et des couplets très sombres "à la Pavement", et ces envolées electro-rock oscillant entre Depeche Mode sous saturation et le côté arty des Kills...
Le tout est saupoudré aussi bien de ce violon intelligent qui trouve toujours sa place pour élever le tout avec un naturel planant, une galerie de guitares rutilantes et une rythmique parfois brinquebalante mais joliment farouche, entre l'homme au bonnet qui tient une basse profonde et ce chauve flegmatique qui massacre ses toms à coups de hache. Les deux voix se complètent à merveille, les quatre garçons ont ce côté "je fais craquer les filles", et ma foi, un show lumière qui se réveille sur la fin avec pertinence vient pile poil mettre en exergue un final assez sciant à coups de stromboscope. Ouaouh.

Changement de plateau dans un gros quart d'heure syndical, et The Waves rentre sur scène; on ne tarde pas à reconnaître le chanteur et le guitariste des feu Nefesh, accompagnés du bassiste du feu Kollectif K : faut s'attendre à du niveau... Et on est pas déçu : dès le premier titre, avec sa Washburn "Nuno B.", le guitariste donne le ton. Le son est ENORME (aie, encore oublié mes bouchons, damned !)et chacun des quatre trentenaires prend sa place au coeur d'une machine de guerre parfaitement maîtrisée : on passe en un éclair en revue toutes les "légendes" du genre, d'Extreme à King's X en passant par Living Colour, Incubus, Faith No More et consorts, et ma foi, ça le fait grave. Je ne connais pas ce batteur qui est loin d'être en reste, mais tout ça bastonne avec une classe légèrement body-buildée très très "américaine", qui finit même par faire échapper ce "thank you" ridicule au hero-chanteur dans son micro H.F. Le matos sur scène témoigne d'une volonté de placer la barre très haut, ce qui est chose faite, et forcément, on change, en même temps que de registre, de niveau. Pourtant, y'a un petit quelque chose qui coince : les 90's ne seraient-elles pas encore un peu trop proches pour tenter ce "revival" audacieux qui frise le has-been ? On est ni dans le stoner 70's, ni dans le glam metal 80's, mais bel et bien en plein coeur de cette fusion 90's pleine de "demo attitude", excitante à souhait en son temps, mais au final quelque peu dépassée... Aie. Dommage : pour tant de virtuosité, de maîtrise et de classe, une véritable originalité dans la création et les compos aurait certainement permis à The Waves de séduire à grands coups de claques là où ils restent obstinément dans le "on joue à la...", "le riff à la comme...", et "le pont du chant version...". Un peu du gâchis, pour moi.

Nouveau quart d'heure de chngement, et place au duo des Iynx, tout droit descendu de Clermont-Ferrand !!!. Putain, rien que de s'être tapé la route pour jouer à sec dans un "tremplin" à Istres mérite d'emblée le respect !
Sur scène, un batteur casquetté à l'air mauvais et un jeune garçon cravatté tout de noir vêtu, guitare en bandoulière et mèche rebelle sur gueule d'ange. En trois minute, là aussi ça donne le ton : il se dégage de ce garçon une énergie positive totalement incroyable, il déverse physiquement un tel plaisir de jouer, une telle énergie, une telle passion qu'en deux temps trois mouvements tout le monde est conquis. Le public se resserre, s'agite, puis danse, et on plonge dans 40 mn de folie batteristique sur fond omniprésent de samples ethniques mâtinés de tablas et autres percussions obsédantes : le grand panel des rythmiques drum&bass est parcouru, tandis que sur scène, dans la salle, sur les côtés, en haut, en bas, ce sémillant guitariste bondit comme un diable en martelant sa six-cordes de riffs nerveux, avant de revenir à intervalles réguliers à un chant bizarre hésitant entre Radiohead sous acide et transe shamanique. La recette est un peu répétitive mais elle fonctionne à chaque fois : passage de loops obsessionnels en arriere plan, tension qui monte, puis explosion de décibels et de syncopes electroniquées. Clin d'oeil/reprise (légèrement polémique, le règlement du Tremplin rendant normalement ce genre d'audace rédhibitoire ???) avec une B.O de Pulp Fiction surboostée, et le train metal-dub reprend de plus belle : à chaque fois qu'on les croit épuisés, les deux compères en rajoutent une couche, dans une bonne humeur et une furie toute jouissive : c'est énorme ! Si l'on fait abstraction d'un mix vraiment trop "rock" à mon goût (bon sang, envoie du kick bonhomme !!! Et les effets en droite/gauche, ne les enterre pas !...) et d'un côté souvent totalement brouillon, les clermontois ont une de ces patates que c'est à en tomber !

Bref, inutile de faire monter un suspense protocolaire plus longtemps, et on remercie l'Usine de rendre le verdict assez vite :
Iynx remporte la coupe.
Ma foi, un choix finalement bien mérité, au sein d'un plateau vraiment exceptionnel de par tout à la fois son éclectisme (pardon à M. Loyal...), sa qualité, son humilité, tout quoi. Donc du coup, on s'en fout un peu de savoir qui a "gagné".
Trois groupes de haute volée, c'est trois groupes de haute volée. Et loin d'un concours d'amateurs, on vient de passer une bien belle soirée, dans un beau lieu, et reste plus qu'à rentrer sur Marseille pour se remplir un peu l'estomac sur les coups d'1 heure du mat' en se disant que oui, on peut encore tomber des fois sur des "tremplins" qui parlent de musique et pas de "pratique amateur sympathique" ni de "divertissement social" ni de "comptage de voix à l'aplaudimètre": ça redonne foi dans le genre.

Iynx : les dernières chroniques concerts

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