Chronique de Concert
Narrow Terence
Intro à la Houellebecq : 95 % du texte ci dessus est un copié collé de wikipédia... Intro incongrue, sans aucun rapport avec cette soirée dans la chapelle baroque de l'école de musique d'Apt... Une splendide école de musique, d'ailleurs, et qui n'est même pas citée sur la page " Apt " du site susnommé. Enfin... Pas si incongrue que ça cette intro : elle permet de situer le lieu du concert, montrer (une fois de plus) qu'il ne se passe pas des choses qu'à Marseille, Montpellier, Paris ou New-York. Elle permet également de montrer qu'à Apt, comme à la Gare de Coustelet, l'Akwaba de Chateauneuf-de-Gadagne, et bien d'autres lieux apparemment isolé (mais pas tant que ça), des passionnés de musique se bougent pour monter de beaux événements, capables d'attirer des gens de Cavaillon, Manosque, Rognes, Avignon, Bédarrides, Saint-Cannat, Paris voire même New-York (je vous assure qu'il y avait - au moins - des gens venant de toutes ces destinations ce 28 juin dans le public de la chapelle de l'école de musique d'Apt).
Enfin, bref, on n'est pas là pour parler géographie, ni de littérature ! Le sujet de ce soir là, c'était le groupe Narrow Terence, dont on a déjà largement parlé sur ConcertandCo : 16 chroniques de concert en 5 ans, c'est un score plus qu'honorable. Un score qui n'a rien d'étonnant en fait : Narrow Terence est, on le répète ici depuis le début, un excellent groupe de scène. " Il se dégage de leur musique une énergie telle qu'on est soit scotché avec des frissons, soit entraîné par la même force étrange qui nous pousse a secouer le tête ou les jambes ", dixit l'ami Pirlouiiiit en 2005 alors qu'il les découvrait à l'Espace Doun. Le pire, c'est qu'on peut très bien avoir vu Narrow Terence sur scène une demi douzaine de fois comme moi et prendre une claque à chaque fois, avec comme bonus de ne jamais voir le même concert. Electriques et bruyants, électro-acoustiques et ouatés, jouant assis ou debout, avec ou sans la majestueuse Christelle Lassort (et son violon magique), accompagné de Benoit Rault (de Ben's Symphonic Orchestra) ou Buni Lenski (DAAU / Starboard Silent Side), en split concert avec Mansfield TYA ou Ez3kiel, aux festival Les Rockomotives, ou en concert privé dans un salon... Les membres de Narrow Terence nous ont habitués à ne pas nous habituer.
Ce 28 juin 2011, rendez vous était donc donné pour un concert gratuit (mais sur réservation) qui s'annonçait encore une fois un peu spécial. Les abonnés à la newsletter de l'association Bouche à Oreille (liée à l'espace Doun qui est, entre autre, la " maison " de Narrow Terence) avaient reçu il y a quelques semaines, un mail les informant de la création d'un projet nommé ENKIRAMA, projet dédié à la création de coffrets contenants un album acoustique, le DVD d'un live, et un documentaire sur un groupe, le premier à se prêter au jeu étant Narrow Terence.
On entre donc dans cette chapelle, dissimulée à l'intérieur de ce qui doit être un ancien hôpital, au coeur de l'école de musique d'Apt où (nous l'apprendrons pendant le concert) les membres de Narrow Terence sévissent depuis le mois d'avril, en interaction avec les élèves de cette école. Des chaises sont installées dans la nef pour le public alors que le devant de l'abside, transformée en scène, est remplie de multiples instruments : deux guitares, un piano, un violon, un trombone, une basse électrique et une contre basse, une batterie et des percussions, un vibraphone ou encore un farsifa. Instruments que les cinq (ce soir là) membres de Narrow Terence utiliseront quasiment tous à tour de rôle. Sont présents sur scène : Les frères Puaux (Antoine et Nicolas) chanteurs multi-instrumentistes et fondateurs du groupe, la fidèle Christelle Lassort (violon, basse, piano, choeurs), Alex Viudes (chapeau, batterie, contrebasse, percussions, choeurs) et un invité : Kevin Cerovich, géant blond américain à la stature classieuse (trombone, percussions et vibraphone). Après une rapide introduction expliquant le pourquoi de la soirée (l'enregistrement du DVD) et les contraintes liées (pas trop de bruit pendant les morceaux et donc pas de photos, entre autre - celles qui illustrent cette chronique ont été prise avant ou après le concert), on rentre assez rapidement dans le sujet. Sur les premiers morceaux, on sent le groupe tendu par la concentration, et on comprend assez vite pourquoi.
Ce qu'il vont nous offrir ce soir là n'est pas juste une série de version assagies de leurs chansons, mais le résultat d'un vrai gros travail de réarrangement. Certaines de ces chansons comme Cave in Hell ou How She Ruined My Days, par exemple, auraient pu être faciles à jouer en acoustique, sans grandes modifications. D'autres, comme les rageuses Wet Dead Horses et Bottom Bitch auraient pu quant à elles paraître quasiment impossible à jouer dans ces conditions, étant donnée l'énergie dépensée et partagée par les membres du groupe pour les interpréter sur Narco Corridos (leur deuxième et splendide album) ou lors de leurs précédents concerts. Que ce soit pour les premières ou les secondes, les versions que nous avons entendues ce soir là étaient très différentes des originales... D'où, sans doute, cette tension palpable, et cette concentration intense de début de concert, alors qu'ils allaient les interpréter pour la première fois.
Ce qui ne change pas, par contre avec ce groupe, que ce soit dans l'électrique saturé des précédents concerts, ou dans la douceur raffinée de celui là, c'est l'ambiance cinématographique de leur musique. Voir Narrow Terence sur scène, ce n'est pas seulement assister à un concert, c'est aussi écouter une histoire musicale, partir en voyage, avec des sets construits comme des road movies. La complexité des arrangements mêlés d'instruments rock et classiques, et l'accessibilité instantanée des chansons dans ces versions (Mikel, un ami qui découvrait Narrow Terence ce soir là me demandait "comment on pourrait ne pas aimer cette musique ?") évoquent pour moi les grands John : Zorn, Cale, ou encore -nyCash, dans leurs périodes créatives les plus intenses. Une autre constante, c'est l'énergie que dispense Narrow Terence sur scène, même sans faire hurler leurs guitares, même en étouffant le son... La transformation de Bottom Bitch, une chanson presque métal sur l'album, qui dans cette chapelle, devient un gospel bluesy, est capable de filer la chair de poule à la statue de Saint Charles Borromée. Cette transformation, ou encore l'intervention de quatre jeunes choristes de l'école de musique d'Apt sont des exemples parfait de la complexité acoustique accessible, libre et énergique des versions que nous avons entendues ce soir là.
Il me semblait indispensable de faire une chronique de ce concert (tant le moment était grandiose), et pourtant, il me semble également impossible d'en dévoiler beaucoup plus (étant donné ce qui nous attend). Si tout se passe bien, l'enregistrement fait ce 28 juin donnera en effet lieu à un DVD qui sortira début 2012 (accompagné d'un CD enregistré la veille dans la même configuration, mais sans le public), et en dévoiler plus serait prendre le risque de priver ceux qui l'achèteront du plaisir de la découverte que nous avons eu ce soir là... Plaisir que je ne me pardonnerais pas de gâcher. Je serai sans doute un des premiers à acheter ce DVD, même si, moi, j'ai déjà assisté à ce très beau moment. Vivement donc le début de 2012 !
PS : Les photos ont été prises hors concert. La première, celle de la chapelle vide est de l'ami Flag', les autres sont d'Olivier Boudon, ingé son du groupe qui les a prises lors de la balance avec son téléphone, et me les a ensuite envoyées. Je tiens à le remercier sincèrement pour ça (et lui dire ici que, du coup, je lui dois une bière !).
Critique écrite le 04 juillet 2011 par Chlorophil
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