Chronique de Concert
Natalie Bergman
La Coopérative de mai, Clermont-Ferrand 21 novembre 2021
Critique écrite le 01 décembre 2021 par Pierre Andrieu
Dimanche... Comme l'a si bien chanté Bertrand Belin avec les Liminanas, on ne peut pas dire que ce soit la journée la plus facile de la semaine, surtout quand on est au mois de novembre, qu'il fait nuit à 17h et que cette fameuse journée arrive après un jeudi (grosse soirée avec Arthur Satan, Bryan's Magic Tears et Heimat), un vendredi et un samedi bien chargés. Donc, clairement, on a un peu la lose, ouais le seum, hashtag GDB (gueule de bois, pour les intimes) mais on se traîne tant bien que mal jusqu'à La Coopé puisqu'une personne bien intentionnée (le photographe Yann Cabello) a attiré notre attention sur la voix de Natalie Bergman, d'une beauté à tomber à la renverse. Ce n'est pas tous les jours qu'on a la chance d'être confronté à pareille artiste, se dit-on en guise de motivation, tout en descendant de notre montagne en prévoyant de boire un Perrier citron bien tassé.
Bien évidement il n'y pas grand monde dans le club de la Rue Serge Gainsbourg, et ce même si tous les adhérents de la salle ont été invités (il va bientôt falloir payer les gens pour venir assister à un concert, si ce n'est pas un truc archi consensuel comme Angèle ou je ne sais quelle ineptie pour teubés de 15 ans d'âge mental). Mais, bon, on ne va pas dramatiser : les personnes qui sont venues ont l'air contentes d'être là, motivées et se font entendre (ouf !) à l'arrivée de la star du jour ! Habillée comme une star de la country dans une sorte de combinaison noire décolletée et brodée de trucs flashy, celle qui se nomme Natalie Bergman se pointe sur scène avec ses musiciens pour porter la bonne parole (elle évoque beaucoup la religion dans ses textes, mais ne fait pas de prêchi-prêcha sur scène, fort heureusement) "gospel soul folk pop" à ses fidèles clermontois.
Si la belle blonde américaine a écrit en solo un disque introspectif nommé "Mercy" suite à la tragique mort accidentelle de ses deux parents, elle prend soin de venir accompagnée d'un groupe de cadors (une choriste, un batteur, un bassiste et un guitariste) avec lequel elle offre des versions lumineuses de ses morceaux. Rien de larmoyant ici, juste des compositions absolument divines chantées d'une voix céleste. Ce dernier terme n'est pas galvaudé, la voix de l'ex membre du duo Wild Belle étant tout simplement celle d'un ange capable de vocaliser aussi bien dans les aigus que dans les graves, tout en ayant un timbre soul enfantin ultra poignant. Très professionnelle, à l'américaine, quoi, celle qui a la chance de publier ses uvres via le label de Jack White, Third Man Records, fait néanmoins montre d'une simplicité assez touchante quand elle s'adresse au public, présente ses collaborateurs ou se fend de quelques petites anecdotes.
Ce qui marque au plus haut point et émeut durablement, outre la voix, la qualité des morceaux et leur thème (ouais, ça fait beaucoup !), c'est l'osmose qui règne sur scène, mademoiselle Bergman mettant en valeur ses musiciens, qui le lui rendent bien. Particulièrement la sculpturale choriste black, qui, elle aussi, bénéficie de cordes vocales hallucinantes, mais qui cherche juste à soutenir son amie, proposant des parties complémentaires aux siennes, et toujours classieuses (c'est un euphémisme). Tous les morceaux sont impeccables et sonnent comme des classiques instantanés mais il y a en un qui donne carrément envie de pleurer de bonheur en deux petites secondes, c'est "Shine Your Light On Me". Ce titre en forme de miracle évoluant entre gospel et soul music bénéficie de paroles qui donneraient presque envie à un athée réfractaire à toute religion (comme l'auteur de ces lignes) d'entrer dans une église chaque dimanche pour se mettre à prier.
On sait bien que Jésus n'a jamais existé, que Dieu est un mirage, que tout cela c'est du vent bien romancé dans la Bible par des prêtres aux idées peu catholiques. Mais, quand on entend Natalie Bergman demander de l'aide à Jésus parce qu'elle est dans une grande peine, on ne peut qu'acquiescer, dire "amen" à la démarche et respecter ceux qui, comme elle, cherchent un peu de réconfort dans cette vie de merde. Après tout, c'est mieux que de se défoncer comme un chien pour tutoyer les étoiles. Bref... Cette plage magique est jouée tôt dans le set, et on aurait bien aimé qu'elle soit interprétée une deuxième fois à la fin. Ce qui ne sera pas le cas. Peu importe après tout, le reste de la set list est également un régal, particulièrement cette reprise d'"Angel" de Jimi Hendrix, récemment enregistrée par la demoiselle dans le studio que le génie trop tôt disparu avait créé à New York, Electric Lady. La chanteuse américaine (basée à Chicago, Illinois), qui a beaucoup de talent et de goût, on l'aura compris, possède également un solide sens de l'humour : elle annonce le titre en déclarant que sa version est "bien évidement meilleure que celle d'Hendrix".
On a beaucoup aimé également le passage ou la songwriteuse, vocaliste et guitariste s'assied à l'orgue électrique pour deux titres, sa complicité avec sa choriste faisant vraiment chaud au cur, une fois de plus. Le surprenant titre où la guitare électrique solo faisait penser aux interventions saturées sur la reprise de "With a little help from my friends" des Beatles par Joe Cocker est aussi à mentionner si l'on veut être complet et rendre compte de tous les bonheurs du soir. Voilà, on a tout adoré (sauf la durée du concert, trop courte, et sa fin, trop expéditive et un peu en queue de poisson), c'était un moment magique en compagnie de quelqu'un qui vendra bientôt des millions de disques. C'est en tout cas tout le mal qu'on lui souhaite !
Photos : Yann Cabello www.yanncabello.com, www.facebook.com/yann.cabello.7, twitter.com/YannCabello, instagram.com/yanncabello...
Liens : nataliebergman.bandcamp.com/album/mercy, www.facebook.com/nataliebergmanmusic, thirdmanstore.com/collections/natalie-bergman/products/mercy, www.lacoope.org
Critique écrite le 01 décembre 2021 par Pierre Andrieu
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