Chronique de Concert
Nice Jazz Festival 3/8 : B.B. King + Joe Bonamassa + Susan Tedeschi (+ Christian Vander + Madeleine Peyroux)
Leçon de blues #1 : Avoir une voix écorchée : Susan Tedeschi. Alors que sur son album Hope And Desire sorti en 2005 elle n'avait écrit aucun titre, préférant se faire l'interprète des Stones, Dylan, Redding, Wonder ou Mayfield, elle vient de sortir un opus Back To The River avec une seule reprise. La majorité des titres joués ce soir en est issue : Love Will et Butterfly (écrits avec son époux), Back To The River (ôde au plaisir de rentrer chez soi écrite avec Tony Joe White), People (avec Sonya Kitchell), 700 Houses (chant de solidarité envers les victimes de l'ouragan de 2005 à la Nouvelle-Orléans et alentour, avec John Leventhal), Can't Sleep At Night (écrite seule). Le merveilleux Just Won't Burn et It Hurt So Bad nous rappellent que Susan a déjà 11 ans de carrière.
Et est-ce une impression, il semble que les années, à défaut de buriner son doux visage, façonnent ses cordes vocales pour en faire une des toutes meilleures interprètes féminines de blues actuelles. Ses qualités ne se limitent pas à sa voix. C'est également une bonne guitariste de blues (j'emploie cet adjectif pour me laisser une marge en prévision de ce qui suit) entourée de musiciens chevronnés, le guitariste et le saxophoniste étant plus souvent mis à contribution que l'organiste, le bassiste et le batteur. Ils étaient même 7 sur scène pendant une bonne demi-heure, avec un technicien qui s'affairait autour de la batterie et qui a dû se prendre quelques coups de baguettes sur les doigts lorsqu'il revissait les cymbales. Les deux guitares et le saxo se passent le témoin sur l'inévitable bridge avant la reprise du refrain final où les cordes vocales sont carrément à vif. Susan Tedeschi termine avec un morceau co-écrit avec son époux Derek Trucks qui sera sur cette même scène dans trois jours et dont elle parle avec tendresse. C'est paraît-il un homme "fantastic !" You are fantastic too, Susan !
Leçon de blues #2 : Délivrer au moins un solo de guitare par morceau : Joe Bonamassa. Il s'approche du micro non pas pour chanter mais pour s'excuser : Il devait venir dans ce festival un couple d'années en arrière et un imprévu l'avait obligé à effacer la date (j'ai bien traduit ?) Il en est désolé et s'excuse encore. Je connais un pianiste de la soirée d'ouverture à qui il pourrait donner des leçons de savoir-vivre... La première fois qu'il a fait la première partie de BB King, c'était il y a plus de 20 ans. Difficile à croire en voyant ce jeune homme à qui je présenterais bien ma fille. Il n'avait alors que 11 ans et c'était un guitariste prodige. Et comme entre temps, il a dû continuer à bosser, vous imaginez le niveau. Ca part sur Walk In My Shadows. Ses acolytes vont marcher dans son ombre une heure durant. Ne me demandez pas le nom du batteur, du bassiste et du claviériste. Ni du chanteur remplacé au bout de quatre titres par une chanteuse.
Ils sont à Bonamassa ce que les équipiers obscurs de la Team Columbia sont à John Cavendish. Ils le déposent à 100 mètres de l'arrivée pour qu'il gagne son étape. Victoire assurée à tous les coups : Joe est aussi rapide sur le manche de sa guitare que John sur son vélo. Sur une heure de blues, une bonne moitié a dû être consacrée à des chorus toujours plus exceptionnels (j'ai pas trouvé mieux comme adjectif) les uns que les autres. Il me fait souvent penser à Jimmy Page sauf sur The Great Flood où il démarre un sprint gilmourien. Mon voisin de devant y a vu des particules de Freddie King. Tiens, il est encore là, lui ? Ben oui, il ne va pas voir Vander parce qu'il le voit demain soir dans Magma. Tu parles d'un argument !
Leçon de blues #3 : S'appeler BB King. La trentaine de photographes présents, prêts à shooter un des derniers mythes vivants de la musique (bientôt 84 ans dont 60 de carrière), a droit comme d'habitude à trois morceaux avant de devoir quitter les lieux. Le premier est un instrumental du band. Alors, faute de mieux, ils shootent Boogaloo ou Dennis Charles. Le deuxième est aussi un instrumental. Certains commencent à blêmir. Enfin la silhouette de BB King approche. Ca crépite dans tous les sens. Tournée d'adieu ? Personne ici ne le souhaite. A commencer par lui : "I missed you" nous dit-il. Et plus tard : "- Do you want me to come back in one year ? - Yeaaah ! - Do you want me to come back in two years ? - Nooooo !" Enfin, on veut bien aussi, mais l'année prochaine c'est mieux. Il va devoir convaincre son docteur déjà pas chaud pour cette tournée-ci.
Mais si personne ne le souhaite, nous avons le sentiment que c'est la dernière fois. Des petits détails dans son discours qui ressemblent à un testament. Lors d'une chanson qu'il chante spécialement pour les femmes, "un cadeau de Dieu à la planète" dit-il, il répète "I never seen an ugly woman". Et le symbole de la grosse horloge posée à côté de lui et qu'il brandit à la fin du set pour montrer que c'est l'heure. Sans compter le choix de Key To The Highway comme titre phare de la soirée dans lequel il répète : "Give me one more kiss / Just before I go / Cause when I leave this time / I won't be back no more". Ce baiser, il nous l'adresse pour de bon en léchouillant le micro. Nos yeux sont humides, nos mentons tremblent. L'émotion a pris le pas sur la musique. Pourtant, les petits jeunes de son band (à vue de nez 65 ans de moyenne d'âge) sont efficaces, à commencer par Tony Coleman impressionnant à la batterie. Et Blues Boy a assez d'expérience pour remplacer ses brillants solos d'antan par des notes qui font mouche. Allez, j'y crois ! A l'année prochaine, Monsieur B.B. King.
Critique écrite le 21 juillet 2009 par Mcyavell
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