Chronique de Concert
Nick Cave and the Bad Seeds
L'écriture du dernier et somptueux album Skeleton Tree a pris racine dans la tragédie qu'a connue Nick Cave en perdant accidentellement en 2015 un des jumeaux qu'il a eu avec sa dernière épouse et compagne actuelle. Un documentaire One More Time With Feeling parle d'ailleurs de la création de ce dernier opus qui est d'une beauté absolue et d'une noirceur infinie. Pour annoncer, cette nouvelle tournée, Nick Cave a écrit ceci "We've been in a strange place, I'm coming out and blinking into the light... It's good to be playing again"
Il est 20 heures 30, le Zénith a fini par se remplir et la lumière de la salle s'est éteinte. Il n'y aura pas eu de première partie. On est maintenant dans l'obscurité. Quelques rares lumières viennent de la scène et une introduction arrive délicatement à nos oreilles. On est sur le côté droit avec quelques photographes car on n'est pas autorisé à réaliser des clichés de face. On va être très limité ce soir niveau photo avec une seule chanson et ces conditions très médiocres mais pour le reste, musicalement, on vous prévient d'entrée, cela va être magistral avec un concert somptueux.
Les musiciens s'installent les uns après les autres, l'intro d'"Anthrocene" nous plonge dans la pénombre d'une très sombre émotion et l'immense artiste Nick Cave arrive enfin devant nous en saluant son public. Il s'assoit sur un tabouret au milieu de la scène et commence à chanter. Les premiers frissons sont déjà présents. Les lumières sont faibles et l'atmosphère est lourde et prenante. L'ombre de son fils regretté plane au dessus de nos têtes. Sur le second titre, "Jesus Alone", on reste dans la continuité. On est touché et on se recueille avec l'immense artiste australien.
On poursuit avec "Magneto", toujours extrait du dernier album Sketelon Tree et l'ambiance reste encore au recueillement. Le concert débute donc exactement comme sur le disque avec ces trois premiers morceaux. Avec "Higgs Boson Blues", le 4ème titre interprété ce soir extrait du petit bijou et album précédant Push the Sky Away, on ne sortira pas pour autant de ce voyage planant et profond. Le rythme est à peine plus rapide car ce long titre de près de 10 minutes est une balade somptueuse. Nick Cave chante à la perfection et il nous arrache le coeur par une interprétation exceptionnelle. Les musiciens qui l'accompagnent dont certains depuis la nuit des temps nous offrent des choeurs qui sont tout simplement magnifiques.
Avec "From Her to Eternity" qui nous ramène à son premier album avec the Bad Seeds datant de 1984, on part dans une autre ambiance. Fini le côté beau, sombre et triste, on part dans le burlesque et la folie. Nick Cave marche beaucoup et quitte très souvent la grande scène où se trouvent ses musiciens pour venir sur le muret longeant la barrière qui sépare le public de la scène. Il se pose très souvent dessus, parfois, il marche comme s'il était sur un fil et passe son temps à chercher son public et à le regarder dans les yeux. Les fans tendent leurs mains et Nick Cave s'appuie dessus. Parfois, il se penche, parfois il se couche sur eux, parfois il est droit comme un I, il donne énormément... Sur scène, c'est un monstre et encore plus sur cette tournée, les concerts lui servent d'exutoire. Il prend la main d'une fan et la pose sur son coeur tout en chantant. Il rend le Zénith intime même si on est près de 6000 personnes.
En dehors de 6 titres de Sketelon Tree sur les 8 qu'on retrouve sur le disque et 3 chansons extraites de Push the Sky Away de 2013, on entendra bien évidemment des classiques dont son morceau fétiche qu'il joue toujours sur scène depuis 1988, le mythique "The Mercy Seat". Au bout d'une heure, les musiciens n'auront joué que 8 morceaux tant certains atteignent régulièrement les 7, 8 voir 10 minutes. On est également impressionné par la qualité du groupe the Bad Seeds et notamment de Warren Ellis, qui est époustouflant. Le musicien qui est un des plus fidèles amis et collaborateurs de Cave, il écrit la musique avec le chanteur, est énorme ! Il sait jouer de plusieurs instruments et autant à la guitare, qu'au violon, il nous scotche.
Après tant de louanges de ce concert, un des meilleurs de l'année incontestablement, que pouvons-nous dire de plus ? Nick Cave viendra au moment du rappel de chaque côté de la fosse, dans les gradins, dans les premiers rangs et donc loin de la scène chanter en se mélangeant à son public. Sur les deux grands écrans, on peut le voir aussi en version noir et blanc avec les fans ravis, émerveillés et conscients qu'ils vivent un moment unique et tout simplement magique. Le rappel est un pur bonheur en forme de feu d'artifice. Sur "Stagger Lee", il fait monter sur scène au moins 80 fans tout heureux de cette proposition. Il y a tellement de monde maintenant qu'on ne voit quasiment plus les musiciens. Sur le dernier et 18ème titre, "Push the Sky Away", les fans resteront mais ils seront assis. Mister Cave va pouvoir finir d'une manière magistrale ce concert de bout en bout exceptionnel. Il nous salue une dernière fois et il file tranquillement sans se retourner laissant les fans et ses musiciens sur les planches. Les Bad Seeds finissent par nous saluer à leur tour et les lumières de la salle se rallument. Il est déjà 22 heures 50 et on n'a pas vu le temps passer. A 60 ans depuis quelques jours, Nick Cave nous aura donné un très grand concert et offert un moment rempli de grâce, de tristesse, de folie, de générosité.
Remerciements : Alias Production, Ana
Durée du concert : 2 heures 20
Set-list :
Anthrocene
Jesus Alone
Magneto
Higgs Boson Blues
From Her to Eternity
Tupelo
Jubilee Street
The Ship Song
Into My Arms
Girl in Amber
I Need You
Red Right Hand
The Mercy Seat
Distant Sky
Skeleton Tree
Rappel :
The Weeping Song
Stagger Lee
Push the Sky Away
Critique écrite le 08 octobre 2017 par Lebonair
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