Chronique de Concert
Nika Leeflang + Splash Macadam
Et en effet, le Pub de l'Europe ça se mérite. Mais les chroniqueurs de Concert & Co ne reculant devant rien, ils ont une réputation à tenir. Surtout, il faut avouer que l'affiche est alléchante. Le feu et la glace, l'exubérance et la fougue retenue. Une association étrange sur le papier mais une alchimie détonante sur scène. Sébastien Dreyer, qui a organisé cette soirée (il est également aux manettes de la Guinguette Sonore) ne s'y est pas trompé. Bien vu.
A ma gauche sur le ring, Nika Leeflang, qui se présente sur son Facebook comme ex-chanteuse des Limiñanas. Mais comme le duo perpignanais, Anton Newcombe et Emmanuelle Seigner tournent en tant que L'Epée, est-ce qu'elle ne le serait pas encore un peu quand même ? Bref, Nika. Des collab avec Papillon Paravel et The Limiñanas, deux EP à son actif, une chronique Rock'n'Folk et un EP à sortir dont j'ai eu le privilège d'écouter quelques morceaux en session photo à l'occasion d'une répète à Marseille.
A ma droite, les Splash qui, le hasard faisant rarement les choses par... hasard, accompagneront la chanteuse ce soir avant de jouer dans leur configuration Macadam. Un gang bien connu des Marseillais, qui écume les scènes depuis de nombreuses années et se remet à tourner en prévision de la sortie d'un album (actuellement repoussée en raison d'un imbroglio juridique, mais dont on espère une issue rapide tant le groupe mérite cette reconnaissance).
Nika et les Splash Macadam pour le même prix donc, pour ceux qui ne suivent pas. Pour les avoir entendus chacun de leur côté, je sais que ça déboite et qu'il n'y a pas de raison que ce ne soit pas le cas ici encore. Je les ai même photographiés, sauf les Splash Macadam en live, et leur prestation au Lollipop Music Store en novembre dernier me fait encore regretter de ne pas avoir pris mon appareil ce jour-là. Il me tarde donc de voir ce que ça donne "en vrai" pour ce qui est ce soir, si je ne me trompe pas, le deuxième concert de Nika & Splash après la 1ère partie d'Izia à Sérignan.
Le Pub se remplit gentiment. Difficile de faire la part entre la clientèle des habitués et les fans-amis-famille mobilisés pour l'occasion. Toujours est-il que le bar est rapidement plein et qu'on ne bouge plus devant. On n'est pas à l'Olympia : guitare, basse et batterie ont suffisamment de mal à cohabiter pour que le clavier soit exilé à gauche de la scène. Je ne sais d'ailleurs toujours pas comment Etienne, le batteur, a échappé au traumatisme crânien quand on compte le nombre de fois où, dans les moments de pure folie - et il y en a eu quelques-uns - il s'est pris l'enceinte placée au-dessus de lui.
Mais là où il y a de la gêne il n'y a pas de plaisir, et jouer en formation serré (ce n'est pas pour rien que je parlais de gang juste au-dessus), ça ne semble pas les gêner. Au contraire, du plaisir ils en ont et ils en donnent.
Nika ouvre avec un Swimming Pool intimiste. Des montées plutôt posées, quelques churs. Le cadre est posé, on se chauffe. La voix encore retenue, elle va progressivement lâcher les chevaux. Plusieurs morceaux du nouvel EP s'enchaînent avec d'autres plus anciens, ce qui commence à faire un bon petit répertoire.
La température monte jusqu'à Broken Bones dont le clip vient tout juste de sortir. Rien à dire, écriture, rythmique qui va bien, c'est potentiellement le "tube", même si mon coup de cur arrivera un peu plus tard.
Nika a ressorti son tambourin. Les Splash sont complètement raccord avec cet univers où résonnent PJ Harvey et Kim Gordon. Sonic Youth, justement, dont elle va reprendre Becuz. Le lien avec les Splash devient complètement logique. C'est fluide. La bonne humeur est communicative et Nika joue avec les nerfs du public, faisant passer la salle par toutes les émotions, tantôt en les faisant monter, tantôt en les faisant redescendre avec des morceaux plus tranquilles comme Old Stones ou No Title (le coup de cur dont je parlais plus haut). Le set se termine sur Bad Sunday. Un morceau en français, magnifique, gainsbourien. Un truc à te tirer des larmes. Moment de flottement, l'émotion est palpable. Difficile de terminer son set là-dessus.
Mais justement, Nika enchaîne sur un set solo, avouant qu'il y a longtemps qu'elle ne s'était pas retrouvée dans cette configuration. L'assurance perdue pendant quelques secondes est vite rattrapée par une setlist (dont un hommage appuyé à Marguerite Duras) qui donne encore l'occasion de vérifier qu'au-delà d'une voix attachante et parfois écorchée, Nika compose de vrais putains de bons morceaux.
Cette partie, plus intimiste, aurait sans doute gagné à ouvrir le concert, parce que tout s'arrête comme ça, abruptement, nous laissant un peu désemparés, un gout amer dans la bouche. Comme s'il manquait quelque chose. Un peu comme se faire larguer par texto. Même si apparemment c'est comme ça qu'on fait dans le nouveau monde, c'est violent. Tout est passé très vite. Je n'ai pas regardé combien de temps avait duré le concert, mais ce sont bien 13 morceaux qui ont été joués ce soir ! Une expérience à renouveler, c'est sûr.
Pas le temps de trop tergiverser. A peine le temps de boire une bière que les Splash Macadam remontent sur scène en formation complète. La transition est violente parce qu'inexistante. Au moins on n'est pas dépaysé. C'est avec Love qu'ils attaquent. Ça larsène. Pas de temps mort. Pas de setlist non plus. Ça joue au feeling du jour, comme à chaque concert apparemment, si ce n'est le morceau d'ouverture. C'est Vincent, le chanteur, qui justement les annonce au groupe au fur et à mesure. Vincent, qui mène les Splash comme Alex ses Droogies (pour comprendre l'allusion Kubricksienne, allez jeter un coup d'il au final de leur clip Midnight Forever). C'est une réalité bien palpable.
Les morceaux peuvent s'étirer, être déstructurés. Au Lollipop Music Store, c'est Malaise qui avait dû tourner pendant plus de 10 minutes, comme le micro dans le public. Ce soir c'en est un autre. Et Dig Up peut être demain. Ces quatre-là donnent l'impression d'être bordéliques, de s'en foutre. Ils jouent comme ils débarquent sur scène, à l'énergie. Mais c'est un bordel qui a du sens. D'abord parce qu'il y a une vraie alchimie entre eux, qui rigolent, se passent les instruments, te font oublier qu'il y a un problème de son pendant le concert ("on s'en fout" répond Guillaume à la personne qui vient essayer de lui expliquer quoi faire, tout en continuant sa ligne de basse), et semblent s'entendre en un coup d'il.
Et puis parce que c'est un vrai groupe de scène. Pas le genre à te demander de taper dans les mains avec eux, non. Parce que de toute façon tu vas le faire. Que tu le veuilles ou pas. Un concert de SM c'est à la limite de l'expérience hypnotique. D'ailleurs il n'y a qu'à regarder autour de soi. Tout le monde danse dans une sorte de transe. C'est rock mais électro, déstructuré mais construit. C'est peut être ça le Raw power que chantait Iggy il y a presque 50 ans.
Il y aura bien un ou deux morceaux en rappel, mais tout a une fin. Et puis il est temps de rentrer. C'était loin. C'était beau. Mais putain, c'était bon.
Critique écrite le 30 janvier 2020 par Lb Photographie
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