Entretien avec Olivier Durand
"Que du Bonheur..."
Samedi 16 Mars 2013 : 18 h 30 !
Les coulisses du New Morning résonnent encore des extravagances boisées du concert donné la veille au soir - un magnifique premier "Birthday Show", conclu par une version "acoustico-hargneuse" d'un classique du Canadien Neil Young : Rockin' In The Free World... - lorsque nous nous rencontrons "backstage", Olivier et votre humble serviteur... L'homme "guitare" semble déjà se projeter vers le Soundcheck à venir, puis LE show "anniversaire" de ce samedi, ce qui ne l'empêche pourtant pas de souscrire aimablement au fameux rituel de légende, le fameux : "questions + réponses = interview" !
Salut Olivier... J'étais là, hier au soir, pour assister au premier des deux Birthday Shows : un moment plutôt particulier de l'année, pour vous. C'est d'ailleurs devenu assez récurrent, ces dernières années... Comment est-ce que toi et le groupe vivez ces moments par "procuration" avec Elliott, vu que, c'est tout de même LUI, le roi de la fête, à cette particulière occasion...
Olivier Durand : Oui bien sûr, que c'est particulier, mais... On faisait de toute façon des shows tous les ans au New Morning. Mais, habituellement, ça n'était qu'une soirée ! Au début, on le faisait en début de semaine, puis, p'tit à p'tit on s'est décalé vers le weekend ! Parce que, ben... plus c'était proche du weekend et plus il y avait de monde, sachant que les étrangers pouvaient en profiter pour passer le weekend à Paris tout en venant nous voir ! On l'a alors fait une fois pour l'anniversaire d'Elliott, et... comme c'était plutôt sympa... On a recommencé l'année d'après, et puis... Comme il y avait de plus en plus de monde... (Il s'illumine, sourit franchement en évoquant cette belle "progression")... on est passé à deux soirées ! Et puis, les deux soirées étant complètes à chaque fois, on a continué ! Je crois que c'est la troisième fois d'affilée que l'on fait ces deux soirées pour son anniversaire. C'est devenu une habitude !!!
Ce qui est marrant, c'est que... Dans une période où on ne parle pas beaucoup d'Elliottdans l'année, globalement, niveau médias... on peut voir qu'il a toujours son noyau de "fans" qui le suit, qui est là... qui se renouvelle, aussi, parce qu'il y avait pas mal de jeunes et gamins présents, en dehors des "têtes grises"... hier au soir !
OD (visiblement heureux de cette constatation) : Ben, oui... On est un peu, "il" en parle d'ailleurs dans le dernier album, dans le Murphyland, ici... Les gens viennent parce qu'ils savent qu'ils vont s'y retrouver. Quelque part, il y a une sorte de "famille" qui gravite autour d'Elliott, aujourd'hui ; un noyau de fans qui est toujours là : les uns accueillant les autres, selon les pays... C'est vraiment très particulier ! Comme me le disait Claudia (régisseuse du New Morning)... les techniciens ou les gens qui travaillent ici : "on est vraiment content, ça fait plaisir de vous avoir ici chaque année !". Ils sont quelque part contents de voir la "famille Elliott" débarquer chaque année... (Rire satisfait !).
Lui, en plus, il vient carrément en "voisin", vu qu'il habite à côté, alors que vous...
OD : Oui ! Nous on vient d'un peu plus loin, c'est sûr (il est originaire du Havre) alors que lui, il peut carrément venir à pieds !
Hier au soir, on pouvait pleinement ressentir ce côté "intimiste", "familial", émanant de la soirée... cette connexion directe d'avec son public !
OD : Oui, oui ! C'est pour cela qu'on joue dans ce genre de lieu où il y a toujours une connexion avec le public ! Ici, ce lieu a une âme... Quand tu joues dans des grands lieux, tu ne peux pas avoir cette proximité là, avec les gens... Tu joues, tu fais de la musique, mais il n'y a pas ce côté "feeling", très, très particulier...
Ici, vous êtes au contact quasi "physique" des gens ! Vous descendez même dans le public, et...
OD (visiblement ravi d'évoquer ce "contact", on sent qu'il attend déjà sa "dose" du soir à venir...) : On aime bien aller les "chercher", bon Alan (Fatras/batteur du groupe qui est assis à côté !) ne peut pas courir, lui, vu qu'il est coincé derrière sa batterie, mais... Elliott et moi on aime bien aller devant, chercher les gens, aller au contact, chercher les regards, et...
Aller au plus près des gens, oui ! Et... on sent que vous vous nourrissez de "ça", aussi... Non ?
OD : Exactement ! Ça te donne ton énergie, aussi...
Oui ! Tu vas la puiser directement dans le public, en face...
OD : Oui, dans les gens, dans le regard, par exemple...
Puisque l'on parle des shows, comment est-ce que vous bâtissez ce genre de soirée, justement ? Elliott arrive avec une liste de morceaux à jouer, très précise... est-ce que c'est un échange, c'est participatif ? Ou bien est-ce que c'est lui LE maître d'uvre, autour de SON événement...
OD : Non, non ! Ça fait déjà un long moment, que... Elliott me demande toujours mon avis. On construit le "set" ensemble. On change notre "set" à peu près tous les ans, d'ailleurs... Parce qu'on en a marre de jouer certaines chansons et qu'il y a à chaque fois un nouvel album à jouer... On le fait toujours tous les deux, mais, après, il peut avoir des envies...
On parle bien de la formule en "groupe", là, vrai ? Parce que, je suppose qu'à "deux", ce doit être différent, forcément !
OD : Oui, oui ! De toute façon, avec ou sans le groupe, on base, on construit le set à deux ! Elliott apporte les morceaux qu'il aimerait vraiment faire, et puis, après, il me demande si j'ai des idées ou quel morceau on pourrait changer... et par quoi le remplacer ! Il a sa ligne directrice, mais il me demande toujours : "est-ce que tu as une idée ? Ce morceau serait bien "là", qu'est-ce que t'en penses ?", et moi j'interviens en lui disant ce qui irait bien et avec "quoi", au niveau "tempo", ou autre... On le construit vraiment à deux...
Ce qui vous permet l'un et l'autre de réinjecter des chansons que vous aviez oublié...
OD : Voilà ! Et puis, au niveau de ces deux shows, c'est vraiment spécial, aussi, parce que, on a un fan japonais, qui... C'est seulement la deuxième fois qu'il sort du Japon, en fait, en vingt-huit ans !!! (Une constatation suivie d'un court rire sec, comme étonné...) ... Et... C'est seulement la seconde fois qu'il voit Elliott sur scène, donc... Comme il a fait tout ce trajet, ben... on joue des morceaux exprès pour lui, quoi !!! Elliott aime bien cela aussi, quand quelqu'un qui ne l'a pas souvent vu jouer vient le voir pour lui demander quelque chose. Il aime bien pouvoir leur faire ce cadeau-là...
Tout autre chose... Au niveau des morceaux de ce très beau It Takes A Worried Man, il y a une nouvelle fois cinq morceaux signés "Murphy/Durand" ! Comment est-ce que vous vous partagez les choses, niveau composition, écriture... C'est une collaboration, de type "Lennon/Mc Cartney" - ils ont joué, le très de circonstance When I'm 64, âge d'Elliott, la veille au soir... - ou bien est-ce que cela fonctionne différemment : plus des idées, des parties, ou, des... Riffs ?
OD : Ça dépend vraiment ! Y'a des moments où on va se retrouver pour... (Il réfléchit)... Certaines de ces chansons ont été écrites ensemble : on avait un "day off" en Corse, on était dans la même chambre, à Bastia... On a sorti les guitares... J'avais deux ou trois idées qui traînaient, et... on a commencé à les jouer ! Il m'a alors montré des idées de refrain, et... pas mal de morceaux sont sortis comme ça...
Lesquels ? (Superbe relance, non ? C'est là qu'on voit que c'est bel et bien un "métier"...)
OD : Little Big Man et Little Bit More, par exemple ! Pour ces deux morceaux-là, j'avais des idées de riffs, à la base, et puis on a construit tout le reste ensemble, avec Elliott ! C'est une façon de faire, mais... D'autres fois, c'est juste Elliott qui apporte des morceaux quasi finis, mais qui m'dit : "il me manque quelque chose... Tu veux pas mettre ton grain de sel, là dedans ?", comme avec Then You Start Cryin', où j'ai apporté l'intro et d'autres idées sur le refrain. C'est vraiment un jeu à deux, quoi... C'est toujours à deux ! Non, à part le morceau He's Gone, qui s'est monté différemment : c'est d'ailleurs la première fois qu'on bossait comme ça ! J'avais commencé à écrire tout le morceau, tout seul, et... il a changé le texte en Anglais et a ramené l'intro, mais... C'est rare que ça vienne de moi comme ça, mais...
Le squelette, c'était le tien, en fait... (Pas mal, la relance, là aussi ! C'est un métier difficile, on vous dit...)
OD : Oui ! À la base, c'est un morceau qu'on écrivait pour (la chanteuse Espagnole) Luz Casal...
Avec qui tu as collaboré...
OD : Et avec qui je collabore encore, oui. Elle voulait que je lui écrive un morceau... Elle en voulait "un", en Anglais... Je lui ai dit qu'Elliott allait le lui écrire en Anglais, et...
Il a fait une adaptation de ton texte ! Que tu avais écris comment, d'ailleurs ?
OD : J'avais commencé à l'écrire en Anglais, le texte ! Et, lui l'a mis en "poésie", plus qu'en texte... par la suite ! Voilà comment ça s'est passé...
Le reste du temps, le texte, c'est lui, non ? Globalement...
OD : Oui, et je ne vais surtout pas mettre mon grain de sel là-dedans, sauf... Sauf sur Ground Zero, évidemment ! Où j'ai fait la partie en Français (un texte partagé entre Français et Anglais, écrit à deux après les attentats du 11 Septembre et extrait de l'album Soul Surfing / The Next Wave/2002).
Globalement, il existe plusieurs méthodes, mais toujours ce même "échange", ce va et vient perpétuel entre vous deux...
OD : Oui, oui... Ça n'est pas du genre : je vais lui envoyer un "bout" de morceau, et lui qui me le renvoie par la suite...
Ça n'est donc pas non plus, dans le genre "échange traditionnel entre un chanteur et un guitariste" : Elliott s'occupant du corps du morceau et du texte, et toi y ajoutant le "riff" de guitare, les arpèges, ou autres "parties", derrière...
OD (il dénie, secoue la tête, rigolard) : Bien sûr que non, c'est selon... Parfois même, le morceau se construit à deux, comme ça... Rain, Rain, Rain, par exemple - (extrait de Elliott Murphy (2011) - on s'y est mis tous les deux pendant une balance en Allemagne... Il a commencé à faire la suite d'accords et moi j'ai apporté le "riff" (il le mime, se met même à le chanter : "tin, tin, tin-din, tin don don dooown !)... Bon, et puis, ça a traîné un p'tit peu, mais... "ça" s'est fait comme ça... C'était totalement "live", sur scène, pendant une "balance" !
Il est né de "ça", donc, directement !
OD : Oui ! J'ai tout de suite vu que c'était une bonne idée, et... j'ai pris mon p'tit enregistreur, afin de pouvoir garder une trace...
C'est LE morceau de la malédiction, parce que, cet été vous l'avez joué en plein air à Pouzols Minervois (proche de Narbonne) encore une "capitale" de notre hexagone, par ailleurs, et... le ciel s'est ouvert ! Littéralement. Un déluge !
OD (il se met à rire, il s'en souvient forcément) : On a même été obligé de s'arrêter de jouer, oui... (Il se met à rire de nouveau franchement, à cette évocation !).
J'aimerais savoir, au niveau "live", parce que... vos dates en "duo" ou "groupe" s'entrecroisent sans arrêt... Comment vous appréhendez les deux formules, globalement ! Si pour vous, c'est tellement "rodé", que ça ne change rien, en fait, sur le fond...
OD : Tu sais... faut toujours un temps d'adaptation, quand on se retrouve à deux, parce que... on n'a pas notre "basse, batterie" ! Il faut donc que l'on joue d'une certaine façon, quoi ! Elliott va plus se charger de bien appuyer dans les "basses" et... Et moi, je dois prendre un autre "chemin", et puis... Selon ce qui se passe avec le public, Elliott peut parfois lâcher sa guitare, alors... Il faut que je sois là, à ce moment-là, moi, vu qu'Alan (Fatras/Batterie) et Laurent (PardoBasse) ne le sont pas, et... faut donc que je comble au mieux. C'est différent et c'est pareil en même temps...
Et puis, je ne vais pas te demander TA préférence, vu que tu as ton batteur posté tout à côté, en ce moment...
OD (rire franc en le regardant !) : Quand on est avec le groupe, on a vraiment l'énergie... Totale ! C'est peut-être plus "Rock'n'Roll", c'est vrai, mais... On arrive à faire des trucs "Rock'n'Roll" à deux aussi, quand même...
Je vous ai vu à "deux", aussi, et il y vraiment des moments où ça "part" bien ! Y'a en tout cas pas de problème au niveau "énergie", au niveau "tension", improvisation...
OD : Parfois à deux, c'est plus simple pour Elliott de sortir un morceau du chapeau... parce qu'il sait que je les connais à peu près tous ! Si quelqu'un lui demande un morceau, où si lui a tout à coup envie de jouer tel ou tel morceau, il sait que ça va le "faire" ; alors qu'avec le groupe, il faut que les gars se rappellent du morceau. Maintenant... ils commencent à en connaître pas mal, alors ça va, mais, bon... C'est vrai qu'on a peut-être plus cette possibilité là (à deux) de jouer avec le public ! On peut changer de morceau sur...
Sur une "envie", comme ça, au dernier moment ? Sur un son, une suite d'accords...
OD : Voilà ! On peut plus s'amuser comme "ça"...
Ça vous est beaucoup plus facile, forcément. Dis-moi... tu es avec-lui depuis 1996...
OD (il sourit des yeux à cette évocation) : Ça fait dix-sept ans, oui !
Ça fait un bail, donc... Dis-moi, à la "louche", là, comme ça... vous avez un vivier, un répertoire de combien de morceaux, que vous pouvez "sortir", comme ça, au dernier moment, en "live", à deux ?
OD (Pensif...) : J'ai jamais vraiment calculé ! À tous les deux, y'a bien... 150 chansons... peut-être !
Que vous pouvez "sortir", à tout moment, comme ça ?
OD :Oui, oui ! Bon, y'aura p'têt' des p'tites hésitations sur ceci ou cela, mais, oui... ou plus, même, je crois...
Si on vous fait une liste au dernier moment, en vous disant : jouez ce qui est dessus...
OD : Oui, oui, on peut le faire... On l'a déjà fait pour des fans, une fois : un concert qu'ils avaient organisé, avec Pierre - peut-être LE fan Français le plus fidèle et assidu, d'Elliott et de NAS, depuis ces 15 dernières années... - dans une chapelle, totalement en acoustique. Ce sont eux qui avaient choisi le répertoire...
Ils vous avaient fait une liste de leurs "morceaux rêvés", et vous les avez joués ?
OD : C'est ça, exactement...
Ça avait pris beaucoup de temps, pour caler tout cela ?
OD : Non, non... On avait joué direct !!!
Au niveau de ta façon de jouer : je t'ai vu dans les deux formules, et... Tu m'as paradoxalement eu l'air d'être plus "serré", d'avoir un espace plus restreint, quand tu évolues dans la formule "duo"...
OD : Ouais, parce que, ben... Tu es obligé de jouer tout autrement ! Déjà, avec la guitare acoustique, je me suis fait une façon de jouer qui sonne Rock'n'Roll, mais qui sonne également "acoustique", et... quand nous sommes tous les deux, c'est forcément différent... À part sur les morceaux "lents", où, là, j'peux m'amuser, et...
... Comme sur, On Elvis Presley's Birthday, où, là, tu peux vraiment te lâcher, improviser...
Surtout, que, ben... faut envoyer ce qu'il "faut", quand il le faut : surveiller, faire attention en permanence...
À propos de Then You Start Cryin', extraite du dernier album, qui fait d'ores et déjà partie des grandes chansons dElliott, et... qui pourrait d'ailleurs prendre place dans n'importe lequel de ses grands albums passés, sans les dénaturer, bien au contraire... Tu y prends un beau solo qui est un peu TA marque de fabrique... Cette façon unique de mêler tout à la fois une attaque franchement "Rock", et une approche très mélodieuse ! Comme sur Green River, qui est nantie de ce solo très technique, mais foncièrement mélodieux et "coulant"... Il comporte une "attaque", ok... demande une vélocité... mais sonne tout de même très "rond", accrocheur, mélodieux... C'est quelque chose de délibéré que tu as développé au fil des années ?
OD (Pétillant du regard, visiblement ravi... ) : Je ne sais pas, oui, mais... c'est venu comme ça, petit à petit, au fur et à mesure, je crois... Déjà, avec Little Bob, à l'époque, j'avais quelques solos qui sonnaient comme "ça", techniques, tout en restant mélodique, et... Avec Elliott, "ça" s'est développé parce que lui me laisse l'espace suffisant... de la place sur scène pour que je puisse y développer mes idées. Donc, forcément, tu évolues...
J'aime bien être, quelque part, dans la "continuité" du morceau ! Au niveau de l'ambiance du morceau, tacher de la respecter...
Tu fais souvent des contrepoints, derrière, des "rappels", toujours collé à "elle"... la mélodie !
OD : C'est ça, voilà ! J'aime bien être "dedans", et... Si tu fais un solo, c'est pour raconter quelque chose, aussi... Si tu travaille juste du "riff", ben... Bon... sur du Chuck Berry, ça va aller, mais, sur un morceau mélodique, si c'est pour faire juste du "riff" ou de la démonstration, ça n'apporte pas grand chose au morceau... Ça n'emmène rien à la musique ! Autant ne pas faire de solos...
Tu sais d'où ça t'es venu ? (Question "pertinente", là encore, comme quoi, quand on bosse bien son sujet en "amont"...)
OD : Au début où j'ai commencé à jouer... J'ai beaucoup parlé avec Guy Georges Gremy, qui était le guitariste de la Little Bob Story, au début, et... qui était un de mes guitaristes préférés... J'ai beaucoup, beaucoup parlé avec-lui, et, lui... Il avait ce concept là du solo. Il me disait : "un solo, c'est comme quand tu rencontres quelqu'un ! Tu dis "bonjour !" au début, tu bavardes, tu racontes ton histoire, et puis après tu dis "au revoir"..." (Rires partagés !)... Je reste toujours un p'tit peu là-dessus... Faut que ce soit "construit"... Faut qu'il y ait une idée directrice...
Comme une "conversation", une "rencontre"... donc !
OD : C'est tout à fait ça ! J'aime bien aussi le côté BB King, où, à un moment donné... Ce n'est plus sa voix mais sa guitare qui chante, qui continue, qui prend le relais, mais, bon... Ça reste dans le "chant" ! (Le champ ?)...
Et... tu avais déjà ce "ressentir" là, quand tu étais avec Little Bob ? (C'est l'instant "polémique", là, il en faut TOUJOURS "un"...Toujours !).
OD : J'étais... Y'avait ma jeunesse, oui, mais... J'étais pas si "libre" que ça... dans ma tête ET dans ma façon de jouer ! Et puis, Bob avait plus d'idées derrière la tête, sur ce qu'il voulait vraiment entendre, et... Il aimait bien que ça reste proche de l'album, quoi, sur scène ! J'avais peut-être un peu plus de place, lorsqu'on faisait un Nobody's Born To Lose, par exemple, mais le reste était quand même... Bob avait surtout du mal à entendre les morceaux différemment que la façon dont il les avait enregistré ! C'était parfois compliqué, comme lorsque nous avions fait cette tournée acoustique à quatre, durant laquelle il nous disait : "je veux entendre exactement ça !"... On lui répondait à chaque fois : "ben, ouais, mais on ne peut pas, on n'est que QUATRE !!!"... (Rires partagés).
Par contre, puisque l'on en parle, tu avais déjà ce son très particulier sur l'album Lost Territories (1993), et le morceau éponyme, surtout : ce côté mélodieux, ce dialogue permanent...
OD : Oui ! Sur le morceau Jimmy Tramp, également ! Que j'avais composé avec-lui...
Il y avait également un morceau superbe, offert en "bonus" avec l'album, à l'époque. Un "2 titres", avec... Je ne sais plus comment il s'appelait, ce morceau, mais... Avec beaucoup de contrepoints de guitare...
OD (il réfléchit, nous réfléchissons de concert, deux bonnes minutes):
C'est pas Sheila'n'Willy, non... Another Kind Of Battle ! Oui, c'est ça ! C'est assez proche des autres, celles dont tu parles, oui, comme approche...
Et donc, sur scène, par contre... C'était "ceinture", avec Bob !!!
OD (il rit) : Oui, plutôt ! Il avait du mal avec... la liberté d'expression des gens !
Tiens, puisque l'on parle "Français", enfin, guitaristes... Français ! Quels sont ceux qui pourraient te sembler proches de ta façon de jouer...
OD : Des guitaristes Français ? (Il semble gêné...)... En fait, le problème, c'est que je n'écoute pas beaucoup de musique Française, donc...
Un mec comme Alice Botté, par exemple, qui a enregistré et tourné avec Charlélie Couture, ou... Tiens... Claude Mairet ! Qui a joué et composé longtemps avec Hubert Félix Thiefaine - qui l'a d'ailleurs remplacé par le susdit Alice Botté, aujourd'hui... - et qui a une approche très similaire à la tienne : des riffs mélodieux, des contrepoints sentis, des solos très bâtis... mélodieux !
OD : Je vois, oui... Mais... comme je ne les ai pas écouté, je ne peux pas te dire ce que... Je suis resté sur Guy Georges Gremy, mon maître ! Et puis, l'autre personne que j'aime beaucoup, c'est Serge Teyssot-Gay...
De Noir Désir ! Avec qui tu as travaillé, d'ailleurs...
OD : Oui ! On va peut-être travailler de nouveau ensemble, très prochainement...
Et... Côté Anglo-Saxons ?
OD (plus à son aise hors des limites de notre hexagone, sur ce sujet, visiblement) : J'aime beaucoup de guitaristes. Quand j'ai démarré, c'était plutôt du Hard Rock que j'écoutais... Michael Schenker était alors mon idole. Tout comme Gary Moore. Maintenant, c'est moins dans la vitesse d'exécution, ce que j'aime... plus au niveau du son, et le placement, aussi, surtout.
Qui d'autre ? Si je t'en demandais, "cinq", par exemple...
OD : Ry Cooder ! Sonny Landreth, pour les parties de "slide".David Grissom : pour le son et sa façon de jouer avec les cordes à vide... Marc Ribot pour la liberté d'expression. Et puis... J'aime bien le coté "roots" de Jimmie Vaughan.
Quels seraient tes parties de guitare préférées, tiens, d'ailleurs ?
OD : Je ne sais pas si j'ai vraiment des solos ou parties de guitare préférées... (Il réfléchit, secoue la tête, se redresse...) ... Où alors, il y en a plein... Genre : Paris-Texas !
Je pense aussi à Stevie Ray Vaughan, sur le solo de Mary Had a Little Lamb extrait du lLive at Pistoia ! En fait, j'ai des périodes où j'écoute plus, tel guitariste, ou tel autre, ça dépend, donc... ça va avec !
Et dans ce que tu as joué ou enregistré avec Elliott ?
OD : Dans ce que j'ai enregistré ou joué "live", j'aime beaucoup ma partie sur On Elvis Presley's Birthday... Le solo d' Eiffel Tower Blue... Celui de I Am Empty ! J'aime également beaucoup : Somebodies Anniversary. En fait, quand tu enregistres, c'est tellement au feeling, parfois, que tu dois réapprendre ta propre partie pour pouvoir la faire sur scène, et... j'aime ça !
Puisque l'on est dans les chiffres, quel serait ton "Top 5" des chansons que tu joues sur scène à ses côtés... Tes préférées !
OD : Je suis super embarrassé là-dessus ! Je dirais : il y a cette chanson qu'on a énormément joué, à l'époque, mais qu'on ne joue plus du tout actuellement, c'est : On Elvis Presley's Birthday... Par rapport à ce que Elliott raconte dessus, rapport à son père, c'est très intime... C'est un des morceaux les plus forts ! Ça fait partie des morceaux "importants"... euh... Caught Short In The Long Run, aussi... Parce que j'aime bien les choses "émotives"... Rock Ballad, aussi, bien sûr... Après, j'aurais vraiment du mal à te le dire, y'en a trop ! Tiens... parfois on fait Anastasia, et c'est un vrai bonheur... Last Of The Rock Stars, évidemment ! Mais, bon, il y en a tellement...
C'est sûr que le gars écrit plutôt bien, et souvent, et... Depuis longtemps !!! Autre chose : tu es la plupart du temps uniquement avec Elliott, en dehors de tes collaborations avec Luz Casal, Serge Teyssot-Gay et tes potes de NAS, les rares fois où vous arrivez à vous caler quelque chose ensemble... tu arrives vraiment à en "vivre", en restant attaché uniquement à "lui" ? C'est tout de même lui qui détiens les droits des chansons...
OD : Oui, oui ! Ça va, oui, parce que... Elliott a toujours tout partagé... Tout ! Je veux dire, c'est lui, mais, par exemple... la première fois qu'un album est sorti avec mon nom sur la pochette... (April/1999)... c'est lui qui l'avait fait, je n'avais rien demandé...
Pas même eu envie de le faire ?
OD : Non ! C'est toujours lui qui a voulu le faire ! Il y a toujours eu "partage", et "échange", du reste, avec Elliott ! Il a bien des idées arrêtées sur certaines choses, oui, mais... il a toujours échangé et laissé la place aux autres pour s'exprimer. Tu parlais "guitare", tout à l'heure... j'ai de la place pour faire mes solos et faire ressentir mes émotions sur scène, et... je fais de plus en plus de churs, sur scène, aussi...
Il n'est pas "directif" ou "dictateur", alors... C'est un alter ego !
OD : Oui ! En même temps, c'est "lui", mais... j'ai ma place ! Il n'est pas "dictateur", ou autre... Avec-lui, c'est comme ça que... la première fois que j'ai vraiment commencé à m'exprimer, c'est sur Rainy Season (2000)... On avait enregistré une partie à New York, et puis, en fait, on a terminé l'album au Havre, avec Florent Barbier (ex batteur des Roadrunners, qui y avait son studio, et... On a commencé à mixer, et, en fait... on se demandait si on pouvait lui dire ce qu'on pensait des morceaux, et, Elliott nous a alors dit : "allez-y ! Faîtes ce que vous avez envie de faire sur les morceaux, et puis après, si ça ne me plaît pas... on verra à ce moment-là !"...
C'est sûr qu'après, il reste tout de même dépositaire du morceau qu'il a écrit, et de ses textes...
OD : Bien sûr ! Mais tu peux tout de même avancer tes idées, travailler sur un morceau comme tu en as envie, et ça, c'est une sacrée liberté...
Tu penses que c'est courant, ce type de relations et de liberté, dans ce métier... lorsque c'est quand même un "songwriter" qui est à la base des choses, de l'écriture des morceaux... Avec une sacrée carrière dans l'rétro, en plus !
OD : Non ! Là aussi, tu vois, lorsque j'ai commencé à écrire des chansons avec Elliott, c'est lui qui me l'a proposé... Tout s'est fait simplement, là-dessus... Encore une fois !
Votre connexion a été immédiate ?
OD : Presque, oui ! Il a fallu un peu de temps, oui... apprendre à se connaître, c'est sûr. Mais, bon, comme on a fait pas mal de dates et tournées tout seul tous les deux, dès le début ... en Allemagne pendant cinq semaines... Que tu es seul dans la voiture avec l'autre, ben... Tu te découvres, écoute de la musique ensemble, parle de la vie en général... ça crée des liens. Musicalement, aussi, parce que... j'ai vraiment appris à découvrir Bob Dylan, grâce à lui, par exemple ! En écoutant Time Out Of Mind (1997) ensemble, à fond ! Lui, m'expliquant le pourquoi des choses, des thèmes, des allusions glissées derrière les mots...
Dis-moi... Depuis "96", ça n'est que du "bonheur", donc, en gros...
Oui, oui ! Parce que, j'ai appris plein de choses de la vie de musicien, rencontré plein de gens... Appris des choses sur moi, bâti ma carrière...
Et puis, entre la première fois où je t'ai vu sur scène à ses côtés (en 1999) et aujourd'hui... Ton jeu de guitare a énormément évolué...
OD : Bien sûr... Oui ! Encore une fois, quand t'as la place pour t'exprimer, tu peux évoluer, quoi...
Olivier Durand sera en concert avec Elliott Murphy au C. A. M Georges Batiget de Rognac (1er partie : Christian Vives) le 12 Avril prochain (15 Euros/renseignements et réservations : 04 42 87 01 45/06 16 95 33 15, ou, kollectivmode@gmail.com) ; ainsi qu'en "dédicace" au magasin de disques Massilia Records, 13 Cours Lieutaud/13006 Marseille (04 84 26 39 14) ce même vendredi 12 Avril, à partir de 14 h !
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Préquelle :
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Interview d'Olivier Durand à l'occasion de la sortie de son album Let's Play It par Jacques 2 Chabannes
Le Havre, le 13/06/2020
Interview du guitariste Havrais Olivier Durand, à l'occasion de la sortie de son album Let's Play It (autoproduction/Juin 2020)
Salut Olivier !
Tout d'abord, destiné à celles... La suite