Chronique de Concert
Radiohead
Le cadre est encore plus beau que celui des deux théâtres antiques que je connaissais, ceux de Vienne et Fourvière, situés en pleine ville. A Vaison-La-Romaine on aperçoit de la verdure, des arbres, l'atmosphère est réellement bucolique.
Pas de changement de personnel chez les Radiohead : il y a toujours Thom Yorke au chant, à la guitare et au piano, Phil Selway à la batterie, Ed O'Brien à la guitare, aux bruitages et aux choeurs, Colin Greenwood à la basse et Jonny Greenwood à la guitare, aux claviers et aux rythmes électroniques sur les titres de "Kid A". Enfin, Nigel Godrich produit les disques depuis "OK computer", cet homme pourrait faire sonner L7 comme les Ronettes produites par Phil Spector.
Les Radiohead sont des gens polis : n'ayant pu assurer leur concert l'année dernière à cause de pluies diluviennes, ils reviennent se faire pardonner un an après pour un unique concert français. La grande classe... Par contre, ça m'énerve sérieusement que Radiohead joue à Vaison-La-Romaine dans le Vaucluse, une ville de 5864 habitants, sous prétexte qu'il y ait une superbe arène et pas à Clermont-Ferrand une agglomération de 250000 habitants. C'est trop injuste. Construisons illico presto un théâtre antique en béton armé au pied du Puy-de-Dôme...
Le concert commence avec "The national anthem", un excellent titre de "Kid A" : riff de basse hypnotique, bruitages spatiaux, rythmes tarabiscotés, chant d'alien, le ton est donné... Ils sont très fiers de "Kid A" et ils le prouvent : l'album sera joué presque intégralement et, contrairement aux prévisions de quelques météorologues de bas étage, ces morceaux expérimentaux prennent toute leur dimension sur scène. Que c'est beau un groupe qui prend des risques la nuit. Le titre le plus réussi de "Kid A" est bien entendu joué : "How to disappear completly" est un véritable chef d'oeuvre (et je pèse mes mots, messieurs dames). Il faut vraiment être un fan de Morbid Angel pour ne pas être transporté par de multiples émotions contradictoires à l'écoute de ce morceau : joie, tristesse, "regarde, je vole", coeur brisé, enchantement. Le rythme lancinant, les géniales ondes Martenot (un vieil instrument électronique qui produit des sons rappelant le chant des sirènes) et la voix extraordinairement troublante de Thom Yorke. Et dire que ses "gémissements" m'exaspéraient à la sortie d'"OK computer" ! Je ne suis pas fier de moi... "Idiothéque" et son rythme électronique piloté en direct par Jonny Greenwood est aussi un titre très réussi qu'on devrait passer sur tous les dance-floor : cela permettrait d'essayer de reproduire les danses frénétiques d'un Thom Yorke à la limite du pétage de plomb. Puis "Morning bell" arrive jusqu'à nos oreilles, c'est une chanson avec des rythmes bizarres et une partie de piano surprenante : on a l'impression qu'il va se planter, que c'est pas dans le tempo. Eh bien non ! Il retombe sur ses pieds, qu'est ce qu'il est fort ce Thom...
Quelques titres de "The bends" et de "OK computer" viennent s'intégrer harmonieusement dans la set list : "Electionneering", "Street spirit (fade out)", "Karma Police", "Airbag", "No surprises", "Lucky". Il n'y aura pas une faute de goût : tout s'enchaîne comme dans un rêve. De plus, ils ont l'air contents de jouer en France, remercient gentiment et il me semble avoir vu Thom Yorke sourire (je demande confirmation quand même !).
Radiohead a décidé de dévoiler quelques titres de l'album "Amnesiac" pas encore sorti. A la première écoute, je ne dirai qu'un mot : "encore une réussite ". Je sais, il y a trois mots, mais je fais ce que je veux mes phrases. C'est un mélange entre l'expérimentation débridée de "Kid A" et les chansons plus conventionnelles (pour Radiohead) de "OK computer". Le pari est gagné : on a une furieuse envie de consommer intelligemment (pour une fois) et de se ruer chez son disquaire !
Radiohead a donc offert un concert absolument cosmique, bien au-delà du niveau de performance moyen : le seul groupe qui se rapproche de cette altitude vient d'Islande. Il s'agit de Sigur Ròs qui avait déjà fait certaines premières parties de Radiohead et qui va sans doute rejouer avant eux Oxford en juillet. Avec ces deux groupes, il faut prévoir impérativement de venir avec des bouteilles d'oxygène ; on atteint en effet des sommets où l'air est totalement absent !
(Photos prises par Jean-Pascal Blache à Benicàssim, le 3 août 2002.)
Critique écrite le 29 mai 2001 par Pierre Andrieu
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