Chronique de Concert
Sallie Ford - Shiloh
Shiloh qui ouvre la soirée et dont nous avons déjà dit ici le plus grand bien, est formé de deux tiers d'ex-Electrolux : Cedric, au chant et à la guitare, et Manu et à la batterie. Le duo est fasciné par les musiques traditionnelles américaine et l'imagerie du sud des Etats-unis de l'entre-deux guerres. Avec Shiloh country, rockabilly et rythmiques jazz passent à la moulinette garage punk. Ce soir l'atmosphère est moins "americana " ou " country" que les fois précédentes où j'avais pu les voir. On retrouve les éléments bien identifiables de leur musique : le chant éraillé de Cedric, entre Captain Beefheart et Tom Waits, des parties épileptiques de guitare rockabilly alternant subtilement riffs et solos, et un jeu de batterie tout en finesse ternaire.
Mais le duo développe ce soir des climats beaucoup plus sombres. La musique de Shiloh pourrait être une bande son idéale pour une virée nocturne dans les bayous : blues déchiquetés à la manière des premiers Bad Seeds ou rockabilly ténébreux à la Cramps, la plupart des titres sont joués mid tempo à l'exception d'un titre plus " punkabilly ", l'excellent Fever. Comme à son habitude le duo arrive toujours à captiver son auditoire grâce à sa vision personnelle et maîtrisée du " southern gothic ".
Sallie Ford est lancée sur une tournée européenne pour son nouvel album Soul Sick. Depuis ses débuts et avec trois albums à son actif, la jeune femme donne dans un genre très " classic rock " mais gorgé de soul music. Sa musique est très référencée au blues, à la soul, donc, au rockabilly, au rock'n'roll des origines ou au garage mais n'est pas passéiste pour deux cents et reste très sentie et d'une étonnante fraicheur.
Elle présente son nouveau groupe constitué de trois musiciens : un batteur, une jolie bassiste blonde qui taquine sa Rickenbacker et un claviériste qui sera omniprésent. La chanteuse est elle-même armée d'une fender mustang qu'elle ne lâchera pas. Sallie Ford a une voix chaude et expressive marquée par les chanteuses soul ou blues comme Bessie Smith ou Janis Joplin. Le groupe attaque avec un titre très blues rock. Ca a un peu de mal à décoller mais la jeune femme et ses acolytes vont être assez vite galvanisés par un public très chaud.
Le devant de la scène est vite à bloc, l'assistance est assez jeune (toute proportion gardée), on n'est pas dans un concert de rock avec une majorité de quadras / quinquas, ce qui est finalement assez rassurant au vu des références " vintage " citée plus haut de la miss. Même si sa musique est très référencée aux années 60 et 70, Sallie Ford a vraiment l'art de torcher de bonnes chansons entrainantes et accrocheuses comme pouvaient l'être certains tubes désormais intemporels des labels Motown ou Stax de cette époque, ceci expliquant l'engouement qu'elle rencontre ici.
Le groupe peut passer ensuite à des titres très garage comme Middle Child. Le clavier apporte une couleur très soul voire psyché 60's à la musique en utilisant des sonorités d'orgue hammond ou farfisa. Il part souvent dans des impros ou des longs solos que je n'ai pas trouvé ennuyeux une seconde mais que certains ont trouvé un peu trop envahissant. S'il était pour moi un digne héritier d'un Booker T. (claviériste de la grande époque du label Stax), d'autres l'ont trouvé trop démonstratif et l'ont un peu perçu comme un vulgaire Charly Oleg (personnage néanmoins sympathique).
La bassiste assure les choeurs sur quelques titres, faisant ainsi sonner le tout comme un excellent " girl group ". Jusqu'au bout, le quartet ne se départira pas de son énergie. Il fait en rappel une reprise de " You don't own me ", chanson de Lesley Gore popularisée par Dusty Springfield, que Sallie Ford présente non seulement comme une chanson féministe mais aussi comme un " big fuck off " à Trump. Le concert se termine donc en beauté. Les réactions ont été quand assez partagées, quelques uns ont reproché au groupe un son trop " propret " et pas assez rugueux, voire " baloche ", ce que j'ai trouvé quand même un peu exagéré, ce n'était quand même pas un concert d'Adele.
Toujours est-il qu'il est intéressant de voir qu'un concert a suscité des réactions aussi contrastées. Daté ou trop propre pour quelques uns ou très actuel pour beaucoup d'autres, le " classic rock " de Sallie Ford a rencontré globalement ce soir le plus chaleureux des accueils.
Photos Julien Confalionerie
Critique écrite le 14 avril 2017 par Phil2guy
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> Réponse le 21 avril 2017, par Yep
Je m'étais arrêté à Sallie Ford & The Sound Outside et son garage 50's pétillant. La nouvelle formule m'a beaucoup moins séduit... et j'ai trouvé le son très ... taratata. Toujours un grand plaisir d'écouter Shiloh. Réagir
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