Chronique de Concert
Shiloh
Un vendredi soir au Non Lieu , cet étrange cabaret hors du temps, parfaite carte postale pour une aventure sonore. Lollipop déverse ses derniers retardataires qui trinquent volontiers avec Richard Hell et la bande-son du cru (disqualifiant les Cranberries avec un Zombie avorté faisant succomber Dolores O'Riordan une seconde fois).
Et puis arrive l'heure du thé dansant, l'embarquement en première classe pour un pèlerinage en terre confédérée avec Shiloh -non pas la race de chien de berger ni le country folk band du frontman des Eagles - mais bien le duo marseillosoviétique issu des classieux Elektrolux , Manu aux drums, Cédric-James guitare et chant.
Devant un parterre de chaises pliantes et de punks debout, le combo minimaliste largue les amarres ; de roulement en roulis, la batterie sonne et résonne avec épaisseur et vélocité, tour à tour lourde et subtile, auréolant un frontman au charisme schizophrène, incarnant différents personnages avec un voix tantôt rocailleuse pour camper un boucher d'outre tombe, tantôt grésillante, perdue dans une incantation insomniaque. Le déhanché est en apesanteur, le jeu tout en retenue, les doigts se figent sur un accord unique, obsédant, ou se délient à la faveur d'une mélodie hypnotique. Guitare et batterie se répondent, la porte grande ouverte sur un paysage désolé/saccadé en technicolor.
Le blues vaporeux laisse place à du psychobilly hargneux avant le dernier acte. Un tambourin s'égare dans la foule ; cymbales, toms et grosse caisse glissent sur les rails, et puis une guitare se greffe, lancinante, avant une explosion rythmique comme le climax d'une sale histoire de comptoir qui nous laisse le scalp en vrac sur un fond mélodique et velours aux effluves de bourbon fané.
Après moins d'une heure de set ébouriffant, Shiloh "laisse place au barman" histoire de prolonger l'ivresse.
Il n'y aura pas d'after façon saloon, Cédric F. ayant refusé de provoquer une rixe pour pimenter la narration ; les polardeux ne sont décidément plus ce qu'ils étaient. Heureusement que je suis entourée de gens de foi qui me confirment que le concert n'était pas en playback (révérence à Emma A.) et que le pac à l'eau coule à flot.
plus de photos par Julien par ici
Critique écrite le 23 janvier 2018 par odliz
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