Chronique de Concert
Slift
J'avais vraiment coché ce concert de longue date ! Je m'étais d'ailleurs débrouillé pour que le Père Noël m'y invite... Je m'étais même agacé dans les jours précédents que l'Espace Julien n'utilise pas la formidable affiche créée pour l'occasion (ou au moins, une des pochettes splendides des vinyles de Slift, signées Caza), pour y préférer une affiche de com' institutionnelle franchement dégueulasse, que la bonne bouille des trois musiciens ne pouvait pas sauver à elle seule... Et pourtant, j'ai bien failli ne pas venir du tout !
Il se trouve que ce samedi 6 avril 2024, fut la journée de l'agonie (pas trop douloureuse, heureusement), de notre family cat, une certaine Miaulette (sans doute le félin le plus gentil du monde, pour votre gouverne), qui nous a quittés précisément à 21h30 ce soir-là. La pauvre bête n'ayant certes plus besoin de nous, on m'a alors poussé à bien aller me faire ramoner les oreilles, le cerveau (et pourquoi pas, le coeur) par le fantastique trio - certes la meilleure surprise sonique du rock en France de ces dernières années ! J'y fus donc, mais avec une attention quelque peu flottante et quelques mixed feelings, on le comprendra... En plus d'avoir totalement raté la première partie, bien sûr.
Slift, voyez-vous, est ce type de groupe que toute votre famille déteste écouter en voiture, à part vous (heureusement, c'est vous qui conduisez généralement) - à l'évidence il est d'ailleurs plutôt enregistré pour s'épanouir sur vinyle, et avec un son plus ample ! Le public amateur de rock bruyant ne s'y est pas trompé, à voir le nombre d'aficionados, mais aussi de musicos croisés pendant et après le concert (citons notamment l'ex- Moon Rà, dont la musique certes moins brutale, a quand même une parenté génétique avec Slift). Public très majoritairement masculin et velu, comme souvent, au delà d'une certaine dose de brutalité sonique - c'est un simple constat...
Le groupe a à peine commencé quand j'arrive - vu la durée de leurs chansons j'aurai encore une bonne part d'Ilion, déclaration aussi ambitieuse que belliqueuse qui ouvre le récent album du même nom, et s'achève dans un finale déjà terrifiant... Sur scène, on voit surtout les projections psychédépileptiques (habituelles pour le genre "space rock", au sens large), qui parviennent presque à masquer ces trois garçons au look de metalnerds, charismatiques et sans chichis. Très sympas et très contents de rejouer à Marseille - car il se trouve que Cooki et ses sbires de La Salle Gueule les avaient déjà repérés et programmés, dans leur grande sagacité, il y a des années !
Un fantastique raffut, fort bien sonorisé ce soir-là, et fait seulement à trois, avec une batterie, dix cordes en tout sur deux outils de chez Gibson, un ou deux claviers à potards, une belle gamme de hurlements allant des plus graves aux plus aigüs... Et sans doute, une bonne trentaine de pédales d'effet sous les panards (j'ai oublié de vérifier...). Le son de Slift peut passer avec fluidité (et souvent dans le même titre) de passages psychédéliques façon Pink Floyd, à des brutalités metal contondantes pour ne pas dire doom, façon Amenra. Avec un net tropisme vers le brutal tout de même, y compris quand le départ est très atmosphérique (Weaver's weft).
Chaque titre prend le temps de devenir une sorte de construction sonore, puis mentale, évocatrice tour à tour d'espaces cosmiques, d'apocalypses à venir et autres cités cyclopéennes englouties (comme dirait H.P. qui-vous-savez) : le genre de choses qui ne déparerait pas sous la tente Valley du Hellfest (si vous voyez), et de nature à vous faire planer très haut sans avoir à recourir au moindre adjuvant ! Mention spéciale à Ummon, à jamais la première, courte mais dont on ne s'est jamais remis.
A un point donné, le groupe annonce qu'il ne va plus jouer que 3 chansons, provoquant une bronca inutile : hé relax les gars, cela fait encore plus d'une demi-heure de musique ! En récupérant la setlist à la fin (merci au technicien sympa !), on pourra confirmer qu'il n'y a eu "que" 8 titres de joués - sur 90 minutes, quand même, faites le calcul de la durée moyenne... Mais quels titres !
Les amateurs de rock bruyant sont d'autant mieux servis qu'on oublie pas de proposer des passages rythmiques à headbanger ou pogoter, comme Lions, tigers and Bears, aussi jouissive dans son premier mouvement que déconcertante pour la suite ! Pire encore, la terrifiante The Story that has never been told, au départ également perché très-très haut, mais où l'on perd pied à la moitié, lorsque le rythme de batterie se fait non-binaire, donnant l'impression de littéralement tomber dans le vide...
Si notre esprit s'est bien égaré de façon récurrente pendant le concert (la faute à ces circonstances personnelles), l'expérience nous a toutefois fait du bien, d'autant que quelques passages centraux de leurs morceaux sont bien un peu abstraits/hermétiques, et se prêtent donc parfaitement à la déconnexion... On l'aura compris, un concert qui offre une expérience sensorielle presque complète - 90 minutes dans un shaker, pas besoin de rappel, on a été lavé, rincé et séché, peut-être même un peu consolé... Merci Slift et au plaisir de vous recroiser sur scène, espérons-le !
Setlist :
Ilion
Nimh
Ummon
The Words that have never been heard
Weavers weft
Altitude
Lions, tigers and Bears
The Story that has never been told
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Critique écrite le 09 avril 2024 par Philippe
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> Réponse le 09 avril 2024, par lth
merci pour cette chronique qui donne envie de voir Slift live et toutes mes condoléances pour Miaulette (NdPh : merci à vous, c'est adorable !) Réagir
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