Chronique de Concert
Stromae + Thomas Azier
Pas mal de chroniques en retard, mais il y en a une que je tiens à faire assez vite (même si elle m'aura pris beaucoup plus de temps que d'habitude) c'est celle de Stromae... D'une part parce que c'est un des artistes qui a le plus de succès en ce moment (parmi ceux que j'ai vu) mais aussi parce qu'elle va être difficile à écrire je le sens (comme celles de Grand Corps Malade, Nosfell ou encore Rihanna), en ce sens qu'il va falloir que je pèse mes mots pour ne froisser personne et/ou qu'on ne me renvoie pas un "ouais mais de toute façon tu n'es resté que 5 morceaux" pour discréditer tout ce que je pourrais écrire...
Stromae, je ne connaissais pas il y a encore quelques mois quand j'ai entendu deux personnes à mon travail se plaindre que son concert au Moulin était complet depuis belle lurette. Intrigué, je suis allé faire un tour sur internet - pour visionner Formidable, qui m'a donné envie d'en voir plus, et Papaoutai, avec son clip saisissant a enfoncé le clou - puis j'ai écouté les paroles de sa chanson sur le cancer, ce qui a achevé de me convaincre. Un mec qui aborde ce genre de thème avec une belle écriture, c'est assez rare dans la variété... En plus, il a une voix sympa avec un petit quelque chose de celle de Brel (comme la voix de Gaëtan Roussel)... C'est bon, j'irai au concert.
Pas question d'arriver à la bourre et de galérer pour accéder jusqu'au pied de la scène... En plus, il y a une première partie. J'arrive donc tôt (à 20 heures) mais le concert a déjà commencé. Le temps de fendre la public (difficile de passer devant les gens même si on leur dit qu'au bout de 3 morceaux je m'éloignerai ; même en montrant mon pass photo "qu'est ce que j'en sais que vous êtes vraiment photographe ?"). J'arrive donc sur la fin du set du collègue de label de la star de ce soir, un certain Thomas Azier.
Quelques morceaux pour me faire une petite idée de ce Berlinois en blouson en cuir, qui bien que dans une esthétique radicalement différente de Stromae a reçu un accueil bienveillant de la part du public. Accompagné de ses seules machines, Thomas Azier au look rebelle et à l'attitude torturée fait de l'electro (c'est peut-être ça le point commun avec Stromae après tout) avec chant. Des petits airs de Depeche Mode en beaucoup plus aigu. Pas franchement mon truc, mais au moins c'est différent de ce qui va suivre.
A la pause, on sent dans le public la tension des concerts attendus depuis longtemps... Avec des gens qui se doublent et se disputent... N'hésitant pas à appeler la sécurité (qui fort heureusement en a vu d'autres). Un peu avant 21 heures, les lumières s'éteignent, les portables s'allument et un petit dessin animé, montrant un Stromae qui escalade et tombe, laisse le temps aux 3 musiciens de se mettre en place et à la star de ce soir apparaître au milieu, entre les 2 racines carrées (du titre de l'album qui n'a pas fini de cartonner).
De sa silhouette qui se dessine au milieu, on distingue qu'il porte un de ces célèbres bermuda et longues chaussettes remontées bien haut. Comme ses musiciens d'ailleurs. J'étais vraiment dans les meilleurs dispositions, persuadé que moi aussi j'allais être conquis par des prestations scéniques (comme on dit) à l'image de ses clips millimétrés. Alors oui j'ai bien retrouvé le côté millimétré, mais quelque chose manquait, difficile de mettre le doigt dessus dans un premier temps...
Alors que les 3 morceaux que j'avais entendu jusque là m'avaient bluffé je dois avouer que les 3 premiers morceaux du concert seront un cran au dessous... Et ne me toucheront ni par leurs textes ni pas leur musique. Je crois (a posteriori) qu'il s'agissait notamment de te quiero et de peace or violence. Mais c'est presque secondaire. Ce qui m'a gêné c'est ce qu'il dégageait et/ou ce qu'il ne dégageait pas...
J'avais l'impression qu'il avait gardé son masque / visage de cire de Papaoutai (alors qu'il n'avait pas encore joué ce morceau). Cette façon de saluer, ce sourcil relevé pour marquer une certaine complicité ou ironie... Très vite, j'ai eu l'impression d'un acteur enfermé dans son rôle. Les 3 morceaux réglementaires écoulés, je me suis éloigné du devant de la scène, traversant avec moins de difficulté qu'à l'aller un public sous le charme qui connaissait toutes les paroles sur le bout des doigts.
Je suis resté un peu au fond et puis en haut... Mais quand j'ai senti que ça ne changerait surement pas (vous savez pour ne pas faire comme quand on se force à regarder un film jusqu'au bout en espérant que ça va s'améliorer et que ça ne change pas) et j'ai fini par partir au milieu de sa fameuse leçon ... (5ème morceau ?). Je ne ressentais absolument rien, alors que j'étais vraiment venu dans les meilleures dispositions ! Alors ça n'enlève rien à ses innombrables qualités comme celles qu'on peut voir dans ces clips remarquables.
Comme dans chacune de ses interventions télévisés (clip ou "live") tout est réfléchi, et exécuté au millimètre... Rien n'est laissé au hasard ; c'est un très bon acteur, mais sur scène ce soir j'attendais autre chose. Quelque chose de plus humain, plus viscéral, plus personnel... Là en gros j'ai eu l'impression d'être au théâtre alors que j'étais venu à un concert. Depuis le concert et pour essayer de comprendre comment cet artiste qui m'avait tant accroché par écran interposé m'avait laissé à ce point de marbre en live je suis allé regarder d'autres trucs sur lui sur internet...
Son passage chez Ruquier, chez Taddei, dans Tout le monde en parle. J'ai même visionné quelques clips (comme ce alors on danse que je n'avais jamais entendu - comme quoi le fait de ne pas avoir de télé ni radio ça coupe / préserve un peu) ou "non clips" et autres leçons ... Du coup j'ai l'impression de le connaitre un peu mieux, mais ça n'a fait que conforter ce que j'avais ressenti ce soir...
Alors je continue à trouver cela bien que qu'il ait autant de succès avec les thèmes pour le moins sensibles qu'il aborde (cancer, adultère, inceste*, misogynie, société de consommation, individualisme, ...) et même si ça finit par faire un peu catalogue (et donc un peu facile) je suis (comme tout le monde) d'accord avec le propos et même content que quelqu'un le chante avec autant d'audience .. *comme lorsque Agnès Bihl avait chanté Touche pas à mon corps au Dome en première partie de Charles Aznavour.
Au final quand même, il ne se dévoile pas tellement lui ; on rejoint la différence acteur / chanteur que je faisais plus haut qui fait que je n'arrive pas (en live) à me sentir connecté. C'est d'autant plus étrange qu'en interview (les seuls moments où il est un peu plus lui même) je le trouve hyper attachant, que je me retrouve dans beaucoup de choses qu'il raconte (comme sur la paternité ou les boites) et qu'il est très honnête.
Le meilleur exemple étant ses fameuses leçons (dont celle avec Jamel où il dévoile ses grosses ficelles). Et lorsqu'il parle lui même de sa styliste, ses graphistes, etc ... On se rend compte à quel point il y a du monde derrière lui. Ou encore lorsqu'il raconte que pour lui faire de la musique c'est comme des maths, on sent que ça obéit à des lois, des schémas où chaque chose à un sens et un but. Ca et lorsqu'il s'est mis à parler de son côté maniaque / ce besoin de tout maîtriser, ont fait que j'ai un peu mieux compris pourquoi sur scène c'était moins touchant.
Peut-être, si j'avais été quelques dizaines de mètres plus loin je ne m'en serai pas rendu compte ... Mais là à 1 mètre, le sourire figé à la Ben l'Oncle Soul ça ne pardonne pas ... Alors oui, si je n'avais pas été au J1, je serais surement resté plus longtemps et peut être qu'il aurait fini par se lâcher un peu après, mais honnêtement j'en doute un peu ... Finalement je le trouve beaucoup plus humain à la télé ! En conclusion, dans le paysage de la variété francophone on peut dire qu'il apporte un véritable bouffée d'oxygène (des textes graves comme ceux là on n'avait pas vu ça depuis Marcia Baila ou Le Petit Train des Rita Mitsouko) et c'est surement pour cela qu'il semble rallier autant de monde à sa cause (je connais des tas d'artistes de styles très éloignés et pas du tout grand public qui sont tombés sous le charme si j'en juge par les statuts facebook que je vois passer ces temps ci) ... Et même si tout à été fait pour que ça marche sur un maximum de gens, on ne peut pas lui en vouloir vu le propos et l'honnêteté avec laquelle il le fait...
Quant à la scène, vue la taille des salles qu'il va désormais remplir et la distance physique qu'il y aura désormais entre lui et le public, et les mises en scène qu'il pourra se payer, aucun doute que ses concerts seront de grands shows à la -M- and co avec ce petit truc en plus dans les textes une fois de plus ...
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Critique écrite le 17 novembre 2013 par pirlouiiiit
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