Pour cette dixième édition du Festival Nuit d'Hiver, le GRIM rend hommage au compositeur John Cage, disparu il y a vingt ans et qui aurait eu cent ans cette année. L'ensemble Subspecies et Le Cabaret Contemporain ont été conviée pour cette deuxième soirée du Festival à la Salle Seita de la Friche Belle de Mai.

L'ensemble Subspecies, dirigé par le bassiste David Merlo et constitué de quatre musiciens issus du rock et du jazz et d'un quatuor acoustique (clarinette, saxophone, alto et violon), ouvre donc cette soirée avec " Situation ", leur première création composée lors d'une résidence au GRIM. La démarche de Subspecies est de confronter musiques " actuelles ", Rock, Jazz, voire Noise aux musiques contemporaines jugées plus " savantes ". La formation réussi fort bien ce décloisennement. " Situation " est une longue pièce écrite qui donne la part belle à l'improvisation. Les deux quatuors, placés presque face en face, s'interpellent et se répondent : les déflagrations sonores jouées à la guitare et de belles improvisations au claviers alternent avec des passages plus free ou plus calmes, exécutés le plus souvent par les instruments acoustiques. Une musique qui réserve de beaux moments, avec un très intéressant travail sur les nuances et les textures sonores, mais qui malgré tout n'évite pas certaines longueurs.

Le Cabaret Contemporain est un quatuor de musiciens aguerris (batterie / contrebasse / guitare/ piano préparé) issus du jazz et de la musique improvisée, spécialisé dans la réinterprétation des grands compositeurs contemporains, tels Xenakis, Steve Reich ou même Frank Zappa. Pour ce " John Cage Project ", la formation rend donc hommage à John Cage en revisitant très librement plusieurs pièces du compositeur, datant des années 40, initialement écrites pour des percussions. Etienne Jaumet, véritable sorcier des synthétiseurs analogiques et moitié de l'excellent duo électro Zombie Zombie, et également grand amateur de musiques contemporaines, a été invité pour l'occasion. Comme Cage l'avait fait pour le piano préparé, les musiciens préparent leurs instruments en y ajoutant des objets afin de transformer leurs sonorités initiales. L'interprétation est remarquable de cohésion et de finesse. La rythmique est d'une précision implacable. Les nappes de synthétiseurs d'Etienne Jaumet, jamais en retrait, apportent une touche d'électronica qui s'accorde parfaitement aux sonorités acoustiques de l'ensemble. Les pièces plus contemplatives s'enchaînent avec des pièces très rythmiques. Le résultat est étonnant, ludique, dansant même, et échappe à toute classification précise de genre. Cette remarquable prestation, sans temps mort et captivante de bout en bout, montre que la musique de Cage conserve toute sa puissance et sa modernité.