Chronique de Concert
Teme tan + Calypso Valois + Agnes Obel (Les Escales du Cargo)
Revoir enfin Agnès Obel... qui se montre cruellement distante avec nous (pas une lettre, pas un coup de fil...) depuis son magnifique concert de première tournée en 2011, au Silo de Marseille... Ca valait bien une escapade d'une soirée à Arles, avec hébergement improvisé dans une petite auberge pour backpackers, dite "du Pélerin et du Voyageur" et située pile en face de l'arrière du Théatre Antique. Simple et rustique (j'ai un peu passé la nuit à me demander si mon lit superposé n'allait pas se casser la gueule et écraser le type qui dormait en dessous...), mais à un tarif imbattable, tout à fait clean et surtout très pratique pour les Escales du Cargo qui débutent ce soir sur le trottoir d'en face - une adresse recommandée donc !
Depuis l'auberge, on écoute d'ailleurs, en s'installant dans un dortoir, les longues balances de la première partie théorique, Calypso Valois, parfaitement audibles par la fenêtre ouverte ! Et à vrai dire sur scène plus tard, il ne se passera pas grand-chose de plus : la demoiselle bien née (c'est la fille d'Eli & Jacno !) pratique avec son groupe une pop génétiquement marquée années 80, vaguement subversive par moment (Méchante Fille, façon Lio, pas mal !), sympatoche mais globalement pas trop marquante pour le moment. Le public de bonne composition (...les places à 42 euros, ça écarte quand même statistiquement les risques de crétins criant "à poil !"...) l'écoutera et l'applaudira poliment à la fin, profitant de l'occasion pour écraser en même temps quelques-uns des moustiques qui attaquent en piqué, selon la célèbre tradition arlésienne, à la bascule du jour...
Un peu avant, on aura eu grand plaisir à revenir dans cet écrin magnifique qu'est le Théatre Antique (pas revu depuis un show stratosphérique de Sigur Ròs, il y a déjà quelques années). Hyper-organisé pour le coup (avec casse-croûte fait maison et une belle pinte de bière achetée sur l'Avenue des Lices), j'attendrai stoïquement, une petite demi-heure, que se rétracte enfin l'immense et double queue qui serpente dans le Jardin, avant l'ouverture des grilles du monument. Bien inspirés, les camions de crêpes et de glaces qui se sont placés là font leur chiffres d'affaire de l'année, parmi les spectateurs qui prennent ainsi leur mal en patience. Tout ça pour rentrer sur le site après un contrôle trop sympathique et/ou complètement nul - je ne pensais pas que le truc archi-éculé d'avoir sa bouteille d'eau pleine à la main pendant la fouille, marcherait encore quelque part...
Dans le théatre nous attend, en première première partie inattendue donc, le jeune Teme Tan, reprogrammé ici par son label car une visite impromptue de... Jupiter, en hélico, l'a empêché de jouer un set prévu dans l'après-midi à Arles (au fait, j'adore ce t-shirt local anti-parisien qui dit : "En Arles, on dit à Arles !"). Bruxello-congolais ou le contraire, et nouvelle signature chez les Play It Again Sam, il chante plutôt joliment (avec une belle amplitude) sur des boucles électro ou guitare, relax ou entraînantes selon les titres, boucles qu'il empile au fur et à mesure en les enregistrant. Eminemment sympathique, parlant notamment de sa grand-mère puis de sa mère dans des chansons habitées, il parvient à faire participer le public dès le début, et même à le faire lever en grande partie à la fin. Pour ma part j'ai plutôt apprécié... jusqu'à ce que ça vire un peu trop afro à mon goût. Applaudissements finaux bien plus fournis néanmoins, que pour la miss qui l'a suivi.
Après un looooong changement de plateau (et la tombée de la nuit), arrive le trio tant attendu (désormais quatuor, puisqu'il y a des percussions en plus) de la gracieuse Agnès Obel. Précisons tout de suite que devant une telle chanteuse à la voix cristalline, belle comme un coeur, magnifiquement vêtue et coiffée, et qui plus est drôle et pertinente dans ses interventions, le pauvre chroniqueur se retrouve totalement sans défense... Il ne tentera donc même pas de vous dire que certains visuels étaient trop chargés voire un peu moches, que c'est mal de ne pas laisser les photographes pros s'approcher (ce qui éviterait ce qui illustre la présente chronique, puisque mon camarade habituel des Eurocks, Andy Trax, y était !), que les images de micro-caméra en noir et blanc projetées sur une écran géant, c'est pas très beau, ou que le groupe marchait très bien sans percussions aussi... Ou encore que la belle nous a privé.e.s sans raison particulière de Philharmonics, de Aventine et d'autres de ses plus anciennes merveilles...
Mais avouons que de toute façon tout ça serait complètement anecdotique. Appuyée sur ses nombreux atouts (voir paragraphe précédent) ainsi que sur une discographie riche de déjà trois disques (dont au moins les deux premiers sont essentiels), l'éblouissante danoise qui a presque fini par savoir parler français après des années de tournée, n'a qu'à dérouler : elle joue sur du velours ! Ses 3 accompagnatrices font des choeurs admirablement justes et harmonieux, qui ne couvrent jamais sa voix fascinante. Pas mal des titres qu'on pensait un peu anodins de son dernier album prennent du coup une ampleur, une puissance inattendue en live, comme Trojan Horses, qui devient une marche guerrière digne de Westeros, ou bien It's happening again, qui dévoile une étrangeté inattendue.
Annonçant que c'est le dernier concert avant longtemps, la dame nous laisse accroire qu'elle va donc jouer très longtemps - ce ne sera pas le cas hélas. Mais après avoir plané très haut sur des bijoux comme Familiar, Fuel to Fire, Run cried the crawling ou l'époustouflante The Curse (chair de poule numéro un), tout sens critique est définitivement éteint, surtout quand elle passe au piano, nous offrant son meilleur profil. Pour Stone, une de ses acolytes se risque à l'ukulele (toujours casse-gueule mais ça passe !), et Mary est aussi plus puissante que dans sa version enregistrée. Bien évidemment, le groupe revient en rappel jouer Riverside (chair de poule numéro deux) et conclure, après présentation du groupe et de toute l'équipe, salutation et mini-speech sympa ("Thanks for inviting us to play here !", jolie formule pour des spectateurs qui ont payé pour vous voir, non ?), sur la toujours délicieuse On Powdered Ground. A ce stade, il n'en faudrait pas beaucoup plus pour qu'on se roule sur le dos en ronronnant de plaisir...
Cerise sur le gateau, après ce finale éblouissant, je parviendrai à récupérer la set-list sur scène (un peu sportif car j'ai eu besoin d'un roadie et d'un pompier pour y arriver !). La suite de la soirée sera moins glorieuse, une fois Andy Trax reparti. Car Arles, c'est un peu comme Marseille : "Barcelone jusqu'à 20 h, et Barcelonnette après !"... Mais recueilli par le seul bar encore ouvert après minuit autour des Arènes, je serrerai quand même la main de Monsieur le Maire (ça ne s'invente pas...). Le lendemain, retour sous une vilaine petite pluie matinale, qui fait réaliser avec horreur qu'ici, comme presque partout en Provence, la même averse il y a douze heures aurait sans doute forcé les organisateurs à devoir tout annuler. C'est déjà arrivé et ça arrivera encore, tant que les organisateurs feront le pari de l'économie d'une scène couverte ou au moins recouvrable ! Pour ma part, de dépit, je m'en serais très probablement jeté dans le Rhône, down by the riverside...
Setlist :
Citizen of Glass
Dorian
It's happening again
Golden Green
Familiar
Trojan Horses
Fuel to Fire
Run cried the crawling
Red Virgin Soil
The curse
Stone
Mary
Stretch your eyes
Encore :
Riverside
On powdered ground
Critique écrite le 20 juillet 2017 par Philippe
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