Accueil Chronique de concert Terry Poison, Yacht, Windmill, Noël Akchoté, Andrew Sharpley
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Chronique de Concert

Terry Poison, Yacht, Windmill, Noël Akchoté, Andrew Sharpley

Cartonnerie, Reims 25 octobre 2007

Critique écrite le par




Très, très étrange et désagréable sensation. Me suis-je trompé de salle ? De jour ? De lieu ? Là, en face de moi, c'est une scène, non ? Et le gars assis sur sa chaise, c'est bien une guitare qu'il tient ? Non ? Est-ce que je rêve ? Est-ce que je n'ai pas trop bu pour fêter mon embauche (bière, whisky, calvados) ? Est-ce que, est-ce que... Peut-être une répétition, un artiste en résidence ? Derrière lui, une toile, sur la toile, des images. Ah, et puis, à droite, j'aperçois une autre personne, assise, devant un ordinateur.
Entre eux et moi, toute une salle. Vide. Je me retourne. Je m'apprête à quitter l'endroit sur la pointe des pieds. Je ne veux surtout pas déranger.
Quand je finis par distinguer, deux-trois autres silhouettes dont celle de Rodolphe Rouchaussé, l'un des maîtres de la Cartonnerie.
Il s'agit bien d'un concert public. Nous sommes bien jeudi 25 octobre. Festival Elektricity. Les deux personnes sur scène sont Noël Akchoté et Andrew Sharpley. J'ai honte. La seule personne qu'ils verront pendant leur concert ce sera moi. Derrière mon appareil photo. Heureusement, leur musique n'est pas de celle qui commande des applaudissements, ni des stage-diving. Ce sont des ambiances arides, sinistres, des notes de guitare lentement égrenées qui résonnent dans le vide. C'est beau et ça me touche. Les images sont plus comme des tableaux mouvants que de simples images. Elles rendent la musique encore plus aride et sinistre.



Si j'avais bien reconnu Noël Akchoté comme étant le guitariste, je ne pensais pas que son compagnon, à droite, derrière l'ordinateur, était Andrew Sharpley. La moitié de Stock Hausen und Walkman. Un groupe dont je ne sais trop rien. Ils ont existé. Je ne sais pas s'ils existent encore. Je les ai vus, il y a dix ans, ou plus, à Paris, vers Montparnasse avec Noël Akchoté justement. Ca n'avait rien à voir. Ca m'avait plutôt cassé les couilles et les oreilles, sans trop savoir quoi en penser. De l'electro tarabiscotée et éreintante, avec Akchoté qui se contorsionnait sur son manche pour en sortir des sons trafiqués.
Jeudi soir, Andrew Sharpley semble muet. J'ai l'impression qu'il n'envoie rien depuis son portable, ou si peu que mes oreilles de demi-civilisé n'en perçoivent que la guitare. Une guitare contemplaintive.



J'aime les contrastes violents, les passages du coq à l'âne, les éléphants qui débarquent dans les magasins de porcelaines. Un moulin à vent quand l'ennui est au nucléaire. Je suis alors ravi, mais ravi, quand Windmill atterrit devant moi. Je suis toujours seul devant la scène. Toujours la même ambiance fantômatique. Mais au-dessus de ma tête, il y a un chanteur pianiste à lunettes, Matthew Thomas Dillon, qui est vivant, très, très vivant. Il est très heureux. Très, très heureux. D'être en France pour la première fois, de jouer pour nous à Reims. Il en fait des tonnes. Comparé au vide devant lui. A l'absence de public. Il en fait des tonnes. Porté par sa voix très haut perchée et ses mélodies d'idiot chantant. De gentil idiot. C'est très proche de la Danielson Family, la voix suraigüe, le piano et la gaieté américaine. Sauf qu'ils ne sont pas américains. Windmill est un groupe anglais. C'est vraiment très, très proche des Danielson. Les mélodies sont seulement un peu plus classiques, je dirais même un peu plus guimauves que leurs collègues américains, c'est un chouia moins hystérique dans le rythme. Autour du pianiste, les autres sont calmes. Un bassiste à la placidité exemplaire, propriétaire d'une admirable voix grave, une gentille violoncelliste qui couve le Matthew de son regard aimant et protecteur, puis un batteur, qui semble amusé par les fantaisies de son chanteur, tout en le secondant aimablement.



Le chanteur suivant n'était pas bien différent. Un gentil dingue. The Blow (Portland, Oregon), vous connaissez ? Je n'ai jamais pris le temps de parler de son concert à Paris. The Blow, c'est Khaela Maricich, un petit cœur mal foutu qui s'y prend comme une gourde en tombant amoureuse des mauvaises personnes aux mauvais moments. En 2004, elle s'est associée à Jona Bechtolt. Elle écrit, elle chante, et lui, Jona, c'est un garçon, l'aide dans la production de ses vignettes electro-sentimentalo-pop. Et là, ce soir de misère, je retrouve Jona, seul, avec un portable, un micro et des images. Il a quitté The Blow pour se concentrer sur une carrière solo, sous le nom de Yacht.
Le garçon est monté sur des ressorts. C'est entre le concert et le one-man-show. Il commence par se présenter. D'où il vient. Avec une carte dans son dos, genre google earth jusqu'à arriver sur notre bonne ville de Reims. Détail important. Un tee-shirt Alf. Je viens de voir trois vidéos. Tournées en trois endroits, trois moments différents et toujours le tee-shirt Alf. Je n'en tire aucune conclusion, mais c'est à noter. Pour la musique, de l'electro-pop énervée, ça ne m'a pas séduit plus que ça. C'était marrant. Et vu le contexte, il a été admirable d'énergie et de bonne humeur.



Même chose pour les dernières. Marrantes. Très marrantes. La musique était sympa, limite anecdotique, proche de CSS, et d'un tas d'autres machins contemporains que je ne connais pas. C'est dansant. Ca doit parler de sexe. J'imagine. En tout cas, certainement pas de la panique au Darfour ou en Palestine. Et pourtant, ce sont des Israeliens. Un Israelien et quatre Israeliennes. Le gars, Bruno, est planqué au fond, on croirait une pièce rapportée, mais il tient un rôle prépondérant dans la composition, un peu comme dans CSS.
La musique ne m'a pas transporté de bonheur, mais un concert de Terry Poison reste une expérience à vivre. Une expérience d'abord visuelle. Faut voir comme elles sont sapées. Talons hauts, culottes de couleurs, ajoutez à cela un peu de graisse accumulée sur la route...
Je suis resté un bon moment interloqué. C'est pas vraiment mon univers, le fun et le sexe, enfin tout ce que peut véhiculer cette musique. C'était assez inédit pour moi ce poison.



Pour faire le spectacle, il y avait essentiellement deux filles. Louise, qui chante en anglais et Petite, qui minaude en français. C'est un peu la belle et la bête. Petite étant la belle, chétive créature victime des assauts de Louise, espèce de machin tyrannique qui saute en tout sens, se jette au sol. Toutes ces manœuvres ont eu le mérite de rameuter un peu de public au devant de la scène. Des mâles essentiellement. Des bras se sont levés, des têtes ont hoché, il y a même eu des sifflets. Ca ressemblait enfin à un concert. Ouf !
Dix entrées payantes.
Ca fait quand même mal au cul.
Pour quatre groupes.
Au même moment, il y avait une importante fête étudiante en centre-ville, la première du genre, Noctampus, avec du cirque, des concerts, des open bars.
Ca n'a pas dû aider.

Le samedi suivant, il y avait, certes, plus de groupes encore. Il y avait Justice, Carabine, The Shoes, la crème de la crème de Reims avec encore Yuksek, Brodinski. C'était complet et je n'y étais pas.
Je filmais un match de basket féminin à Paris. Et le basket féminin, c'est quand même moins excitant que le catch féminin ou même que le volley-ball ou le hand féminins.

 Critique écrite le 30 octobre 2007 par Bertrand Lasseguette


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